Pillée de ses ressources depuis l’ère industrielle, la nature est de nouveau au centre des préoccupations. Plus que de la préserver, il s’agit aujourd’hui de s’inspirer d’elle, à travers le biomimétisme, pour tenter de faire face au plus grand défi de notre civilisation : l’urgence climatique.
Les vertus de l aile du papillon morpho inspire une demi douzaine de processus de fabrication moins energivores – © PXHEREEt si ce n’était pas l’Homme qui sauvait la planète, mais l’inverse ? Consistant à imiter les capacités illimitées de la nature pour trouver des solutions à nos problèmes techniques, le biomimétisme est de plus en plus considéré comme une réponse à l’urgence climatique. Le vivant et ses 3,8 milliards d’années d’évolution s’avèrent en effet être une source d’inspiration inépuisable pour recréer une civilisation plus résiliente, économe et moins dépendante en ressources non renouvelables. À l’image d’un groupe de recherche du CNRS lancé récemment sur le sujet, le mouvement ne cesse de prendre de l’ampleur en France. « Il y a plusieurs raisons à cela : les connaissances scientifiques avancent, la technologie permet d’observer ce que l’on ne pouvait pas voir auparavant et enfin, les entreprises ont désormais un intérêt économique à réduire leur impact environnemental », explique Alain Renaudin, organisateur du Biomim’expo, salon fondé en 2016.
À Toulouse par exemple, l’Institut de mécanique des fluides de Toulouse (IMFT) et le Laboratoire plasma et conversion d’énergie (Laplace) travaillent depuis plusieurs années sur les ailes d’avions du futur, inspirées de celles des grands rapaces. « Nous avons étudié leurs mouvements de cambrure ainsi que les vibrations créées par les différents types de plumes à leur extrémité. Et avons démontré que ces actions combinées permettaient simultanément une augmentation de la portance de l’aile, une réduction de la résistance au vent ainsi que du bruit aérodynamique », explique la chercheuse Marianna Braza, coordinatrice du projet qui pourrait contribuer à faire baisser la consommation de carburant des avions.
Preuve de l’ampleur prise par le mouvement en France, le Centre européen de l’excellence en biomimétisme (Ceebios) a vu le jour à Senlis, dans l’Oise pour favoriser l’émergence d’expériences similaires. La course à l’innovation est bel et bien lancée. Et ce dans tous les champs d’application possible : agriculture, énergie, information, santé, transports… Les architectes étudient la croissance des arbres pour construire des bâtiments plus durables, les urbanistes observent les fourmis pour résoudre les problèmes de trafic, les biologistes scrutent la capacité des plantes à absorber certains produits toxiques pour dépolluer les sols et les eaux… Même dans le domaine économique, il existe dans la nature des systèmes et des interactions qu’il serait bon de prendre en exemple.
Et si le biomimétisme « n’est pas vertueux en soi », comme le rappelle Alain Renaudin, Janine Benyus, considérée comme la théoricienne de la discipline estime que celle-ci ouvre « une nouvelle ère qui ne repose pas sur ce que nous voulons prendre à la nature, mais sur ce que nous pouvons en apprendre ».
Commentaires