CAPITOL(I)UM – Dans la Ville rose, personne n’a jamais indiqué le chemin de l’hôtel de ville. Ce n’est pas que les Toulousains manquent de courtoise, mais ici l’administration municipale siège au Capitole. Plus qu’une particularité linguistique, le nom de la mairie de Toulouse est une exception historique. – Nicolas Belaubre
Sur la place du Capitole, tout le monde sait où se trouve le bureau du maire. « Dans le Capitole, derrière nous. Mais je ne sais pas à quel étage », assure Antoine, un jeune homme qui patiente au pied du bâtiment. En revanche, il est plus hésitant sur l’origine du nom. « Je ne sais pas, c’est historique. Peut-être que Toulouse a été la capitale à une période ? Ou parce que c’était au milieu, là où il y avait le plus de monde. Alors ils ont appelé ça le Capitole », hasarde-t-il. Plus loin, un groupe avance d’autres hypothèses. « Ça doit avoir un rapport avec les Cathares », risque Denis. Mais c’est Anna, son amie de Barcelone, qui connaît encore le mieux l’histoire de sa ville d’adoption : « Ça vient des Capitouls. Je dirais que c’était une famille qui dirigeait la cité... » Malgré quelques imprécisions, la réponse prend forme.
Pour garantir la rigueur des explications, nous interrogeons Emmanuelle Marelli, guide à l’Office de tourisme : « Le Capitole, c’est le lieu où se réunissaient les capitouls, de riches marchands rassemblés en “commun conseil”, l’ancêtre du conseil municipal. En 1189, le comte Raymond V signe avec eux un traité exceptionnel qui fonde leur indépendance politique. Ce sont ces édiles qui vont gérer la ville pendant 600 ans. »
À sa création, l’hôtel de ville est alors logiquement baptisé Capitulum, le mot latin signifiant chapitre, une assemblée ou un lieu de délibération. Pourtant, au XVIIe siècle, Guillaume Cammas, l’architecte chargé de dessiner la nouvelle façade du Capitole fait graver Capitolium, avec un “o” et un “i”, en lettres dorées sur le frontispice. Si cette variante latine se traduit également par Capitole, elle désigne, en réalité, l’une des sept collines de Rome où était édifié l’un des plus importants centres religieux. Rien à voir, donc, avec nos magistrats languedociens. Dix ans de travaux sur ce majestueux palais de brique et de pierre lui en ont-ils fait perdre son latin ?
On a peine à y croire. La façade la plus emblématique de la Ville rose arborerait fièrement une grossière faute d’orthographe ? N’exagérons rien ! L’inscription cache, en fait, une trompeuse référence à l’antiquité. C’est en 1522 qu’un greffier de l’hôtel de ville décide de jouer sur la confusion entre les deux homonymes et d’adopter l’orthographe de Capitolium, attribuant ainsi une glorieuse, mais illégitime, origine antique à la municipalité. Après tout, un capitoul vaut bien un sénateur romain ! Si l’orthographe est restée, il faut toutefois rendre à Rome ce qui lui appartient.
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