Comme partout en France, les structures de la petite enfance souffrent d’un manque de personnel dans la Ville rose. Alors, la Mairie de Toulouse déploie plusieurs actions permettant de garantir le nombre de places en crèches. Des solutions qui ne sont pas toutes du goût de l’opposition qui dénonce une politique de rentabilité, « pour faire de l’argent sur le dos des petits Toulousains ».
Mis à jour le 23/10/2023 à 11h15
5 400 enfants sont accueillis dans les 58 structures petite enfance gérées ou financées par la Mairie de Toulouse. Mais le secteur subit une pénurie de personnel qui contraint la collectivité à déployer plusieurs actions pour garantir le nombre de places disponibles, notamment en crèches.
La première aura été le transfert cette année de la gestion des crèches, jusque-là assurée par le centre communal d’action sociale (CCAS), vers la Ville. Ceci pour une meilleure visibilité, des inscriptions simplifiées pour les familles, une gestion unifiée et une amélioration des conditions de travail du personnel de crèches. Ainsi, tous les employés arborent désormais le même statut et ont bénéficié d’une revalorisation de salaire en 2023. Tous ont également accès aux différentes améliorations des conditions de travail mises en place par la Mairie. Parmi ces dernières, les actions du comité SQVT (santé et qualité de vie au travail), mais aussi un projet de sensibilisation au bruit mené avec la médecine préventive, des possibilités d’aménagements de postes effectués et suivis par un ergonome… « Une fusion qui satisfait tout le monde », lance Laurence Katzenmayer, adjointe au maire de Toulouse, en charge des crèches lors d’une conférence de presse municipale dédiée à la petite enfance.
Là, Jean-Luc Moudenc y a également annoncé une seconde vague d’actions visant cette fois à faciliter le recrutement. Pour cela, la collectivité mise sur le développement de l’apprentissage notamment sur le métier d’auxiliaire de puériculture avec pour objectif en 2026 d’arriver à accueillir un apprenti dans chaque structure collective. L’accueil de stagiaires éducateurs de jeunes enfants durant la préparation du diplôme sera également favorisé et la mise en place d’un plan d’accompagnement et de formation pour les nouveaux arrivants complètera les actions municipales. Une politique qui aura permis de maintenir les 2 000 places en crèches existantes dans la Ville de Toulouse, selon la Mairie.
Mais, ce qui pour la majorité municipale résulte d’une politique volontariste en matière de petite enfance, reste pour l’opposition opaque et dicté par une recherche de rentabilité, à la manière des structures privées. Antoine Maurice, élu du groupe Toulouse Ecologiste Solidaire et Citoyenne (Tesc), rappelle aux bons souvenirs de Jean-Luc Moudenc, dans une lettre ouverte, « la parution des deux livres “Le prix du berceau” et “Babyzness” mettant en lumière l’utilisation frauduleuse du surbooking via le multi-accueil, au détriment de la qualité de l’accompagnement des enfants ». En effet, celui-ci affirme que deux enfants peuvent être sur une même place en crèche. « La mise en œuvre de telles pratiques de gestion importées de certains acteurs privés est intolérable lorsqu’il s’agit d’un service public », fustige-t-il. De son côté, l’adjointe à la petite enfance précise : « Les deux livres mentionnés sont des enquêtes nationales, principalement sur le secteur des crèches du secteur privé lucratif. Comme Monsieur Maurice omet de le préciser, ces deux ouvrages ne mettent absolument pas en cause les crèches associatives ou municipales toulousaines. C’est un lien opportuniste qui est fait ici. Par ailleurs, les crèches municipales toulousaines suivent les règles nationales en matière de gestion des places, règles établies par la Caisse d’allocations familiales. »
En effet, si la Mairie se félicite d’avoir pu maintenir 2 000 places en crèche, elle fait état de l’accueil de 5 400 enfants, soit plus de deux fois plus. Mais Laurence Katzenmayer se justifie, dans une interview à France Bleu. Il ne s’agit pas d’attribuer une même place à deux enfants différents, mais de répartir un temps plein de garde entre plusieurs enfants : « Une famille qui amène son enfant trois jours, on va proposer à une famille qui cherche pour deux jours. On s’adapte aux besoins. » D’ailleurs, la Ville prévoit l’ouverture de 800 nouvelles places d’ici 2026.
Au-delà de l’accueil des enfants, Antoine Maurice dénonce également le transfert de la gestion des crèches du CCAS vers la Mairie de Toulouse. Une manipulation administrative « qui représente 15 millions d’euros d’activité ». Somme à laquelle « 2,5 millions de surcoût » ont été ajouté selon un courrier de Laurence Katzenmayer à l’élu d’opposition qui demandait des comptes. Elle y précise également « un chiffre d’affaires de 4 millions d’euros » et « des recettes estimées à 1,5 million », relate Antoine Maurice, qui fait état d’un courrier dans lequel la Municipalité « ne connaitrait pas les coûts de revient de l’opération, qu’elle serait en train d’affiner ». « La vérité, c’est que vous ne savez pas ce qu’il y a dans votre caisse », lance-t-il à l’attention de Jean-Luc Moudenc. Une accusation fallacieuse pour l’adjointe au maire en charge de la petite enfance : « Nous avons indiqué lors de trois courriers de réponse à Antoine Maurice la méthode qui avait été mise en place pour ce transfert, ainsi que les conditions financières de celui-ci, soit la neutralité budgétaire pour le CCAS. Le transfert a été effectué avec tout le sérieux dû et avec les études financières nécessaires en amont, dans l’intérêt du CCAS et de la Mairie de Toulouse. »
Alors, l’opposition demande l’ouverture d’un audit externe des crèches privées et publiques de Toulouse par un organisme indépendant. « Il doit porter sur la qualité de prise en charge, le taux d’encadrement, l’utilisation des couches et de l’ensemble des consommables sur la période du 1er janvier au 30 juin, c’est-à-dire le premier semestre concerné par ce transfert », précise Antoine Maurice. La Mairie n’y donnera pas suite, estimant que la Protection maternelle et infantile (PMI) veille déjà au grain.
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