Infortune. La commission de surendettement a présenté son bilan 2014 et constate une augmentation des dépôts de dossiers en Midi-Pyrénées. Jean-François Beaucamp, directeur du service des particuliers et des moyens à la Banque de France, en explique la cause et comment endiguer le phénomène .
Jean-François Beaucamp, quelle est la situation en Midi-Pyrénées et en Haute-Garonne plus précisément ?
Nous avons enregistré le dépôt de 9982 dossiers dans la région (42 550€ de dettes en moyenne) pour la seule année 2014, dont 3921 en Haute-Garonne (38 970€ en moyenne). Ces chiffres sont en augmentation de 7,4% dans le département, mais il faut relativiser car nous avons modifié, en janvier 2014, les modalités de dépôt auprès de la commission. Avant cette date, dès lors qu’une suspension d’exigibilité avait été prononcée, un réexamen au bout de 24 mois était systématique. Désormais, le débiteur doit déposer un nouveau dossier. Ainsi, si l’on écarte ceux qui ne se représenteront pas, la hausse n’est plus que de 4,6%. Le taux d’irrecevabilité étant de 8% en 2014 au lieu de 10% en 2013.
Sur quels critères vous basez-vous pour la recevabilité d’un dossier ?
Nous observons les ressources des débiteurs (salaires, allocations logements et familiales, pensions alimentaires) et les charges courantes qui leur incombent (loyer, habillement, alimentation, assurances, eau, électricité, chauffage…). Tout ceci constitue la capacité de remboursement.
Que se passe-t-il alors ?
Si le dossier est accepté, un plan de remboursement est mis en place ou l’affaire peut être traitée de façon amiable. Cette dernière a diminué (18% en 2014 contre 29% en 2013) depuis la loi de janvier 2014 car, dès lors qu’il existe une incapacité de règlement des dettes sur 8 ans, une solution amiable n’est plus préconisée ; une mesure est directement imposée pour que les créanciers abandonnent une partie de leur dû. L’objectif est de traiter plus rapidement les dossiers et de se diriger vers des solutions pérennes.
Quel est le parcours type menant au surendettement ?
En réalité, ce n’est pas tant le nombre de crédits qui explique la plongée dans le surendettement, mais plutôt une conjonction d’éléments qui engendre une baisse des ressources, à savoir la perte d’emploi, une maladie grave et le divorce ou le décès. Alors, le budget d’un ménage se retrouve déstabilisé et les ressources ne sont plus disponibles pour rembourser les crédits.
« Nous préconisons le développement du micro crédit »
Les personnes en situation de surendettement ont-elles un profil particulier ?
Il s’agit plutôt de personnes vivant seules (71% en Haute-Garonne), entre 35 et 54 ans (53,4%), locataires (79,3%), leur revenu est inférieur à 2000€ par mois (79,4%). Quant aux ressources, ils ne disposent pas de capacité de remboursement dans 53,6% des cas ou une capacité inférieure à 450€ dans 28,6% des cas. Le plus fréquemment, il s’agit de dettes liées à la consommation (84,5% des dossiers), et aux charges courantes (82,7%).
Au regard de ces chiffres, comment les débiteurs ont-ils accédé à des prêts sachant qu’ils n’avaient pas les capacités de remboursement ?
C’est souvent, parce que, dans le cas de crédits renouvelables, les débiteurs vont consulter un banquier, autre que le leur, qui n’aura pas une vision globale de la situation. De plus, ils n’utilisent généralement pas ce type de crédits de façon adaptée car il est contracté sur une période longue ou pour un besoin permanent, ce qui vient aggraver leurs difficultés.
Peut-on alors reprocher aux organismes prêteurs de ne pas faire assez de recoupements ?
Avec la loi Lagarde et celle de janvier 2014, les obligations en termes de délai avant l’octroi des concours, et d’informations aux clients quant au remboursement de leur emprunt, ont augmenté. Quant au registre national des crédits aux particuliers, dit « fichier positif », il n’a pas été reconnu comme déterminant, même disproportionné.
Comment limiter ce surendettement ?
Nous organisons des formations de prévention auprès des associations et des assistantes sociales qui sont en contact avec les débiteurs avant qu’ils ne déposent un dossier et qui peuvent effectuer un suivi quand un plan de remboursement a été mis en place. De même, nous préconisons d’informer sur le surendettement, lors des moments importants d’une vie comme la perte d’un emploi ou d’un divorce. Pôle emploi ou le Tribunal des affaires familiales devraient alors sensibiliser les gens sur le fait que leur rythme de vie va changer. Pour finir, nous préconisons le développement du micro crédit pour les besoins limités car celui-ci est accompagné d’un suivi budgétaire.
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