Le compte à rebours a commencé. Le 8 septembre 2023, le coup d’envoi du premier match de la Coupe du monde de rugby opposant la France aux All Blacks aura lieu au Stade de France. Terre de rugby par excellence, la ville de Toulouse accueillera cinq rencontres de cette compétition. Pour l’occasion, le Journal Toulousain est allé à la rencontre de personnalités locales pour leur poser deux, trois questions sur l’univers de l’ovalie. Ce mois-ci, c’est le chef étoilé Michel Sarran, qui nous raconte son rapport avec le rugby…
Michel Sarran, quel est votre rapport avec le rugby ?
J’ai mis les pieds dans le monde du rugby il y a plusieurs années, à mon arrivée à Toulouse (Michel Sarran est Gersois d’origine, NDLR). J’y ai rencontré Thomas Castaignède et Christian Califano, puis Didier Lacroix. Nous avons sympathisé, je me suis intéressé à leur sport, qui m’a très vite séduit. Aujourd’hui, j’en suis mordu à un point que je suis capable de regarder tous les matchs du Top14 d’un week-end. Et quand le Stade Toulousain joue à domicile, j’essaie d’aller les voir le plus possible. Je me sens bien dans l’univers du rugby, avec lequel je partage nombre de valeurs. Le travail en équipe, l’investissement, la persévérance… Tout cela me parle.
On parle effectivement souvent des valeurs de l’ovalie. Quelle est la plus représentative du rugby selon vous ?
À en choisir une, ce serait l’équipe, valeur qui regroupe les notions de solidarité et d’investissement. On ne gagne pas un match qu’avec des individualités. Le travail d’équipe est fondamental pour avancer. Chaque joueur doit tenir son poste, tout en jouant avec tous ses coéquipiers pour obtenir la victoire. C’est exactement la même chose dans une brigade en cuisine. Chacun a un rôle à remplir, mais tout le monde travaille ensemble pour réaliser un bon service.
Comment définiriez-vous le rugby ?
Pour moi, c’est un sport de combat, rude et complexe ! Il y faut de la rigueur, de la discipline et de l’humilité. C’est un sport relativement complet qui demande d’être physique, puissant, agile, adroit, mais aussi technique et stratégique. D’ailleurs, le rugby n’a cessé d’évoluer pour en arriver là. Les outils ont changé, les préparations physiques se sont intensifiées. Il y a 30 ans, ce sport était plus près du “rugby de clocher”. Il n’y avait pas autant d’analyses techniques et tactiques. Et pas non plus autant de rigueur quant à l’hygiène de vie… C’est devenu un véritable sport professionnel. Concernant le jeu à proprement parler, c’est aussi beaucoup plus fluide et plus agréable à regarder. En revanche, ça reste difficile à comprendre, d’autant que les règles évoluent tous les ans. Il faut maintenant être fin connaisseur pour bien saisir toutes les subtilités règlementaires.
Vous dîtes vous rendre le plus souvent possible au stade Ernest Wallon… Le Stade Toulousain est-il votre club favori ?
Bien sûr ! D’abord parce que c’est le club qui m’a permis de rencontrer l’univers du rugby. Et puis parce que sportivement, le Stade Toulousain fait partie des meilleures équipes de France, d’Europe, et même du monde. Et même dans les moments difficiles, les Rouge et Noir m’émerveillent. Car, outre le jeu pur et simple, où les Toulousains excellent, les hommes qui composent le Stade Toulousain sont extraordinaires. J’ai la chance de connaître de nombreux joueurs, et ils sont très attachants. Ils donnent tout sur un terrain, et en dehors, pour eux, mais aussi pour ceux qui les suivent. C’est l’équipe qui parvient à me donner le plus d’émotions.
Vous souvenez-vous justement du moment rugbystique qui vous a procuré le plus d’émotions ?
Difficile de n’en retenir qu’un ! Mais j’ai notamment le souvenir d’un quart de finale de coupe d’Europe, à Paris, contre le Racing 92, où Zack Holmes est expulsé assez rapidement et les Toulousains se retrouvent à 14 les trois quarts de la rencontre. Mais en restant soudés, les hommes d’Ugo Mola sont parvenus à arracher la victoire. Ce match-là m’a filé la chair de poule !
Un joueur en particulier vous fait-il particulièrement vibrer ?
Antoine Dupont, pour de multiples raisons. Bien sûr pour la qualité et l’intelligence de son jeu, pour sa rigueur et son humilité. Tout le monde est en admiration devant lui, et j’espère d’ailleurs que cela ne le perturbera pas… Mais quel joueur ! Et pour ne rien gâcher, c’est un garçon qui a de grandes qualités humaines, qui est généreux et compatissant. Dans la période difficile que je viens de traverser (Michel Sarran a perdu sa 2e étoile au Guide Michelin, NDLR), il m’a envoyé un message réconfortant et ça m’a beaucoup touché ! Antoine Dupont est bon, dans tous les sens du terme.
Si vous étiez joueur, quel poste occuperiez-vous ?
J’ai joué au rugby deux fois dans ma vie ! Une fois au lycée et une fois lors d’un événement pour mon restaurant. Lors de ce dernier, Didier Lacroix avait organisé un match qui opposait l’équipe de Michel Sarran contre des partenaires du Stade Toulousain. Il m’avait fait jouer talonneur. Et il avait été demandé au talon adverse de me mettre une petite “boîte gentille”… Sauf que je l’ai prise dans l’œil et que j’ai eu un sacré coquard pendant une semaine… (rires) Le joueur en question était venu s’excuser, en me précisant qu’il ne voulait pas taper aussi fort… Cela m’a fait beaucoup rire et reste un très bon souvenir !
Sérieusement, j’aurais pu être talonneur. C’est un poste clé, que j’apprécie. D’ailleurs, nombre d’entre eux deviennent entraîneurs. Ils sont physiques mais aussi très stratégiques.
Une anecdote en lien avec le rugby ?
J’en ai des tonnes ! Je garde notamment en mémoire la première fois où j’ai donné un coup d’envoi et où j’ai failli me casser la figure. Mais je me souviens aussi d’un Top Chef qu’avait organisé Didier Lacroix avec tous les joueurs du Stade Toulousain où j’avais drivé Cheslin Kolbe, Peato Mauvaka… Ou encore à un match opposant Bordeaux-Bègles aux Rouge et Noir, auquel j’ai assisté en compagnie de Philippe Etchebest : Toulouse gagnait avant que Bordeaux ne revienne en fin de rencontre. Si ces derniers passaient la transformation de l’essai qu’ils venaient de marquer, Bordeaux sortait vainqueur. À ce moment-là Philippe était heureux et moi déconfit. Mais le coup de pied n’est pas passé entre les barres et c’est Toulouse qui gagne : en une demi-seconde, les émotions se sont inversées, je sautais partout et Philippe “faisait la gueule” !
En tant que “rugbyphile”, savez-vous pourquoi le ballon de rugby est ovale ?
Je pense que c’est parce que Philippe Dintrans est tombé dessus et l’a un peu écrasé ! (Rires) Il ne m’en voudra pas, je le connais bien ! Mais sérieusement, je n’ai pas d’autres explications…
Et le rugby est-il encore un sport du Sud-Ouest ?
Évidemment ! Il n’y a qu’à observer les équipes du Top 14 et de Pro D2 : la plupart se trouvent en Occitanie : Toulouse, Montpellier, Agen, Castres, Colomiers, Perpignan… Le Stade Toulousain étant la meilleure équipe du monde… (rires)
De quoi alors nourrir les troisièmes mi-temps… Un souvenir mémorable d’après match ?
Ayant maintenant le privilège de connaître pas mal de personnalités dans le monde du rugby, j’ai été amené à participer à plusieurs troisièmes mi-temps… Que ce soit avec le Stade Toulousain ou avec l’Équipe de France. Je me souviens notamment de certaines soirées avec Imanol Harinordoquy et Maxime Médard, dans différents restaurants et bars de Toulouse, où… Non ! Je ne peux pas en raconter davantage ! (rires)
En revanche, je peux vous dire qu’ils sont nombreux à apprécier les troisièmes mi-temps ! Mais l’un d’entre eux m’a particulièrement marqué en la matière : c’est Jo Tekori ! C’est quand même un sacré boute-en-train ! Dans son sillage, Maxime Médard n’était pas mal non plus ! Et dans la nouvelle génération, Peato Mauvaka a pris la relève… Quoi que Alexandre Roumat s’est bien fondu au groupe de ce côté-là ! (rires) Mais toujours de manière raisonnée bien sûr…
Plus sérieusement, qui sont les trois rugbymen qui vous ont le plus marqué ?
D’abord, Thomas Castaignède, qui est le premier que j’ai rencontré et qui correspond à toutes les valeurs qui me sont chères. C’était un visionnaire, dont les blessures l’ont malheureusement empêché d’avoir la carrière qu’il aurait méritée. Je pourrais aussi parler de Christophe Dominici, qui était un joueur incroyable. Pour finir par Jonah Lomu, qui reste le plus impressionnant que j’ai jamais croisé.
Mais j’ai aussi envie de citer Didier Lacroix, qui était un vrai travailleur de l’ombre, qui mettait la tête là où je n’aurais jamais mis les pieds… D’ailleurs, il lui en reste quelques stigmates (rires). Et puis, je me répète, mais Antoine Dupont… Il marquera plus qu’une décennie !
Il s’illustrera sûrement pendant la coupe du monde de rugby… Dans quelles conditions la suivrez-vous ?
Je fais partie du “XV de la gastronomie”, créé par France 2023 pour aider à l’organisation des prestations de traiteur sur les différents sites où auront lieu les matchs. Ce qui me permettra d’assister à toutes les rencontres qui auront lieu à Toulouse. J’essaierai aussi d’avoir des places pour les phases finales, mais rien n’est sûr. Et je suivrai le reste à la télé.
Quel genre de spectateur ou téléspectateur êtes-vous ?
Stressé, engagé, chauvin… chaud bouillant quoi !
Et quel est votre juron favori pour pester contre l’arbitre ?
Enc*** ! (Rires) C’est mon chauvinisme qui parle, mais je suis conscient que le travail d’arbitre est difficile. Ce qu’il faut retenir étant que, de toute façon, l’arbitre a toujours raison ! Simplement, comme la plupart des Français, je suis expert et j’aurais pu être arbitre international bien sûr… (rires) Et en tant que fervent supporter du Stade Toulousain, quiconque verrait une faute que je n’ai pas vue, se trompe forcément… (rires)
Outre la France, quelle équipe, qualifiée pour la Coupe du monde, s’attire vos faveurs ?
L’Irlande, sans hésitation ! Ils jouent fort, bien et intelligemment. Cette équipe a une grande maîtrise des phases techniques, dispose d’une grosse charnière, d’un pack conquérant, d’un engagement sans failles de ses joueurs et de la ferveur d’un peuple qui pousse derrière elle. L’Irlande est une véritable terre de rugby. Ce sera, je pense, l’équipe à battre !
Vous voyez donc l’Irlande sur le podium… Aux côtés de quelles autres nations ?
La France, les Blacks, parce que ça reste toujours les Blacks, et l’Irlande.
Et à la fin, qui gagne ?
Le Stade Toulousain bien sûr ! (rires)
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