Recyclage – Le large socle complique la contemplation de cette éblouissante sculpture. Perchée au sommet d’une colonne de 19,20 mètres de haut, la statue dorée domine la place et boude la Halle aux grains. Qui est ce personnage aux formes féminines et comment est-il arrivé là ? – Gabriel Haurillon
Dans l’agitation de la matinée, Gérard avance, recule, traverse la route et s’accroupit : « J’ai du mal à photographier la statue. Soit la colonne la cache, soit elle est trop loin ou à contre-jour. » Le Parisien, en visite à Toulouse, finit par obtenir le cliché désiré : « C’est un hommage à la révolution, comme celui de la place de la Bastille », assure-t-il. Un détail cloche pourtant : la poitrine dénudée de la statue suggère un personnage plus féminin.
Anne s’attarde près de la colonne avec ses enfants. Vincent, 8 ans, pense avoir trouvé l’explication : « C’est un ange avec une couronne d’épines à la main, ça représente la paix. » La statue tient bien des végétaux tressés en cercle entre ses doigts, mais ce sont des lauriers, bien moins douloureux à saisir. Un peu plus loin, Clarisse, 13 ans, suit les regards convergents, mais affiche une moue sceptique : « C’est clair pourtant, la fille est enfermée par les quatre monstres en bas, elle essaie juste d’attirer l’attention avec ses cerceaux pour qu’on vienne la délivrer ! »
Les molosses au pied de la statue sont en fait des griffons, animaux aussi mythologiques que Tholose, la déesse qu’ils protègent. La statue représente en effet cette divinité, allégorie de la ville de Toulouse. Si ses ailes de bronze sont trop lourdes pour voler, cela ne l’a pas empêchée de voyager. Cette œuvre du sculpteur Jean Rancy date de 1550, et s’affichait au sommet de l’actuel donjon du Capitole : « La jeune déesse, campée sur le pied gauche, brandissait fièrement la girouette aux armes de la ville et sa main gauche prenait appui sur un grand écu », explique la Société archéologique du Midi de la France.
Dame Tholose n’arrive place Dupuy qu’en 1832, victime de la pingrerie des conseillers municipaux. Ces derniers veulent rendre hommage à Dominique Martin Dupuy, héros toulousain des guerres napoléoniennes, mais sans se ruiner. Pour économiser sur le statuaire, ils recyclent donc la déesse, transformée en Victoire. Des couronnes de laurier remplacent les symboles de la ville, pour saluer les succès du général.
Pour observer de près et sans peine cette statue à l’histoire rocambolesque, il suffit d’aller au musée des Augustins, où l’œuvre originale est conservée depuis 2005. Un moulage l’a remplacée au sommet de la colonne actuelle.
La rédaction
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