Le premier conseil municipal de cette année 2022, qui a eu lieu ce mardi 8 février, était une séance extraordinaire, tant par la forme que par le fond. Au-delà des débats houleux qui ont animé la majorité et l’opposition, une seule délibération était à l’ordre du jour, celle de l’avis de la Mairie de Toulouse sur le dossier d’autorisation environnementale.
Étape importante dans le projet de la troisième ligne de métro de Toulouse, l’autorisation environnementale. Pour l’obtenir, la Mairie doit déposer un dossier en préfecture, voté préalablement en conseil municipal. C’est ce qu’ont fait les élus, lors de la séance de ce mardi 8 février. Après de vifs débats entre la majorité et l’opposition. Cette dernière dénonçant « les chiffres faux et erronés » de l’étude d’impact incluse.
Pour faire avancer son projet de troisième ligne de métro, la majorité a donc présenté son dossier d’autorisation environnementale. Dans ce document, il est fait état de la gestion de la ressource en eau et du risque d’inondation durant le chantier et l’exploitation de la troisième ligne de métro. Mais aussi des dérogations à l’interdiction de destruction d’espèces protégées, des travaux le long du canal du Midi (site classé). Et surtout, l’évaluation de l’impact environnemental du projet. Cette dernière a particulièrement occupée les débats municipaux du jour. L’opposition ayant relevé « des incohérences, des approximations et un manque d’anticipation », comme le souligne Hélène Cabanes, membre du groupe Toulouse Ecologiste, Solidaire et Citoyenne (TESC).
À commencer par la sous-estimation des émissions de gaz à effet de serre. L’opposition s’appuie sur une étude du collectif Les Faiseurs de ville, utilisée pour les nouvelles lignes de métro du Grand Paris Express, qui relève des omissions dans la méthodologie de l’étude d’impact réalisée par la Mairie de Toulouse. « Des postes émetteurs de gaz à effet de serre n’ont pas été pris en compte », note Odile Maurin, du groupe Alternative Municipaliste Citoyenne (AMC), qui demande « une contre-enquête indépendante pour clarifier la situation ».
“L’étude d’impact de la troisième ligne de métro surestime le report modal à Toulouse”
Aucune raison pour la majorité qui se targue, de son côté, d’une méthodologie indépendante, « contrairement à celle des Faiseurs de ville, dont deux membres sont d’anciens membres d’Archipel Citoyen », lance Maxime Boyer, adjoint au maire. Pour lui, les chiffres ne sont pas trompeurs, ils sont évolutifs.
« En 2018, lors du dépôt du dossier, nous n’avions pas tous les éléments dont nous disposons aujourd’hui. Nous estimons maintenant que le report modal sur la 3e ligne de métro permettra d’éviter 90 000 déplacements routiers par jour », poursuit-il. Une donnée actualisée qui permet à l’élu d’extrapoler une baisse des gaz à effet de serre qu’il évalue à 46 300 tonnes équivalent CO², en 2030.
Un chiffre qui est également contesté par l’opposition le jugeant trop élevé : « D’abord parce qu’il ne prend pas en considération le renouvellement du parc automobile naturel et, ensuite, parce qu’il surestime le report modal », précise Hélène Cabanes.
Autre point d’achoppement : la gestion des déblais. « Comment vont-ils être évacués ? Vont-ils aller contaminer d’autres communes ? Les méthodes d’extraction sont-elles polluantes ? » s’interroge l’opposition qui craint notamment une pollution des nappes phréatiques à proximité. « On parle quand même de 40 000 tonnes par mois », précise Vincent Gibert, élu socialiste, qui prévient les Toulousains des nuisances qu’ils vont subir. Au total, « 2,6 millions de m³ de déblais vont être extraits des tunnels », confirme Maxime Boyer. « Et 80 % seront revalorisés », assure-t-il.
Pour le garantir, la revalorisation des déblais comptera pour 30 % de la note finale de l’appel d’offres lors du choix des tunneliers. « Ils pourront servir à fabriquer des briques, à remblayer des carrières ou sur le réaménagement de l’autoroute Toulouse-Castres », précise-t-on dans la majorité. Un comble pour l’opposition : « Valoriser les déblais d’un projet de métro en les utilisant dans celui d’une autoroute… Nous n’avons vraiment pas le même sens de l’écologie ! »
Quant au transport de ces déblais, analysés avant leur départ, il aura lieu en majorité par la route. Mais la Mairie étudie la possibilité d’un acheminement par voie fluviale ou ferroviaire.
De même, la majorité prévoit la plantation d’arbres pour compenser ceux qui devront être abattus pendant les travaux de la 3e ligne de métro. « Vous avez prévu de remplacer un arbre arraché par deux nouveaux », précise Hélène Cabanes, pour qui le calcul n’est pas efficient. En effet, du côté écologiste, on ne se satisfait pas de jeunes pousses pour remplacer des spécimens imposants.
Une nuance qualitative que la majorité dit avoir prise en compte. « Au départ, nous avions prévu l’abattage de 2 080 arbres. Aujourd’hui, nous ne parlons plus que de 1 900. À terme, ce sera moins puisque nous tentons d’en sauver 15 % », explique Maxime Boyer. Ce dernier rassure également sa collègue de l’opposition quant au choix des nouveaux arbres : « Tous ne seront pas jeunes et de petite taille ! »
Mais, pour Maxime Le Texier du groupe AMC, « tous ces chiffres ne parlent pas aux Toulousains. Un seul à retenir : le nombre de voitures en moins sur les routes grâce à la 3e ligne de métro, c’est 3 % selon l’Agence de surveillance de la qualité de l’air, Atmo Occitanie. » Pour l’opposition, ce rapport investissements-bénéfices environnemental est loin d’être satisfaisant. D’autant que les élus de la minorité ne croient pas un instant à l’arrivée de cette nouvelle ligne en 2028.
“Vous ne pensez pas cela possible, car vous n’en auriez pas été capables. Mais nous irons jusqu’au bout !”
Pour Sacha Briand, une simple preuve d’impuissance : « Vous ne pensez pas cela possible, car vous n’en auriez pas été capables. Mais, nous, nous irons jusqu’au bout ! » lance-t-il pour clôturer le débat.
Finalement, la délibération a été adoptée malgré le vote ‘’contre’’ de toute l’opposition. Une manière d’affirmer que « non, nous ne nous opposerons pas au projet, mais celui-ci ne doit pas voir le jour à n’importe quel prix ! »
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