Si la guerre en Ukraine occupe la majorité de l’actualité nationale, le sujet a également été prégnant lors des propos liminaires du conseil de Toulouse métropole qui avait lieu ce jeudi 24 mars. Les élus ont évoqué les conséquences locales du conflit et demander un suivi exceptionnel des orientations budgétaires pouvant donner lieu à des réajustements. De même, a été abordé la délicate question de la démission du chef d’orchestre Tugan Sokhiev.
La guerre en Ukraine est sur toutes les lèvres, y compris celles des élus de Toulouse métropole. En effet, en introduction du conseil métropolitain qui avait lieu ce jeudi 24 mars à Blagnac, tous les groupes politiques se sont félicités des différentes actions de solidarité menées en direction du peuple ukrainien mises en place dans l’agglomération : orientation des dons financiers, recensement des propositions d’hébergement pour les réfugiés, participation à l’accueil d’urgence, ouverture d’un centre de dons… La dernière étant, le vote à unanimité, lors de cette séance, d’une subvention de 188 100 euros au titre de l’urgence aux associations et organismes impliqués dans des actions de solidarité internationale et humanitaire en faveur de l’Ukraine. “Preuve qu’un autre Moudenc est possible”, lance, taquin, François Piquemal, conseiller métropolitain du groupe Alternative pour une Métropole Citoyenne, faisant référence à l’expulsion de réfugiés syriens en février 2016.
Cette délibération pourrait ainsi marquer le début d’une coordination de la solidarité par Toulouse métropole, comme le maire de Blagnac et vice-président de la Métropole chargé de la prospective, Joseph Carles, l’appelle de ses vœux: “Cette générosité doit être canalisée pour plus d’efficacité. Mission qui pourrait être confiée à l’intercommunalité.” Une centralisation des actions que Pierre Lacaze, du groupe Toulouse Métropole Solidaire de la Gauche Démocrate et Républicaine confierait plutôt au Conseil départemental de Haute-Garonne, dont la solidarité reste la compétence.
Au-delà des conséquences pour l’Ukraine et sa population, ce conflit qui se déroule aux portes de l’Europe, aura forcément un impact dans la métropole toulousaine, comme partout en France. A commencer par des répercussions économiques, comme le rappelle Karine Traval-Michelet, maire PS de Colomiers et présidente du groupe Métropole solidaire écologique et démocratique: “Les prix de l’énergie augmentent, de même que ceux des matières premières, et l’on observe une reprise de l’inflation, avant peut-être une hausse généralisée des taux d’intérêt“. Si cela ne menace pas encore le budget primitif de la collectivité, l’élue appelle à la vigilance.
“Un séminaire budgétaire pour évaluer collectivement les effets de ces tensions sur la trajectoire financière de la Métropole“
Karine Traval-Michelet
D’autant que, dans un même temps, Emmanuel Macron, s’il était réélu, supprimerait la cotisation sur la valeur ajoutée (CVAE) et demanderait aux collectivités territoriales, un effort de 10 milliards d’euros pour redresser les finances publiques. Des bouleversements budgétaires qu’il convient d’anticiper. Ainsi, la conseillère municipale propose “la mise en place d’un séminaire budgétaire, dans quelques mois, pour évaluer collectivement les effets de ces tensions sur la trajectoire financière de la Métropole“.
Une initiative qu’approuve le groupe des Indépendants, par la voix de Joseph Carles, qui précise toutefois que les projets structurant de la collectivité ne doivent pas être abandonnés au nom de la conjoncture actuelle : “Le contexte est incertain, mais il ne doit pas nous paralyser. Nous devons revisiter les orientations budgétaires sans pour autant remettre en cause notre vision de notre territoire.”
Dommage collatéral, parmi tant d’autres, la démission du chef d’orchestre du Capitole Tugan Sokhiev. Pour nombres d’élus de gauche, dont Karine Traval-Michelet et Pierre Lacaze, il est regrettable que le musicien russe ait dû s’exprimer sur le conflit qui oppose son pays à l’Ukraine. L’illustration d’un risque de stigmatisation de la population russe pour Thomas Karmann, du groupe Métropole Écologiste, Solidaire et Citoyenne: “Les actes de Vladimir Poutine ne sont pas ceux des ressortissants de son pays.” Une affirmation que tient à nuancer Sacha Briand, grand argentier de la collectivité. “Ceux qui pensent que cette guerre est le fait d’un seul, ou de trois hommes, se trompent lourdement. Chacun devra être mis devant ses responsabilités“, lance-t-il. Responsabilités qui ont été prises par certains artistes russes qui ont pris position. “Tugan Sokhiev ne l’a pas fait!” constate l’élu de la majorité.
Et Jean-Luc Moudenc de rajouter: “Je ne lui ai pas demandé de prendre position, mais simplement de s’exprimer sur le sujet. Il n’y a pas eu d’injonction de ma part.” Une exigence que le président de Toulouse métropole justifie par le risque de débordements le 18 mars 2022. A cette date, le chef d’orchestre devait diriger ses musiciens toulousains, à la Halle aux grains, pour jouer notamment la Symphonie n° 7 “Leningrad” de Dmitri Chostakovitch. “Je craignais que les 2 000 manifestants qui défilent tous les dimanches pour dire leur soutien à l’Ukraine ne créent des incidents lors de ce concert”, précise Jean-Luc Moudenc.
“L’expression culturelle véhicule des messages politiques assurément“
Jean-Luc Moudenc
Pour l’opposition, cette “sommation” du maire de Toulouse reste “dommageable”, la culture ne devant pas être prise en otage de la politique. Un argument que refuse d’entendre Jean-Luc Moudenc, pour qui “l’expression culturelle véhicule des messages politiques assurément“. C’est pourquoi il lui fallait clarifier la situation de Tugan Sokhiev, qu’il avait lui-même nommé en 2015 à la tête de l’Orchestre national du Capitole. Désormais, il s’agit de trouver un successeur. Cela ne devrait plus tarder puisque “cela fait déjà deux ans que nous avons commencé les recherches”, avoue le maire de Toulouse, rappelant que le contrat du chef russe prenait fin, de toute façon, en juin prochain.
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