Les élus de la métropole de Lille ont voté une demande de couvre-feu pour interdire les vols de nuit dans leur aéroport. Qu’en est-il à Toulouse, où les débats sur le sujet sont vifs et opposent l’aéroport de Blagnac, les compagnies aériennes, la préfecture et les riverains ?
Les 180 élus de la métropole de Lille ont voté une demande de couvre-feu à l’aéroport de Lille-Lesquin lors du dernier conseil communautaire. En effet, le 28 février 2025, le groupe majoritaire Métropole Passions Communes déposait un vœu de soutien à la mise en place d’une interdiction stricte de vols de 23h à 6h, adopté à l’unanimité. Certes, il ne s’agit-là que d’une position politique, la compétence en la matière revenant à la préfecture, mais « ce vœu est un signal fort que nous adressons aux pouvoirs publics et prouvent que les élus métropolitains sont aux côtés des riverains et des communes concernés », justifie François-Xavier Cadart, maire de Seclin et conseiller métropolitain qui a présenté le vœu.
Ce dont semblent envieux les riverains de l’aéroport Toulouse-Blagnac (ATB). En effet, le Collectif contre les nuisances aériennes de l’agglomération toulousaine (Ccnaat) « appelle les élus de notre métropole à se mobiliser, comme à Lille, pour que Toulouse “capitale de l’aéronautique” ne devienne pas synonyme de territoire déclassé pour l’environnement et la santé des habitants ». Une requête devancée par les conseillers communautaires : « Sur cette question, nous sommes constants », rétorque François Chollet, vice-président de la collectivité, en charge du volet économique du Plan climat-air-énergie territorial (PCAET). « Nous avons toujours été contre les vols commerciaux la nuit », poursuit-il, rappelant que cette position avait été actée, bien avant celle de Lille, dans une délibération.
En effet, le 7 décembre 2023, lors d’un conseil métropolitain, les élus de Toulouse Métropole ont voté, à l’unanimité (114 voies pour), un vœu commun aux groupes des Indépendants, celui de Métropole d’Avenir et de Métropole Solidaire Écologique et Démocratique : celui-ci entérinait le pacte aéroportuaire de Toulouse-Blagnac. Concrètement, il s’agissait de « réduire drastiquement les vols commerciaux en cœur de nuit » et de demander « à la société de l’Aéroport Toulouse-Blagnac d’arriver à la suppression totale des vols dits “programmés” en cœur de nuit, d’ici la fin du mandat ». C’était d’ailleurs une promesse de campagne de Jean-Luc Moudenc en 2020.
Seulement, les faits n’avaient pas suivi les préconisations. « Pour le mois de juillet 2023, les chiffres que nous avons collectés sont édifiants, car ils affichent plus de 745 vols commerciaux entre 22h et 6h, soit un dépassement de 10% du précédent record de 2018 », détaillait le CCNAAT. Mieux, l’aéroport Toulouse-Blagnac se targue d’une baisse de ces vols de nuit, reconnaissant ainsi leur nombre : « En 2024, le volume des vols commerciaux passagers (587) a diminué de 31 % entre minuit et 6h », précise-t-il. Dans un communiqué sur ses perspectives 2025, ATB promet même : « En 2025, les efforts seront poursuivis avec, à date, aucun vol commercial passagers programmé entre minuit et 6h, aucun vol départ passagers après 23h et aucun vol arrivée passagers après 23h30. »
Des engagements qui laissent les associations de riverains de l’aéroport Toulouse-Blagnac dubitatives : « D’abord parce que la nuit, au sens de la santé publique dure huit heures ; elle s’étend de 22h à 6h du matin », rappelle le collectif contre les nuisances aériennes. Ensuite, parce que la société gestionnaire de l’aéroport de Toulouse-Blagnac ne prend pas là en compte les retards, appelés dans le jargon aéroportuaire “les vols basculants”. « Nous y serons particulièrement attentifs », lance François Chollet, faisant référence à la proposition du préfet de Haute-Garonne pour réduire les nuisances nocturnes.
En effet, le 27 septembre 2024, ce dernier avait présenté un scénario aux différents acteurs concernés, à savoir l’aéroport, les compagnies, les riverains, le tissu économique et les élus, pour endiguer les nuisances aériennes. Après une étude d’impact, le préfet a proposé au gouvernement d’interdire, d’ici fin 2025, les décollages de minuit à 6h et une tolérance de 400 atterrissages par an sur ce même créneau permettant aux vols en retard d’arriver. Si ATB a fait savoir son mécontentement, et que le CCNAAT qualifie ces annonces de « très limitées et consensuelles », la majorité municipale de Toulouse estime qu’il s’agit « d’une approche équilibrée ». Selon François Chollet, « c’est un bon compromis entre le couvre-feu et des mesures peu contraignantes ! Nous y sommes favorables ».
Pour l’heure, les discussions sont toujours en cours au gouvernement, qui doit valider la proposition du préfet de Haute-Garonne par arrêté interministériel. Car si le ministère de la Transition écologique semble l’approuver, celui des Transports prêterait une oreille plus attentive aux arguments d’ATB, des compagnies et d’Airbus, qui considèrent le scénario trop restrictif.
Commentaires