Anxiété des adultes, détresses psychologiques des adolescents, isolement des personnes âgées… A chaque génération, son stress dû à la crise sanitaire et aux différents confinements. Mais qu’en est-il des jeunes enfants ? Généralement incapables d’exprimer leur mal-être, ils ont pourtant été mis à rude épreuve durant ces derniers mois. Comment leur expliquer la situation ? Comment les rassurer ? Quelles attitudes adopter face à eux ?
De plus en plus, les conséquences psychologiques des confinements successifs et de la crise sanitaire dans son ensemble, font leur apparition. Stress, angoisses, dépressions… Autant de traces que la Covid-19 aura laissé sur les Français. Certains d’entre eux y étant plus exposés que d’autres. Au sortir du premier confinement, il a beaucoup été question de la santé mentale des personnes âgées, de celle des ménages, ou de celle des adolescents. Aujourd’hui, les professionnels alertent sur celle des jeunes enfants.
Perte de sommeil, d’appétit, troubles obsessionnels compulsifs de propreté, isolement volontaire, agitation extrême, ou même régression et ralentissement du développement, sont les premiers signes d’un mal-être chez l’enfant. Si ces derniers sont apparus concomitamment ou juste après le confinement, il existe une forte probabilité pour qu’il en soit responsable. Car même s’ils ne sont pas capables de saisir les enjeux de la situation, ils ne sont pas pour autant imperméables… Bien au contraire.
« Il convient de s’inquiéter et d’envisager un traitement si ces symptômes durent. Qu’ils impactent la vie courante et le développement de l’enfant », explique Catherine Salinier, pédiatre et responsable de l’Association française de pédiatrie ambulatoire (AFPA). Autrement dit, s’il demande à un parent de rester auprès de lui pour s’endormir, il n’y a pas lieu de s’alarmer. En revanche, s’il ne veut plus aller à l’école, s’il ne veut plus voir ses copains ou même sortir de la maison, qu’il est en rupture avec “sa vie d’avant”, il peut s’avérer judicieux de l’emmener voir un pédopsychologue.
Ce professionnel rappellera en premier lieu que les principales angoisses d’un enfant proviennent inévitablement de celles de ses parents. Comme on a coutume de le dire que les enfants sont de véritables éponges. S’il en était besoin, la crise sanitaire le prouve au quotidien. « Ils sont le reflet des émotions des adultes référents », acquiesce Catherine Salinier, « il est donc primordial que les parents gèrent leur stress et leurs angoisses ».
De même, il est important de ne rien cacher aux enfants. Si l’un des parents a perdu son emploi, conséquence de la crise économique, si les parents viennent à se séparer ou si la situation sanitaire les effraie, il est nécessaire de le dire. Parler des difficultés, tout en gardant, toujours, une note d’espoir, de positivisme. « Il ne faut pas enfermer les enfants dans le catastrophisme. Par exemple, il faut dire que papa n’a plus de travail, mais il faut aussi préciser que des gens s’occupent du problème et que tout cela sera bientôt terminé », argumente la pédiatre.
« Les enfants ont absolument besoin d’être rassurés, de savoir que, malgré la situation très inhabituelle qu’ils constatent, leurs parents restent solides et relativisent les difficultés. Qu’elles ne sont pas insolubles », explique Catherine Salinier. Alors, même si l’enfant est effrayé, ce ne sera que par des peurs qu’il pourra maîtriser.
« Il ne faut pas leur mentir ! » assène la responsable de l’AFPA, avant de rajouter : « Et il faut leur expliquer ! Il y a un méchant virus qui rend les gens malades. Pour ne pas l’attraper et ne pas le donner aux autres, il faut bien se laver les mains, mettre un masque et ne pas trop sortir. Car, tant que les gens qui nous protègent n’ont pas trouvé d’armes pour le repousser, il faut se cacher du virus en restant à la maison. Voilà pourquoi on ne va plus chez les copains, ni chez papi et mamie. Et si tout le monde fait bien comme il faut, le virus partira dans quelques mois. » C’est, en substance, le message à délivrer aux plus jeunes, selon Catherine Salinier.
Il faut donc tout dire, avec des mots adaptés à chaque âge, en gardant systématiquement une perspective sécurisante. Et s’assurer que l’enfant a bien compris. « Sinon, il imaginera bien pire que n’est la réalité », prévient la pédiatre. D’autant qu’il y sera forcément confronté à l’école, avec les copains ou avec les enseignants qui sont dans l’obligation d’aborder la situation. De même, il entend des bribes de conversations d’adultes glanées ci et là, ou de brefs passages de journaux télévisés. « S’il n’a pas eu d’explications claires, tous ces stimuli extérieurs pourront être mal interprétés et devenir extrêmement anxiogènes », note-t-elle. « Les parents qui pensent que ne rien dire à leurs enfants revient à les préserver ont tort », estime Catherine Salinier. Et quitte à en parler, à mettre des mots sur la période trouble que nous vivons tous, autant le nommer : « Le méchant virus s’appelle Covid. » Cela évitera que l’enfant lui associe toutes les maladies, même les plus bénignes.
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