Après avoir connu la dure loi du marché, l’explosion d’AZF et le green-washing, Cédric Cabanes a engagé son entreprise Agronutrition sur la voix d’une agriculture durable et responsable.
© Franck AlixCédric Cabanes, le président d’Agronutrition, une société spécialisée dans la nutrition des plantes et l’optimisation des productions agricoles, n’a pas toujours eu la fibre écolo. Quand il commence à s’intéresser à la nature, c’est à travers la chimie et l’arithmétique du rendement. Diplômé de l’École nationale supérieure agronomique de Toulouse en 1984, il débute sa carrière professionnelle dans l’industrie semencière et phytosanitaire. Créer une start-up, redresser une société…
Il multiplie les expériences, dont certaines d’entre elles tiennent lieu d’électrochocs. « J’ai été contraint de licencier des gens qui n’avaient pas commis de faute. Cela m’a permis de prendre conscience de l’importance des valeurs dans l’entreprise », reconnaît-il. Après cet épisode douloureux, il se lance dans un nouveau défi. Filialiser et privatiser l’un des départements de la Société commerciale des potasses d’Alsace (SCPA). C’est le début de l’aventure Agronutrition.
Assez rapidement, la filiale a triplé son effectif. « Un collaborateur nous avait présenté l’intérêt commercial du développement durable. Quand nous sortions un produit, nous nous réunissions pour déterminer ce qu’il avait de durable. C’était du green-washing », confesse-t-il. Mais, le 21 septembre 2001, la catastrophe d’AZF bouleverse tout. « Nos locaux étaient à proximité de la zone de l’explosion et nous avons compté plusieurs blessés graves. Le samedi suivant, nous étions en train de trier les décombres quand le président du groupe m’a annoncé l’arrêt de l’activité. Nous étions sidérés. » Un double choc salutaire. Avec les collaborateurs présents, il fait le pari de relancer puis de racheter l’entreprise.
« Après AZF, plus aucun politique n’acceptait d’activité industrielle agrochimique sur son territoire. Cela nous a obligés à prendre un virage environnemental sincère. Le choix qu’ils nous ont imposé s’est avéré payant », se félicite Cédric Cabanes, qui est convaincu que l’économie est le moteur de la transformation écologique. Le dirigeant se lance alors dans un tour de France des laboratoires à la recherche « des solutions que la nature à elle-même mis au point ». Champignons ou bactéries, 40 personnes étudient désormais, au sein de son entreprise, les capacités de certains micro-organismes à fertiliser ou à protéger les cultures.
« Cette sensibilité à l’écologie, c’est mon travail qui me l’a apportée », reconnaît-il. « Dans le cadre de nos recherches, j’ai eu la chance de rencontrer des personnalités comme Lucien Séguy, un ingénieur agronome retraité, qui m’ont initié à des méthodes de culture respectueuses de l’environnement. Depuis, j’ai la volonté de les faire connaître du grand public et des politiques », déclare Cédric Cabanes qui, une fois qu’il sera à la retraite, a prévu d’intégrer une fondation pour promouvoir ces pratiques responsables.
« Cette sensibilité à l’écologie, c’est mon travail qui me l’a apportée »
Aujourd’hui, le chef d’entreprise encourage « sans imposer, mais en incitant » ses collaborateurs à adopter un maximum de gestes écologiques. « Les moins de 30 ans sont très sensibles aux valeurs et à l’engagement. Ils les fixent comme une priorité, devant la rémunération, dans leurs critères professionnels. On ne voyait pas cela il y a dix ans », se félicite-t-il.
Commentaires