La clinique vétérinaire Urgent-ys a annoncé l’ouverture de la première banque de sang animale à Toulouse en fin d’année dernière. Ce service permet à votre chien ou chat de donner son sang pour sauver ses congénères. Le procédé pose cependant quelques soucis éthiques…
Votre chat ou chien peut désormais donner son sang à la clinique vétérinaire Urgent-ys de Purpan ou Montaudran. Même si le don de sang est assez répandu en France aujourd’hui – plus d’un million et demi de Français donnent leur sang chaque année – les banques de sang pour animaux sont peu répandues dans l’Hexagone. Marseille a ouvert la première en 2013, puis les écoles vétérinaires de Maisons-Alfort et Nantes en 2020, le centre hospitalier vétérinaire Languedocia à Montpellier en 2021, la clinique vétérinaire Alliance à Bordeaux en 2022 ont suivi le mouvement. Enfin, en fin d’année 2024, la clinique vétérinaire Urgent-ys est venue s’ajouter à cette courte liste.
Yannick Videau, l’un des deux vétérinaires en charge du projet, avait évoqué l’idée il y a quelques années, mais le manque de moyens humains n’avait pas permis la mise en place du dispositif. Désormais opérationnel, le service reçoit près d’un donneur par semaine, et « le rythme devrait accélérer maintenant ». D’autant que, les vétérinaires de l’agglomération toulousaine font régulièrement appel à la banque de sang constitué par la clinique vétérinaire Urgent-ys. « Auparavant, les cliniques utilisaient des donneurs d’urgence et ne pratiquaient les transfusions qu’en dernier recours. Depuis qu’une offre existe, depuis que les vétérinaires peuvent avoir accès facilement à des poches de globules rouges et de plasma, les soins aux animaux sont meilleurs. » Le don de sang d’un chien peut en sauver cinq, et celui d’un chat peut en sauver trois.
Cette banque de sang n’est disponible que pour les chats et les chiens et le praticien pense que cela ne va pas changer de si tôt, « les autres espèces présentant plus de risques, que ce soit au niveau biologique ou de l’opération en elle-même. »
La clinique propose un formulaire en ligne afin d’inscrire votre animal. Tout comme les humains, il devra respecter plusieurs critères pour être donneur : il doit être âgé de un à huit ans, afficher le poids minimum requis (20 kilos pour les chiens, 4 kilos pour les chats), ne jamais avoir reçu de transfusion et être à jour de ses vaccinations et antiparasites. Des « bonnes pratiques » selon Yannick Videau qui permettent d’assurer la santé du donneur et du receveur.
Des conditions que remplit Mocca, un chien de chasse de un an, venu pour donner son sang, sa maîtresse ayant découvert le projet sur Facebook. Ancienne assistante vétérinaire et donneuse de sang elle-même, celle-ci a été particulièrement sensible à cette nouvelle opportunité.
Mocca a pris près de deux heures de son temps pour venir donner son sang. Dès son arrivée, la vétérinaire a effectué un dépistage et testé la qualité de son sang. Ensuite, le praticien lui a injecté une dose de tranquillisant, plus ou moins forte selon le tempérament de l’animal, afin de l’immobiliser et ainsi de limiter les hématomes. Il l’a ensuite tondu au niveau du cou, et a procédé au prélèvement. Celui-ci n’excède pas une vingtaine de minutes pour les chiens. Pour les chats, l’opération dure moins longtemps. Après l’intervention, Mocca s’est reposé, il a été nourri et, est reparti dans l’heure qui a suivi, avec la promesse d’une transfusion gratuite s’il en avait un jour besoin.
Alors, le vétérinaire a séparé les globules rouges et le plasma dans des poches différentes grâce à une centrifugeuse, avant de les stocker. Les globules rouges pourront être conservés en moyenne pendant un mois et demi. Quant au plasma, il pourra être laissé au frais pendant presque un an.
Plusieurs associations animalières soulèvent cependant une interrogation : « Au contraire des opérations médicales classiques réalisées pour le bien de l’animal, il s’agit ici de l’utiliser pour le bien d’un autre. Il va ainsi subir une opération potentiellement stressante, sous sédation, sans en retirer aucun intérêt personnel. C’est donc une question d’éthique », précise Marie Bouillaud Juanchich, avocate de l’association Les 4 pattounes. Elle demande ainsi « une étude pour évaluer l’intérêt du service. Il faudrait connaître le nombre d’animaux perdus par manque de sang pour que celle-ci soit pertinente ».
Hormis cette considération, l’avocate estime qu’aucune association œuvrant pour la défense des animaux ne s’opposera à un tel projet de banque de sang : « Elles restent généralement neutres tant que les animaux sont bien traités. » D’autant qu’il s’agit ici de « l’intérêt du plus grand nombre », comme le rappelle le vétérinaire de la clinique Urgent-ys.
Romain Deniaud
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