« Le dessin d’abord ! », telle est la devise de Pelagus. Dans son atelier de Jegun, ce Gersois d’adoption fabrique des couteaux d’une beauté que ne renierait aucun orfèvre. Et dont on peut se servir sans problème pour couper son steak…
Pelagus : un joli nom qui signifie “Mer ouverte” en grec. Bien plus original que Charles Schmidt, s’est dit ce dernier alors qu’il étudiait les Beaux- Arts à Düsseldorf. L’idée de fabriquer des couteaux est encore bien loin. Son pseudonyme apparaît tout d’abord sur des tableaux d’inspiration surréaliste puis sur des dessins à la plume qu’il rassemble dans des albums. Le coup de foudre s’abat alors qu’il feuillette une monographie. Au détour d’une page, un couteau catalan revisité le fascine par son élégance. Hélas, ou plutôt tant mieux, ses moyens ne lui permettent pas de l’acheter. Il le fabriquera donc. Le premier modèle est de son propre aveu un peu « rudimentaire », mais ses amis ne tardent pas à réclamer leur exemplaire : « C’était plutôt bon signe ! » Le nouveau coutelier en fabrique environ quatrevingts avant d’abandonner ce style trop anguleux à son goût. Une rencontre avec le graveur Jean Santos, dans le Gard, se révèlera déterminante. « J’ai immédiatement compris que la gravure m’ouvrait un champ extraordinaire. Elle m’apportait ce que je recherchais depuis toujours et satisfaisait mon goût du dessin. » Dans son atelier baptisé Au Potiron, près de Jegun, Pelagus assouvit désormais sa passion au burin pneumatique, l’oeil rivé sur un microscope.
À son actif, plus de 330 couteaux, sans compter quelques boucles de ceinture. Des émeraudes aux rubis en passant par les grenats, son goût pour les pierres incrustées et bien sûr pour la gravure définissent une griffe reconnaissable entre toutes. Manches en os de girafe, de chameau, de buffle, de mammouth sibérien ou encore de titane, lames parées d’un cabochon de turquoise ou de corail, gravures en forme de fleurs, de poissons, de dragons chinois, de guerriers mayas… Une hésitation saisit bientôt le spectateur : couteaux ou bijoux ? « Couteaux ! » tranche Pelagus, qui refuse de voir ses créations s’étioler derrière une vitrine. « Pour les respecter, il faut les utiliser vraiment, couper son steak ou son saucisson avec. Ils sont plus solides qu’un Opinel. » Il refuse même de considérer la machette visible sur son site www.couteaux-pelagus.com comme une pièce de musée : « Je l’ai conçue pour faire du jardinage — dans un joli jardin, bien entendu ! » Mais comme les artistes ont tous les droits, dont celui de se contredire, Pelagus a souhaité rendre hommage à Dali en fabriquant aussi quelques couteaux mous, « garantis à vie et totalement inutilisables »…
« Pour respecter mes couteaux, il faut les utiliser vraiment, couper son steak ou son saucissson avec »
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