Du Moyen Âge à nos jours, de nombreuses histoires sombres et cruelles ont marqué le Gers. Un infanticide présumé, une attaque de bandits, en passant par une empoisonneuse notoire à l’arsenic et une tuerie à Monfort… Voici quatre affaires sur lesquelles revient Le Journal Toulousain, en collaboration avec Patrick Caujolle, l’auteur de l’ouvrage “Les grandes affaires criminelles d’Occitanie” paru aux éditions du Papillon Rouge.
Le 16 janvier 1789, à Beaumont, en Gascogne, une tragédie secoue la tranquillité de la famille bourgeoise Quinsac. Claire G., une jeune domestique, accouche secrètement d’un enfant dans la maison où elle travaille. Seulement, lorsque la famille est alertée, Victoire Quinsac, la fille de son employeur, ne peut que constater le décès du nouveau-né. Que s’est-il passé dans cette chambre ?
Les points de vue divergent sur les circonstances de l’accouchement. Claire aurait fait un déni de grossesse, phénomène totalement inconnu à l’époque. Lorsque le moment a été venu de mettre son enfant au monde, elle est restée debout, ignorante, à côté du lit, seule et a laissé faire la nature ne sachant pas comment s’y prendre. L’enfant est tombé sur le carrelage de la chambre, chute qui lui a brisé les os de la tête. Plus tard, des experts médicaux confirmeront la possibilité d’une mort accidentelle à la naissance. Mais les quelques témoins qui ont été interrogés lors du procès affirment eux, qu’elle aurait sciemment caché sa grossesse. Ne désirant pas garder l’enfant, elle se serait débrouillée pour se retrouver seule au moment de l’accouchement et aurait tué son bébé. Ou du moins, elle aurait fait en sorte qu’il ne puisse pas recevoir les soins nécessaires.
Finalement, Claire G. est arrêtée pour infanticide et recel de grossesse, mais elle parvient à s’évader de l’hôpital où elle était détenue. Les circonstances de sa fuite restent floues, alimentant les spéculations sur l’implication de sa famille et des Quinsac dans cette évasion. L’affaire est finalement étouffée, la disparition de Claire permettant d’éviter un scandale plus important pour les familles impliquées. Des siècles plus tard, ce qu’il est advenu de Claire reste encore inconnu.
Parmi les histoires cruelles et sombres dans le Gers, l’une d’entre elles mêle terreur et violence. L’affaire Dauzat remonte au 12 janvier 1798, une période d’anarchie et d’insécurité dans le département. Des bandes de criminels, composées de déserteurs, de repris de justice, de royalistes dépossédés et d’émigrés clandestins, sévissent dans la région, attaquant des voyageurs pour voler leurs biens.
Le député des Hautes-Pyrénées, Basile Dauzat, n’y a pas échappé. Accompagné de sa famille, il est victime d’une attaque alors qu’ils voyagent à bord de leur calèche vers Paris. Leur voiture est encerclée par des hommes armés qui tirent sur eux. Sa fille Euphrosine, âgée de 15 ans, est touchée. Après maintes supplications, Dauzat parvient à convaincre les assaillants de les épargner après avoir remis une coquette somme d’argent. La famille est finalement secourue et la fille gravement blessée est soignée.
L’affaire est portée devant les tribunaux, et cinq hommes, dont le cocher complice de l’attaque, sont jugés. Deux d’entre eux sont condamnés aux travaux forcés à perpétuité, tandis que les autres sont relaxés, faute de preuves. Cette affaire marque l’un des derniers et des plus notables actes criminels commis par des bandits de grands chemins dans la région du Gers.
L’histoire de Françoise Trenque, une couturière du Gers, rappelle étrangement celle de la célèbre empoisonneuse du XVIIe siècle, la Marquise de Brinvilliers. Elle remonte au 20 juin 1828, lorsque tous les membres de sa famille tombent tour à tour malades. Un midi, la jeune femme de 24 ans prépare un repas pour son père, sa mère, ses frères François et Joseph, respectivement âgés de 19 et 17 ans et un ouvrier.
Après le déjeuner, trois des hommes présents prennent la route vers Arrouède, où ils construisent une grange sur un terrain familial. Seulement, ils sont pris d’importants maux de ventre, de vomissements et d’une soif incontrôlable. Les autres personnes présentes au repas du midi ont également déclaré les mêmes symptômes, mais Françoise reste étrangement indemne.
Après plusieurs mois d’interruption du chantier, et des symptômes, ces derniers ressurgissent lorsque les travaux de construction reprennent en octobre 1828. Finalement, quatre membres de la famille Trenque décèdent dans d’atroces souffrances, cinq mois plus tard.
Des éléments troublants, tels qu’un paquet de poudre blanche et une fiole suspecte découverts dans la maison de la couturière, attirent l’attention des autorités. Elle est alors accusée d’avoir empoisonné sa famille avec de l’arsenic et d’autres substances toxiques, et est arrêtée avec une voisine complice. Malgré ses tentatives de nier les faits qui lui sont reprochés, des preuves médicales et des témoignages accablants la condamnent.
Après son procès, Françoise Trenque est reconnue coupable et condamnée à mort. Elle accepte son sort avec résignation et monte sur l’échafaud en septembre 1829, reconnaissant sa culpabilité et exprimant des remords pour ses crimes.
Des histoires cruelles et sombres ont marqué le Gers à travers les siècles, et l’une d’entre elles est bien plus récente qu’on ne le pense. Le 20 mai 1999, la presse s’est emparée d’un fait divers particulièrement macabre. Ce jour-là, dans le calme de la commune de Monfort, les corps de quatre Hollandais, Artie et Marianne Van Hulst ainsi que celui de leur belle-sœur Dorothea et beau-frère Johan Nieuwenhuis, sont retrouvés sans vie dans leur maison de campagne.
Les faits sont cruels : Artie Van Hulst a été abattu par des coups de fusil, tandis que sa femme Marianne et ses proches ont été poignardés et égorgés, alors qu’ils rentraient d’une soirée au restaurant. Les enquêteurs se sont alors tournés vers le peintre d’intérieur, Kamel Ben Salah, identifié comme le principal suspect dans cette affaire. Rapidement, l’enquête a révélé un mobile matériel : les cartes bancaires des victimes avaient été utilisées avant et après le drame, avec 42 tentatives de retraits, dont une quinzaine réussies, totalisant un butin d’environ 10 000 francs de l’époque (environ 2 000 euros). Le meurtrier aurait ainsi extorqué les codes des cartes à ses employeurs.
Kamel Ben Salah, un homme de 35 ans, travaillait occasionnellement comme peintre chez les Van Hulst. Il serait le dernier à les avoir vus vivants, mais il a toujours clamé son innocence malgré les preuves qui s’accumulaient contre lui. Son ADN et une petite tache de son sang ont notamment été retrouvés sur du ruban adhésif utilisé pour ligoter les victimes, ce qui constituait un élément accablant. Malgré son plaidoyer, Ben Salah a été reconnu coupable lors de deux procès successifs, en 2002 et 2003, et condamné à la réclusion à perpétuité, dont 22 ans de sûreté.
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