Voici un jean qui ne manque pas de piquant. Cet automne sort, en série limitée, le tout premier modèle confectionné en orties. Il est signé Velcorex – Matières Françaises, un regroupement de plusieurs entreprises alsaciennes sauvées de la faillite par l’alliance du savoir faire et de l’innovation.
«Le luxe doit être responsable, il en a les moyens ! Les marques doivent utiliser des fibres naturelles, recyclables et qui ont le plus faible impact possible sur l’environnement. » Comme une entrée en matière, Pierre Schmitt, à la tête des entreprises alsaciennes Velcorex, Philea, Lang et Tissage des Chaumes, livre le fond de sa pensée. « Nous sommes dans cette démarche, car c’est dans l’ADN de l’Alsace et les clients y sont sensibles. » Ce qu’il ne dit pas, c’est qu’avec sa façon de voir les choses, il a sauvé les quatre enseignes. En s’appuyant sur le savoir-faire local, patiné d’innovation, il a relancé la production de tissu haut de gamme, sous le sigle Velcorex – Matières Françaises.
Ainsi, ces sociétés se sont tournées vers des alternatives. Dont l’ortie. Et plus particulièrement une variété népalaise qui pousse à 3000 mètres d’altitude dans l’Himalaya et atteint 3 mètres de hauteur. Une fois les fibres acheminées en France, un réseau de partenaires se charge de leur transformation. « Nous prenons le relais pour tisser », dit Pierre Schmitt. Car ses machines « sont déjà adaptées aux matières naturelles » « Il y a toujours eu du lin ici et un peu de chanvre. » Mais transposer ces techniques à l’ortie n’est pas chose aisée pour autant : « Nous faisons des essais, nous expérimentons. Nous sommes confiants, nous arriverons un jour à un traitement industriel », poursuit le dirigeant. Le circuit de valorisation commence chez Lang avec le tissage et se finit chez Velcorex avec l’ennoblissement : le nettoyage, le blanchissage… Puis l’équipe de Philea supervise la confection, délocalisée au Maroc. De sorte qu’en septembre 2018, sort le premier jean 100 % conçu en orties. Une série très limitée d’une cinquantaine de pièces pour hommes et autant pour femmes, vendue dans la boutique du groupe à Colmar et plus tard en ligne.
Parmi les nombreuses qualités de l’ortie : une grande résistance, une brillance et un aspect soyeux. Côté environnemental, elle est bien moins gourmande en eau que le coton, fût-il bio. Et au contraire du coton, dont la culture représente 3 % des terres cultivables et 25 % de l’utilisation de pesticides , selon Pierre Schmitt, l’ortie, elle, enrichit les sols.
Ainsi cette plante qui n’a pas bonne presse est réimplantée en Alsace. L’expérimentation se précise, année après année, avec l’espoir de défibrer l’ortie sur place.
Photo 1 : DR
Photo 2 : Matières Françaises