HOMMAGE – Un an après son assassinat au journal Charlie Hebdo, huit de ses amis ont voulu rendre hommage à l’économiste toulousain Bernard Maris à travers un livre rempli d’anecdotes et des pensées. Un livre poignant et qui remet un coup de projecteur sur les qualités méconnues dans la vie protéiforme de Bernard Maris.
Mercredi 7 janvier 2015, pendant la conférence de rédaction du journal satirique Charlie Hebdo, Bernard Maris fait partie des dix personnes assassinées par deux terroristes appartenant à une filière de l’organisation Al-Qaïda.
L’année suivante, huit de ses amis rassemblent dans le livre “Pour saluer Bernard Maris” plusieurs témoignages classés en huit thématiques. Parmi les plumes, plusieurs Toulousains, dont le romancier Christian Authier et l’écrivain Michel-Julien Naudy. L’avocat Julien Larère-Genevoix, fils de Sylvie Genevoix qui a été l’épouse (en deuxièmes noces) de Bernard Maris a lui aussi voulu écrire sur son beau-père. L’économiste Jacques Sapir fait partie des auteurs tout comme le Meusien Michel Bernard, le nouveau sous-préfet de L’Haÿ-les-Roses (94) et écrivain –dans son temps libre- qui connait bien la famille Genevoix. L’énarque et professeur Arnaud Teyssier figure parmi les plumes, tout comme le romancier et essayiste allemand Sébastien Lapaque. Le dernier contributeur, Alain Leygonie, conclut lui le recueil de témoignages avec une partie où il parle du « Toulousain » Bernard Maris. Avec Christian Authier, Maris et Leygonie avaient l’habitude –dès 1960- de se retrouver au Café Saint-Sernin. Autre lieu qu’ils affectionnaient, celui de La Bible d’or, une librairie dans la rue du Taur. Un lieu où « on y parle littérature à voix basse », se souvient Alain Leygonie.
Homme des sciences économiques, c’est dans la Ville rose à la fin du mois de septembre 1946 qu’il voit le jour. Élève dans le prestigieux lycée Pierre de Fermat de Toulouse, il poursuit sa route à « Sciences Po ». Il traverse quelques centaines de mètres pour rejoindre l’université Toulouse 1 Capitole (UT1) afin de soutenir sa thèse de doctorat sur le thème de « la distribution personnelle des revenus : une approche théorique dans le cadre de la croissance équilibrée » en 1975. Mais dès la fin des années 1970, Bernard Maris devient déjà enseignant-chercheur à UT1. C’est plus tard, en 1994, qu’il obtient l’agrégation puis part du Capitole pour rejoindre la capitale. Désormais enseignant à Paris-VIII, il commence à écrire plusieurs ouvrages en s’inspirant de l’économiste Keynes : ‘‘Keynes ou l’économiste des citoyens’’ ou des essais critiques comme l’ ‘‘Antimanuel d’économie’’ ou encore ‘‘Des économistes au-dessus de tout soupçon’’. Bernard Maris est un économiste hétérodoxe.
En 1992, il s’investit également dans la presse et participe « à la renaissance » de Charlie Hebdo. Il devient dans la foulée l’un des chroniqueurs réguliers.
« Ce n’est pas un économiste comme les autres, explique Alain Leygonie, il croit davantage à la littérature qu’à l’économie ». Aussi écrivain, Bernard Maris a publié plusieurs romans dont “Et si on aimait la France” à titre posthume. Aux yeux du romancier et journaliste Christian Authier, “Le Journal” est le roman « le plus abouti et le plus ambitieux ». Fait de luttes de pouvoir et d’argent, « Maris croque avec talents les personnages d’une comédie humaine contemporaine », explique le lauréat du prix Renaudot de l’essai 2014.
Avec une vie aussi diversifiée, « il est impossible de ranger l’esprit de Bernard Maris aux curiosités infinies dans une case ».
PASSAGE LIVRE – Cette fois, Bernard Maris est descendu de Paris en voiture pour voir sa mère, sa fille et son fils. Après deux heures de route, il s’arrête sur une aire d’autoroute. Il est précisément en train de pisser lorsqu’un type s’en vient pisser à côté de lui. À la fin, il risque un œil sur son voisin : c’est François Hollande. C’est en 2011, Hollande n’est pas encore président.
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