De nombreux hôteliers et restaurateurs se sont vu imposer un avenant à leur contrat d’assurance professionnelle, visant à redéfinir les limites de la prise en charge de leur perte de chiffre d’affaires en cas d’épidémie comme celle du Covid-19. Ceux qui ont refusé de signer ces nouvelles conditions ont vu leurs contrats résiliés par leurs organismes d’assurance.
Suite au premier confinement, la plupart des sociétés d’assurance ont imposé à leurs clients professionnels, notamment dans la restauration et l’hôtellerie, un avenant à leurs contrats d’assurance. Une modification qui visait à préciser les conditions de prise en charge des pertes d’exploitation et de revenus en cas d’épidémie. « Pour tenir compte de l’évolution du marché de l’assurance, après le déclenchement du confinement face à la pandémie de Covid-19 », justifiait ainsi l’un des assureurs ayant pris ces mesures, dans un courrier adressé à ses adhérents que nous nous sommes procuré. En cas de refus de ces nouvelles conditions, les compagnies d’assurances prévoyaient une résiliation des contrats au premier janvier 2021.
« Ils ont mis leur menace a exécution et nous lâchent. Nous sommes très nombreux à avoir reçu ce courrier de résiliation », regrette Chaouki Asfouri, restaurateur et représentant du Groupement national des indépendants (GNI) en Occitanie. Celui-ci estime à près de 70 % le nombre d’adhérents de son syndicat concernés par cette rupture de contrat. « Les assureurs sont en train de tout verrouiller. Au départ, il pouvait y avoir des brèches. Les assureurs nous protégeaient contre les épidémies, sauf quand elles touchaient plusieurs établissements au même endroit et au même moment », explique le représentant qui juge ces deux clauses contradictoires. Pour lui, les compagnies d’assurances ont durci leurs conditions par crainte de nombreuses procédures émanant de professionnels du secteur.
Plus qu’un durcissement des conditions d’indemnisation, l’avenant qui a été envoyé à l’ensemble de la profession est motivé, par les assureurs, par la nécessite de clarifier les termes du contrat. « La clause qui prête à polémique était liée et limitée aux éventuelles épidémies de légionellose, envisageables dans le cadre de l’activité d’un restaurateur ou d’un hôtel. En aucun cas elle ne portait sur les pandémies. Mais la situation actuelle a amené ces professionnels à en faire la lecture dans le contexte de ce qu’ils vivent aujourd’hui. Il fallait donc être plus précis pour éviter une confusion préjudiciable aux assurés, comme aux assureurs », explique ainsi Catherine Alves, chargée du service presse chez AXA, l’un des assureurs ayant revu ces contrats.
Une demande de clarification d’ailleurs formulée par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), chargée de la surveillance de l’activité des banques et des assurances en France, et rendue inévitable par l’intervention des réassureurs. Ces sociétés qui assurent les assureurs, ont ainsi notifié à ces derniers que tous les risques systémiques seraient exclus de leurs contrats dès 2021 et dans le monde entier. « Les risques dits systémiques ne sont pas assurables. Pour pouvoir assurer, il faut pouvoir prévoir les risques afin de mettre des sous de côté et indemniser les gens. Si l’ensemble des cotisants est victime du même préjudice la prise en charge devient impossible », précise le service de communication de Generali qui rappelle que, jusqu’à aujourd’hui, une telle pandémie n’était pas imaginable.
En parallèle de cette campagne des assureurs visant à reformuler les termes de leurs contrats pour l’adapter aux contexte actuel, la Fédération française de l’assurance s’est penchée sur la création d’un régime propre aux catastrophes exceptionnelles, comme la crise du covid-19 : le dispositif Catex. S’il était mis en place, il permettrait à l’ensemble des TPE et PME de bénéficier d’un indemnisation forfaitaire prise en charge conjointement par l’État et par les cotisations, dans le cadre d’un partenariat public-privé. Ce plan pourrait être déclenché à la suite d’une fermeture administrative d’un grand nombre d’entreprises et à la condition que les autorités déclarent l’état de catastrophe exceptionnelle. En cas de pandémie, mais également à l’occasion d’un attentat terroriste, d’émeutes ou d’une catastrophe naturelle.
En attendant, une grande partie des professionnels de l’hôtellerie et de la restauration, qui a refusé de signer cet avenant, pourrait se retrouver sans assurance à la fin de l’année. « Des milliers de procédures sont en cours pour faire valoir nos droits. Nous demandons surtout aux assureurs de sortir grandis de cette crise et de prendre en charge 25 % de nos pertes de chiffre d’affaire. Comme l’on fait certains assureurs liés aux établissements bancaires », revendique Chaouki Asfouri. Celui-ci assure d’ailleurs que « la profession s’organise pour trouver des solutions rapidement ».
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