Épinglé par la Chambre régionale des comptes, le département de la Haute-Garonne s’est vu contraint de dissoudre la Société publique locale Haute-Garonne Développement. Un organisme chargé du développement et de la structuration économiques du territoire dont la juridiction administrative a estimé qu’elle s’apparentait à une externalisation trop coûteuse et injustifiée de missions pourtant réalisables en interne.
La recommandation de la Chambre régionale de comptes (CRC) Occitanie, publiée dans son rapport du 3 février 2022, est sans équivoque. Le département de la Haute-Garonne doit « mener à son terme le processus de dissolution de la société publique locale (SPL) Haute-Garonne Développement », une structure de droit privé, mais fonctionnant avec des capitaux publics créée en 2018 par le département pour exercer des missions de développement et de structuration économique du territoire. Une directive radicale, mise en œuvre en décembre dernier par le conseil départemental, qui est motivée par une série de constats confondants.
La valeur ajoutée de la société par rapport aux autres structures existantes (…) reste à démontrer
En effet, dans son rapport, la juridiction administrative et financière locale a considéré, sans nier la réalité du travail effectué, que cette SPL s’apparentait à une externalisation non justifiée et trop coûteuse de missions réalisables en interne par des services de la collectivité. La CRC conclut notamment que l’activité de la SPL Haute-Garonne est restée « relativement limitée, bien en deçà des missions prévues dans les conventions, et [que] la valeur ajoutée de la société par rapport aux autres structures existantes (…) reste à démontrer ». Ainsi, pour la CRC, trois ans après sa création, cette SPL « n’a pas trouvé sa place dans le paysage départemental ». De quoi siffler la fin d’une décision politique qui interroge quant à la gestion de l’argent public.
Créée en janvier 2018 dans le cadre de la réforme de l’organisation territoriale (loi NOTRe), la SPL Haute-Garonne Développement avait initialement pour mission de « contribuer à un développement territorial équilibré au travers d’actions d’ingénierie territoriale, de promotion et d’animation économique, de création, de requalification et de commercialisation de zones d’activité ». Des objectifs finalement réduits au champ de la solidarité territoriale en milieu rural afin de correspondre aux compétences du département.
La société a un coût de fonctionnement élevé au regard de ses activités
Toutefois, la CRC constate que dès la première année d’existence de cette structure, celle-ci s’est retrouvée dans une situation de doublon avec des services internes. « Son activité est ainsi devenue très proche de celle de l’agence technique départementale, Haute-Garonne Ingénierie, dont le volet études et ingénierie a été développé à compter de septembre 2019. (…) De plus, les prestations assurées par la SPL n’ont pas fait l’objet d’une tarification, les contributions financières des actionnaires s’apparentant plus à une subvention qu’à la contrepartie des missions effectuées pour chacun des membres », observe la CRC. Au point que celle-ci juge que le mode d’intervention de la SPL « se rapproche plus de celui d’un service interne que d’une société prestataire ».
Par ailleurs, la Cour régionale des comptes relève de nombreuses anomalies dans la gestion de la SPL. « La société a un coût de fonctionnement élevé au regard de ses activités. Le niveau des rémunérations accordées à plusieurs salariés est très supérieur aux moyennes nationales et régionales et les charges locatives semblent importantes au regard des besoins », avance l’organisme chargé du contrôle de la régularité des comptes publics. En effet pour trois salariés, le salaire net perçu en équivalent temps plein est de 1,5 à 2 fois plus élevé que la moyenne nationale. Un niveau de rémunération « globalement élevé, au regard de la structure », du « niveau de responsabilité » et de l’âge des salariés.
Enfin, la Chambre régionale des comptes s’inquiète de « l’absence de dispositifs de prévention de conflits d’intérêts » et d’une relative opacité dans les procédures de recrutement. Ces derniers n’ayant « pas tous fait l’objet d’une publicité ». « Même si elle ne constitue pas une obligation s’agissant d’une structure privée, la publicité des postes à pourvoir permet d’accroître la performance des recrutements en augmentant le vivier des candidats potentiels », regrette l’organisme de contrôle. La CRC note également que, en plus de rémunérations surévaluées, la SPL n’a pas pu présenter de fiches de postes précises et complètes pour l’ensemble des salariés. Avant de souligner un cadre de travail « particulièrement souple » sans outils de suivi hebdomadaire ou mensuel de l’activité.
https://twitter.com/crcoccitanie/status/1489152009655701506
Autant de points litigieux qui ont poussé le département de la Haute-Garonne à se plier à la recommandation de la Chambre régionale des comptes et à dissoudre purement et simplement la SPL Haute-Garonne Développement. Une décision actée le 31 décembre dernier lors d’un conseil départemental. À cette occasion, les élus ont voté la « dissolution de la SPM et la reprise en régie directe » de son activité par la collectivité, ainsi que le transfert de trois des agents au sein des services du département.
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