Le mercredi 24 février dernier, le percussionniste toulousain Aurélien Gignoux était sacré Révélation soliste instrumental aux Victoires de la musique classique. Une distinction qu’il est seulement le deuxième percussionniste à recevoir.
Premier bain. Il y a ceux qui naissent dans les choux et ceux qui naissent dans une fosse d’orchestre. Aurélien Gignoux, le jeune percussionniste toulousain qui vient d’être sacré Révélation soliste instrumental aux Victoires de la musique classique, appartient à la seconde catégorie. Fils unique de deux instrumentistes de l’Orchestre national du Capitole, le jeune homme a grandi au sein d’une famille de musiciens. « Quand j’étais petit, j’assistais aux répétitions de l’orchestre. Mes premiers souvenirs se sont construits autour de cette incroyable expérience de partage », raconte le lauréat dont l’éveil musical se fait également dans les églises, au côté de son grand-père organiste. Immanquablement, comme ses oncles et tantes avant lui, l’enfant hérite de la mélomanie familiale.
Un élan naturel. Et, dans la forêt d’archets, de bois et de cuivres qui composent un orchestre symphonique, un instrument fascine Aurélien Gignoux. Ou, plutôt, une famille d’instruments. Du haut de ses trois ans, le futur soliste n’a d’yeux que pour l’homme orchestre qui se démène au fond de la scène : le percussionniste. « C’est une des plus vieilles familles d’instruments avec la flûte et la voix. À cet âge, c’était très instinctif. Mais j’étais déjà fasciné par cette dimension primitive qui s’exprime dans le rapport au rythme et à la sonorité », confie-t-il. Alors, de lui-même, il demande à ses parents de l’inscrire au conservatoire. Et, à l’âge où les enfants apprennent à tenir un stylo, lui, s’initie au maniement des baguettes.
L’appel du large. L’apprenti percussionniste commence alors à explorer le monde de la musique et à se forger l’oreille. Il écoute de la musique classique, avec un petit faible pour Stravinski, et surtout découvre le jazz et l’audacieuse liberté de ses interprètes. « C’est un oncle, pianiste de jazz, qui m’a offert l’album “Kind of Blue”, de Miles Davis, lorsque j’avais 10 ans. En plus du disque, il m’a donné les clés d’écoute », se rappelle Aurélien Gignoux. Celui-ci se plonge alors dans une musique qui colle parfaitement avec son tempérament. Sans être casse-cou, le jeune homme aime se confronter aux limites. Amateur de sports de glisse, il pratique le ski et le surf. « Sans m’enfermer dans une quête de l’exploit, j’aime sortir des sentiers battus et aller chercher des sensations fortes. Que ce soit dans les sons, la musique ou l’instrument, mais aussi dans la vie en général », confie cet amateur de grands espaces et de sports « un peu extrêmes ».
Horizons. Marimba, timbales, caisse claire, vibraphone… Pour cet esprit aventureux, les percussions offrent un terrain de jeu idéal. « On change d’instrument et de technique tous les jours. En fonction des envies, on peut travailler avec des sonorités métalliques et, le lendemain, préférer la chaleur du bois. Nous devons en permanence adapter notre jeu, notre frappe. Naviguer et trouver un lien harmonieux entre le corps et l’oreille », s’enthousiasme le musicien. Une liberté d’autant plus grande que les percussions sont longtemps restées dans l’ombre d’instruments plus prestigieux. « En tant que soliste, nous avons tout à faire. Le répertoire consacré aux percussions à moins de cent ans. Ce qui nous épargne un héritage pesant comme c’est le cas d’autres instruments qui ont une grosse histoire autour du répertoire soliste », se félicite le lauréat qui fait du trio K/D/M son laboratoire. Cet ensemble, actuellement composé de deux percussionnistes et d’un accordéoniste, est spécialisé dans les collaborations avec les compositeurs contemporains.
Et lisières. Au sein de ce trio où il retrouve Adélaïde Ferrière, la première percussionniste récompensée lors d’une cérémonie des Victoires de la musique classique, Aurélien Gignoux continue de cultiver son attirance pour les territoires nouveaux. « J’aimerai tendre des ponts entre le monde de la création contemporaine, l’improvisation et la musique classique. Rendre cette dernière plus accessible sans sacrifier la finesse et la précision. Et, pourquoi pas renouveler un peu l’approche du concert », envisage le jeune lauréat. Une philosophie à l’image de son jeu où la quête d’une « forme de pleine conscience » du son se fonde sur l’équilibre entre maîtrise et prise de risque.
Commentaires