Des chercheurs du Toulouse biotechnology institute travaillent actuellement sur la fabrication de toilettes qui permettent de séparer les selles de l’urine, un excellent fertilisant, afin de l’utiliser comme engrais dans l’agriculture.
Des toilettes qui permettent de séparer les selles de l’urine pour utiliser cette dernière comme engrais dans l’agriculture ? Des chercheurs de l’équipe Symbiose du Toulouse biotechnology institute, qui regroupe des membres du Centre national de recherche scientifique (CNRS), de l’Insa et de Inrae, travaillent activement sur le projet depuis plus de trois ans.
Concrètement, les premiers prototypes produits par le laboratoire ressemblent à des toilettes classiques. Une première évacuation, située à l’arrière de la cuvette, se charge de la récupération des selles. Une seconde, placée juste en dessous de la lunette, filtre les déjections pour ne laisser passer que l’urine.
Et lorsque vous tirez la chasse, l’aspiration se fait “sous-vide”, « pour utiliser un minimum d’eau », ajoute Étienne Paul, chercheur en biochimie à l’Insa. Seule contrainte : il faut que les hommes, comme les femmes, fassent leurs besoins assis, pour respecter la séparation imaginée par les scientifiques.
Avec ce système de séparation des déjections à la source, l’objectif, à terme, est de récupérer l’urine afin de la traiter dans des usines spécialisées, pour retirer l’ensemble des polluants présents dans notre organisme (médicaments, etc). Puis, de la distribuer à des agriculteurs pour qu’elle soit utilisée dans leurs champs. Car en effet, l’urine est un excellent fertilisant. Elle possède une grande quantité d’azote, de potassium et de phosphore. Trois éléments essentiels à la pousse des cultures végétales.
« Les agriculteurs utilisent l’urine pour enrichir leurs cultures depuis des millénaires. Cette pratique est simplement tombée dans l’oubli avec l’arrivée des engrais chimiques, considérés comme bien plus performants », souligne Étienne Paul. Celui-ci défend l’intérêt de revenir à ce procédé ancestral. « Nous pourrions limiter l’impact environnemental de la production agricole en produisant moins d’engrais chimiques et en facilitant le traitement des eaux dans les stations dépuration. Ce serait le schéma idéal », assure le chercheur.
Cette solution se heurte toutefois à certaines réticences. « La première est structurelle », explique Étienne Paul. Car la mise en place d’un tel système de récupération d’urine serait très coûteuse pour les collectivités. Elle viendrait complètement bouleverser les réseaux d’évacuation et d’assainissement actuels. La seconde est comportementale. « Parce que faire ses besoins systématiquement assis est difficilement acceptable pour les hommes », regrette-t-il.
Pour l’heure, les premiers prototypes sont en inox. Mais les chercheurs aimeraient trouver des partenaires pour en produire en céramique, comme ce qui se fait actuellement sur le marché. « En céramique, ces toilettes seraient bien plus acceptées par les particuliers. Car nous assimilons les sanitaires en inox à ce qui est proposé dans les trains, les aires d’autoroutes, les boîtes de nuit… Pas dans les foyers », explique Étienne Paul.
Ces toilettes ont déjà été testées à Toulouse, au cirque de Noël et au festival de musique Garorock en 2019. Des questions ont été posées aux spectateurs à la sortie des sanitaires. « Les retours étaient plutôt positifs. La plupart des personnes ont dit qu’elles n’avaient pas remarqué de différence avec des toilettes classiques. Les seules remarques négatives que nous avons eues, venaient d’hommes qui ne souhaitaient pas s’asseoir », explique Étienne Paul.
Ces toilettes sont également utilisées dans les locaux du Toulouse biotechnology institute. Les chercheurs aimeraient prochainement en installer chez des particuliers, pour pouvoir commencer à développer la structuration de la filière avec les agriculteurs.
Commentaires
Mathieu le 22/02/2025 à 19:21
Il faut combiner la solution à des urinoirs pour les hommes, ça règlerait le problème, mais demande un peu plus de m² dans chaque toilette