Tolérance, respect, honnêteté, courage. La pratique du sport est réputée pour véhiculer des valeurs morales, fondatrices de notre société. Souvent, les sports collectifs comme le rugby ou encore le football font référence en la matière. Mais une autre discipline, en plein essor, se distingue. Découverte du parkour, dans les coulisses du club Street Jump 31, à Toulouse.
La ville est leur terrain de jeu. Entre capoeira, saltos et roulades ; ils sautent de toit en toit, évitent gracieusement les passants, transforment de simples aménagements citadins en de véritables parcours d’obstacles. Tous pratiquent le même sport : le parkour. «Il s’agit d’une activité physique qui consiste à se déplacer efficacement grâce à ses seules capacités motrices, dans différents types d’environnements : urbains ou naturels », précise Raphaël Peyrusse, cofondateur de Street Jump 31, un club de parkour et de free-running basé à Toulouse. « Le traceur – pratiquant du parkour – développe son corps et son mental par le biais d’une méthode d’entraînement alliant course, passement d’obstacle, sauts, ou encore escalade. »
Outre le côté spectaculaire de la discipline, ses adeptes sont également à la recherche du dépassement de soi. « Les gens viennent se confronter à leurs limites et essaient d’aller au-delà : ce qui semble dangereux en extérieur est désormais possible dans nos salles. »
Un sport vecteur de valeurs, dont les origines remontent aux années 1990. « Le parkour a été inventé par David Belle », raconte Raphaël Peyrusse. « Puis il a été développé par un groupe de neuf jeunes Français nommé ‘’Yamakasi’’ ». Massivement médiatisée, à travers nombre de longs métrages, dont le film éponyme, ou encore “Notre Dame de Paris” en 1998, “Taxi 2” et “Les fils du vent”, la discipline est dorénavant pratiquée par des milliers de personnes dans le monde. Une démocratisation qui a permis de mettre en avant ce côté « toujours plus impressionnant et attractif » du sport, mais également une force qui se puise dans le mental. « Il s’agit avant tout d’un combat contre soi-même. Il n’y a en principe pas de compétition entre les individus ni de concurrence, mais plutôt une entraide, car cela nécessite un certain travail de préparation, mentale et physique. Ainsi, face au danger, les traceurs se soutiennent mutuellement avant chaque saut », confirme Raphaël Peyrusse.
« Être fort pour être utile. » Sur la devise de David Belle, le club Street Jump 31 a fondé ses valeurs. « Tout comme les arts martiaux, le parkour est un sport qui, au-delà de l’aspect purement physique, revêt certaines valeurs philosophiques », détaille Raphaël Peyrusse. Pour lui, le parkour représente une « forme d’expression corporelle efficace dans l’épanouissement personnel du pratiquant qui se reconnecte à son corps et aux nombreuses possibilités que celui-ci offre. »
Au travail, à l’école ou encore dans le cercle très intime de la famille, chacun est confronté à des barrières. La pratique de ce sport aux sensations fortes permet de « transposer les franchissements d’obstacles matériels à ceux que l’on est emmené à rencontrer dans la vie de tous les jours ». En sautant, grimpant, courant, une « reconnexion avec le réel » s’effectue. « Le gain de confiance en soi qui en résulte permet de réaliser notre relation au danger est issu de craintes que l’on nous a transmises depuis le plus jeune âge », témoigne Raphaël Peyrusse. « Au fond, il s’agit d’avoir conscience de ses peurs, de les canaliser pour s’en servir. »
Au-delà de ce « dépassement de soi » inhérent à la pratique du Parkour, cette discipline en plein essor dans l’Hexagone fait également appel à une certaine rigueur. En se fixant des objectifs à dépasser, les traceurs apprennent qu’il y a toujours « une voie pour soi » et que pour la suivre, il suffit « de s’en donner les moyens », raconte le cofondateur. Une des raisons pour laquelle quelques élèves déscolarisés poussent la porte du 27, chemin du Moulin de Naudin. « La pratique de ce sport les amène à mieux se concentrer », explique Raphaël Peyrusse. « S’ils ne sont pas attentifs, ils se blessent. » Et au-delà de ce cadre qu’offre le parkour, la discipline permet à ces jeunes de se « retrouver avec d’autres personnes de leur âge ». Autour d’une même passion, « ils décrochent de leur train de vie quotidien ».
Une passion d’ailleurs que l’on retrouve chez le jeune Sawad Ben Bahou. Âgé d’à peine 5 ans, il est hyperactif et peine à contrôler son énergie. « Il saute partout », témoigne sa mère. Ses parents l’ont inscrit à Street Jump 31 pour tenter de le canaliser. Il aurait maintenant « la carrure d’un champion ». Et au-delà du niveau sportif acquis, elle observe également la consolidation de « valeurs morales ». « Il développe une très bonne estime de lui, une confiance qu’il n’avait pas », explique-t-elle. « Nous le soutenons de toutes nos forces, car cette discipline l’aide à s’épanouir. »
Salomé Dubart
En attendant, des initiatives visant à faire du sport un vecteur d’insertion sociale fleurissent dans toute la France. Et ce auprès de publics très variés. Qu’il s’agisse de football en marchant pour que les personnes âgées puissent garder un lien social, de karaté pour que les femmes victimes de violence se réapproprient leur corps, ou d’athlétisme pour aider les autistes à maîtriser leurs angoisses. Un petit échantillon des nombreux projets que le JT met en exergue dans ce dossier du mois d’octobre.
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