Tout ce qui est exotique en Occitanie n’est pas forcément alimentaire. À Montréal-du-Gers, trois agriculteurs se sont lancés dans la production du premier coton français, à partir duquel ils fabriquent des polos.
De l’époque de l’esclavage dans les plantations du Sud des États-Unis aux étendues actuelles de Chine ou d’Inde, aussi gourmandes en pesticides qu’en eau, la culture du coton n’est pas d’ordinaire considérée comme un modèle de vertu. Autant d’imaginaires que trois Gersois ont entrepris de détricoter. « Il s’agit certes d’une plante qui a besoin de chaleur et d’humidité. Mais il y a tout ce qu’il faut ici, grâce notamment à la pluviométrie. Ce qui nous permet de nous passer d’irrigation, seulement nécessaire en abondance dans les pays arides », avance ainsi Yohan de Wit, à l’origine de ce défi audacieux : la production du premier coton français.
L’aventure a démarré il y a trois ans. Issus de familles d’agriculteurs, les associés souhaitaient donner un nouveau souffle à leurs exploitations. Leur idée : s’inspirer du vin pour trouver une culture dont ils maîtriseraient l’ensemble de la chaîne, de la plante à la vente du produit fini. Au culot, ils jettent leur dévolu sur le coton. « Nous avons acheté en ligne six graines que nous avons plantées dans un jardin », raconte l’entrepreneur.
Le test s’avérant concluant, ils consacrent quelques hectares de leurs champs à la fibre naturelle et obtiennent en 2017 une première récolte de 100 kilos. « C’était dérisoire, mais il fallait bien en faire quelque chose. Nous avons alors découvert qu’il existait en France toute une industrie de transformation », poursuit Yohan de Wit. Aujourd’hui, le coton est cueilli et égrené à Montréal-du-Gers avant d’être envoyé dans une filature des Vosges. Enfin, il est tricoté, teint et brodé à Troyes pour aboutir aux polos que les agriculteurs commercialisent via le site de leur entreprise Jean Fil, créée il y a un an et demi.
Désormais, la plantation s’étend sur 14 hectares qui ne subissent aucun traitement chimique, quitte à perdre 20 % des récoltes annuelles. Ce qui n’empêche pas la société de trouver son modèle économique. « Nous avons réussi à faire ce que tout le monde pensait impossible. Aujourd’hui, si l’on ne veut pas être dépendant des marchés, il faut maîtriser toute la chaîne et oser dépasser les limites habituelles de l’agriculture », conclut Yohan de Wit.
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