1 000 foyers de la région toulousaine vont être mis à contribution pour expérimenter pendant 12 mois, le réseau So Grid, lancé par ERDF. Une innovation qui permettra en temps réel d’analyser et comprendre le comportement d’un réseau électrique dans son ensemble. Le but est notamment d’améliorer la gestion des pannes et la production d’énergies renouvelables.
Par Valentin Dohin
L’innovation est de taille, c’est une première mondiale, et Toulouse sera la ville pilote de la mise en application de cette rupture technologique. Depuis ce lundi 7 septembre, un échantillon de 1000 foyers toulousains, depuis le quartier Saint-Cyprien jusqu’à Vielle Toulouse, va permettre la phase de test de la technologie « So Grid ». Ce « Smart Grid » permettra de connaître et d’observer le comportement d’un réseau électrique sur un territoire, dans ses moindres recoins jusqu’au client final.
L’innovation réside sur le fait que le courant électrique peut transporter des données numériques. Cette technologie appelée Courant porteur ligne (CPL) existe déjà sur les réseaux de basse tension, comme dans un domicile où il l’est possible d’être connecté sur internet via sa prise électrique. « Grâce à la technologie So Grid, le CPL peut désormais s’appliquer sur des réseaux de moyenne tension et sur de plus longues distances », explique Philip Lolies, Vice-Président marketing & application de STMicroelectronics. STMicroelectronics est notamment l’inventeur d’une puce électronique nouvelle génération qui permettra de collecter ces données. « L’installation de cette puce ne nécessite pas la transformation complète du réseau électrique, nous avons trouvé le moyen de la fixer sur le réseau déjà existant », précise Philip Lolies.
Des contenus numériques qui pourront être analysées et décryptées pour améliorer précisément ce réseau. Ainsi le système sera en mesure de détecter une panne et sa cause, d’optimiser la distribution énergétique et comprendre les modes de consommations de manière bien plus fine qu’aujourd’hui. « Par ailleurs, la production énergétique se diversifie et s’atomise », explique Gilles Capy, directeur inter-régional ERDF Sud-Ouest. La gestion électrique est de moins en moins centralisée. Aux gigantesques centrales électriques s’ajoutent des unités de production de taille plus modeste. Désormais, même le consommateur devient producteur d’énergies renouvelables ; les parcs éoliens et photovoltaïques fleurissent partout sur le territoire. «En 2008, seulement 2000 foyers en Aquitaine et Midi-Pyrénées étaient producteurs d’énergies renouvelables, il y en a 45 000 aujourd’hui », affirme Gilles Capy. Enfin, ces sources d’énergies renouvelables sont autant capricieuses qu’instables, le but de cette technologie sera de les apprivoiser.
Deux ans de recherche
Cette innovation aura nécessité deux ans d’études, une dizaine de brevets d’intérêt mondial, une centaine de chercheurs et d’industriels et 27 millions d’euros d’investissements. Le consortium SoGrid réunit dix groupements scientifiques, avec notamment l’école Polytechnique, Sagem, CapGemini…
La Toulouse School of Economics parraine aussi le projet. Environ 5 chercheurs analyseront les contenus délivrés par le Smart Grid. Le président de l’école, Jean Tirole, est venu expliquer l’intérêt de cette innovation : « Nous n’avons toujours pas trouvé un moyen fiable de stocker des énergies renouvelables. Il faut donc savoir organiser un réseau de distribution et rendre intelligent la consommation d’énergie électrique, surtout dans un contexte de réchauffement climatique ». Il ajoute : «désormais le consommateur d’énergie électrique devient aussi producteur, cela va créer un bouleversement dans la tarification. C’est un terrain inexploré pour les économistes qui devront en déterminer les mécanismes de régulation, et ce nouveau réseau intelligent sera l’outil des économistes». Le prix Nobel a tenu à aborder la confidentialité du stockage de ces contenus numériques : « Avec cette technologie, il est primordial de savoir à qui seront confiées ces données qui relèvent à la propriété privée et intellectuelle. Il faudra penser à la création d’une agence indépendante de régulation du stockage de ces contenus».
12 mois d’expérimentation
Pour l’instant, le « Smart Grid » est en phase de test seulement sur la consommation des particuliers situés à la fois dans des zones urbaines et rurales de la région toulousaine. Cette phase de test s’achèvera dans 12 mois. Une fois les conclusions tirées de cette expérimentation, le réseau So Grid pourra s’étendre aux producteurs et à l’ensemble des consommateurs. So Grid est l’un des 20 projets français d’ERDF dans le domaine des réseaux intelligents.
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