Aujourd’hui, nous passons avenue de la Garonnette en voiture. Mais hier, nous y naviguions en barque. La rue, qui se termine au pied du Pont-Neuf, a longtemps été un bras de la Garonne. Comment l’eau a-t-elle un jour laissé place au goudron ? – Gabriel Haurillon
Au départ de l’avenue, côté Pont-Neuf, Maxime profite du soleil hivernal pour pratiquer quelques jongleries: « Moi, Garonnette je pensais que ça venait du fait que l’avenue reliait la Garonne à la ville », explique-t-il dans un haussement d’épaules. “Garonnette” est en fait un sobriquet donné tout le long de la Garonne aux bras secondaires du fleuve.
De cette excroissance longtemps restée aquatique, il n’existe plus aujourd’hui que le tracé d’une rue.
Comment le fleuve a-t-il été ainsi amputé du bras droit ? « C’est sans doute lié à l’histoire géologique », tente Stephane qui sort d’un magasin de meubles design. « La Terre a connu des périodes plus chaudes, le niveau de la Garonne était alors plus haut et les eaux envahissaient l’endroit. » Christine, son épouse lui lance tout de même un regard sceptique. À raison, car la Garonne toute proche connaît encore des épisodes d’inondation. D’immenses portes métalliques se ferment d’ailleurs aujourd’hui en période de crue pour éviter la résurrection du bras mort.
Il ne faut pourtant pas remonter bien loin dans le temps pour trouver une Garonnette vive. Dès le XIIe siècle, le bras secondaire sert de canal de fuite au moulin du château Narbonnais. Cet édifice enjambait l’ancienne rivière à son amont, au niveau de l’avenue Maurice Hauriou. L’eau canalisée était utilisée à actionner les 16 meules du monument. Durant toute cette période, le quai de Tounis est une île. Le pont du même nom, dont une seule arcade est encore visible au milieu de la rue, témoigne d’ailleurs de ce passé insulaire.
« C’est l’avènement de la voiture qui a tué le cours d’eau ! Ils ont construit un parking et ça a été la fin», s’indigne Thérèse, riveraine des lieux. Il est vrai qu’à la fin du XXe siècle, l’avenue était un immense site de stationnement, accueillant près de 300 véhicules chaque jour. C’est toutefois l’année 1924 qui sonne le glas pour le cours d’eau : « La centrale électrique du Ramier est réquisitionnée pour alimenter la poudrerie et les usines d’armement, ce qui provoque la fermeture des vannes du moulin », décrit Jan Renette dans son ouvrage “Toulouse : Passé – Présent”. Stagnante, la Garonnette devient alors un égout à ciel ouvert et sera asséchée et assainie entre 1947 et 1954.
L’aspect actuel de l’avenue n’apparaît qu’en 2007, quand la mairie supprime 120 places de parking, remplacées par un cheminement piétonnier. Quelques arbres font aussi leur retour le long du petit canal installé côté pair pour rappeler le passé fluvial du lieu.
La rédaction
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