Questionné par Arnaud Simion, député de Haute-Garonne, le gouvernement a annoncé suspendre l’expérimentation d’expulsion des centres d’hébergement d’urgence menée dans le département. L’élu dénonçait un « tri des personnes sans-abris adossé aux critères du pire ».
L’État a annoncé sa suspension. Début février, la préfecture de Haute-Garonne a lancé une expérimentation d’expulsion des centres d’hébergement d’urgence. Une initiative qualifiée de « désastreuse » par Arnaud Simion, député PS de la 6e circonscription du département. Cette expérimentation, comme l’explique la préfecture du Rhône qui la mène également, doit, en fait, permettre de « développer la fluidité du dispositif d’hébergement d’urgence ». Ainsi, elle vise « à mettre en œuvre des fins de prises en charge des ménages toujours hébergés dans le dispositif alors que les vulnérabilités qui avaient motivé initialement leur admission n’existent plus ou que d’autres solutions sont possibles ».
Des termes jugés « pudiques » par le député de Haute-Garonne qui, dans un courrier au ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, et à la ministre chargée du Logement, Valérie Létard, préfère parler de « tri des personnes sans-abris adossé aux critères du pire ». Il fait ainsi remarquer que cette expérimentation a « pour objet de libérer des places des centres d’hébergement en expulsant les ménages par une modification des critères ». « En effet, étaient considérées comme non prioritaires avec cette expérience, et donc remises à la rue, les personnes n’ayant pas ou plus d’enfant de moins de trois ans et n’ayant pas de problème de santé », rapporte, dans un communiqué, Arnaud Simion.
Selon lui, cette expérimentation va « mettre à la rue de nombreuses familles, d’abord en Haute-Garonne et dans le Rhône avant une potentielle généralisation sur tout le territoire ». C’est pourquoi, lors de sa question au gouvernement ce mardi 11 mars, le député lui a demandé de cesser cette expérimentation dénonçant « une mise en concurrence des vulnérabilités ». « L’État s’apprête ni plus ni moins à hiérarchiser la misère sociale plutôt que de trouver des solutions pour y remédier », jugeait-il avant d’estimer que cette démarche est « contraire au Code de l’action sociale et des familles » puisque celui-ci « consacre l’inconditionnalité de l’accueil pour toute personne en situation de sans-abrisme et de détresse médicale ».
Par ailleurs, l’élu relève que « le programme destiné à l’hébergement d’urgence est sous doté » et suggère « comme la Cour des comptes le préconise dans son rapport du 1er octobre 2024, une contractualisation pluriannuelle avec les gestionnaires des centres d’accueil, qui permettrait une gestion durable des crédits alloués à l’hébergement d’urgence et faciliterait la coordination des acteurs de terrain que sont l’État déconcentré, les foyers d’hébergement et les associations ». Après avoir souligné que « la politique de lutte contre le sans-abrisme est une priorité de l’État », le ministre de l’Aménagement du territoire et de la Décentralisation, François Rebsamen, a annoncé la suspension de ces expérimentations.
« Je vais être très clair. Je souhaite, avec la ministre du Logement, Madame Létard, travailler systématiquement à trouver des réponses positives pour les personnes afin d’éviter les remises sèches à la rue. Alors, il n’y aura, et je m’y engage devant vous, aucune remise en question de l’inconditionnalité de l’accueil ainsi que des droits des personnes », a-t-il déclaré avant d’ajouter qu’il a « demandé de mettre un terme à ces expérimentations dans les deux territoires ». Face à cette annonce, Arnaud Simion exprime « un soulagement ». Mais il va rester « vigilant pour que cette expérimentation ne se poursuive et ne s’étende pas ».
Commentaires