TEG : ce n’est pas fini ! La justice européenne est saisie par une “question préjudicielle”
En février 2013, le Tribunal de grande instance de Nanterre avait annulé la clause d’intérêt variable des prêts “structurés” (autrement dit “toxiques”) au motif que DEXIA n’avait pas mentionné le Taux effectif global (TEG) dans les courriers concrétisant l’accord des collectivités sur les modifications du prêt. Très vite, il est apparu un risque systémique pour cet établissement – et au-delà pour toute la profession bancaire. Ce risque bancaire et juridique est devenu un risque pour les finances publiques. En effet, si les collectivités locales concernées se coalisaient, DEXIA aurait dû constater environ 17 milliards d’euros de pertes et comme la République française s’est portée garante à 100 % des pertes de DEXIA, au final, c’est le budget de l’Etat qui aurait été mis à contribution (Cf. Tribune dans Les Echos : Monsieur Valls, comment économiser au moins 17 milliards d’euros)
Piège tendu aux collectivités
Pour faire face à cette situation, le gouvernement a mis en place un double mécanisme :
– D’une part, la création d’un fonds d’intervention en faveur des collectivités,
– D’autre part, une validation rétroactive des contrats viciés par la loi n° 2014-844 du 29 juillet 2014 relative à la sécurisation des contrats de prêts structurés souscrits par les personnes morales de droit public.
Pour bénéficier de l’intervention du fonds, les collectivités doivent renoncer à tous les contentieux en cours sans connaître l’étendu de la prise en charge de cette intervention qui est plafonnée… à 45 % des pénalités réclamées par DEXIA.
Quand on sait que ces pénalités peuvent représenter 120 % du capital restant dû et que le fond ne sera doté que d’1 Milliard d’euro, on comprend le piège tendu aux collectivités : renoncer immédiatement et définitivement à tout recours, en échange d’une maigre prise en charge du caractère toxique des prêts…
Pour convaincre les collectivités d’accepter la prise en charge parcellaire par le fonds, la loi de validation vient les priver d’un argument puissant contre DEXIA puisqu’à présent, elles ne peuvent plus obtenir la moindre sanction des violations de la loi sur le TEG. La loi rétroactive du 29 juillet 2014 a été validée par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2014-695 DC du 24 juillet 2014. Pour autant, l’application de cette loi injuste peut être écartée en application des principes du droit européen.
L’Etat de droit s’impose à tous, y compris aux marchés financiers
Ainsi, dans un arrêt récent, la CJUE a écarté l’application du droit français car il était contraire à l’article 23 de la Directive 2008/48 qui est à l’origine de la législation française du TEG. En effet, l’article 23 de la directive 2008/48, intitulé “Sanctions”, dispose : «Les États membres définissent le régime de sanctions applicables en cas de violation des dispositions nationales adoptées conformément à la présente directive, et prennent toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte qu’elles soient appliquées. Les sanctions doivent être effectives, proportionnées et dissuasives.» […] Pour la CJUE, tout texte qui ne prévoit pas de sanctions «effectives, proportionnées et dissuasives» déroge aux objectifs du droit européen qui est de responsabiliser les banques et de les sanctionner réellement quand elles ne respectent pas les règles propres à protéger les emprunteurs.
Comme la loi de validation supprime purement et simplement les sanctions pour défaut de mention du TEG dans le contrat constatant l’accord de volonté, la commune de Saint-Gaudens (Haute-Garonne) demande au Tribunal de grande instance de Nanterre de poser une question préjudicielle à la CJUE afin qu’elle dise si la loi du 29 juillet 2014 respecte ou non les objectifs communautaires définis par la Directive 2008/48.
Bref, la messe n’est pas dite et le droit peut encore permettre de résister aux diktats des marchés financiers. Car il faut le souligner, les véritables bénéficiaires de cette manne financière ne sont ni DEXIA ni le Gouvernement mais s’appellent GOLDMAN SACHS, JPMORGAN, UBS… à travers leurs “hedge funds” et autres trusts situés, comme par hasard, dans des paradis fiscaux. La question politique peut alors se résumer ainsi : les collectivités locales doivent elles renoncer à leur capacité d’investissement pour l’avenir afin d’assouvir l’avidité de certaines banques et de leurs traders ?
Christophe Lèguevaques
Commentaires
gdfontaines le 14/03/2025 à 15:18
Avec le "viol des dépôts " désormais légalisé par la fumeuse UE (http://www.europarl.europa.eu/news/fr/news-room/content/20131212IPR30702/html/Accord-conclu-sur-la-directive-renflouement-interne-des-banques) nous voyons de mieux en mieux à qui nous avons à faire, non ? Alors, vite mettons ce système fou en faillite organisée avant qui ne nous perde pour se sauver !
Patrick AUBIN le 14/03/2025 à 18:11
La réponse à la question finale se pose autrement : le système politique et le système financier d'aujourd'hui sont de connivence. Les règles bancaires à commencer par Bâle I ont été rédigées par les politiques. Le système monétaire est lui-même réglé sur des bases politiques. Tout est donc fait pour servir les intérêts des différents système, et surement pas celui des citoyens. S'il y a une chose à repenser, c'est bien que ce n'est pas à un quelconque système de décider, mais bien à chaque individu.
Seule une Société libre de toute emprise politique, monétaire et/ou financière peut remédier aux excès de ces systèmes.
C'est à un citoyen de décider de contracter avec le système politique de son choix : tant que nous maintiendrons un système politique fondé sur le conflit en donnant le pouvoir à une oligarchie, alors le peuple sera spolié. la démocratie majoritaire est dépassée : elle conduit systématiquement à la ruine. Ce n'est pas parce qu'une majorité conduit par les urnes des idiots au pouvoir que l'ensemble d'un peuple s'en sort.
C'est au citoyen de décider avec quelle monnaie il souhaite commercer. En conséquence, un système monétaire ne doit pas être imposé, mais libre... en commençant par la suppression des banques centrales. C'est par la concurrence de monnaies que les "bonnes" monnaies sortiront, celles qui seront utiles au citoyen, pas celles qui perdent leur valeur au plus grand profit des hommes politiques et au plus grand malheur des peuples.