L’entreprise Nomadic Players propose des escape games itinérants organisés au plus près des populations d’Occitanie afin de sensibiliser les joueurs à des sujets cruciaux, tels que l’égalité entre les femmes et les hommes, l’addiction aux écrans, les valeurs du sport et de l’handisport ou encore la manipulation de l’information.
Sensibiliser à travers le jeu. Voici l’objectif poursuivi par une jeune entrepreneuse originaire d’Albi : Anaïs Dessain. Elle a créé, il y a trois ans, l’entreprise itinérante Nomadic Players (joueurs nomades), qui propose dans toute l’Occitanie des sessions d’escape game, autrement dit des jeux d’évasion, à destination d’un large public.
L’objectif est de sensibiliser l’ensemble des joueurs à des sujets sociétaux essentiels, tels que le cyberharcèlement, l’égalité entre les femmes et les hommes, les valeurs du sport et de l’handisport, la circulation de fausses informations, l’addiction aux écrans… Au total, Anaïs Dessain a d’ores et déjà organisé une cinquantaine d’interventions auprès de 3 000 joueurs.
Du 1er au 8 décembre prochain, Nomadic Players sera présent dans la salle d’escape game Izon Corp à Albi (Occitanie) pour faire découvrir le scénario “L’Arche”. Les participants doivent ici sauver l’ensemble des connaissances de l’humanité. L’objectif est d’aborder « la multiplicité des formes d’intelligence, qui ne sont pas toutes représentées dans le milieu scolaire, ce qui mène au décrochage », présente Anaïs Dessain.
Pour mettre en place les escape games, ce sont les structures, telles que des maisons des jeunes et de la culture (MJC), des lycées, des mairies, des centres sociaux, des entreprises, des centres d’éducation spécialisée, des collèges ou bien même des établissements pénitentiaires pour mineurs, qui font appel à Anaïs Dessain. « Il existe déjà beaucoup de salles de jeu dans les grandes villes d’Occitanie. Avec Nomadic Players, l’idée est de pouvoir se rendre au plus près des populations, dans les territoires ruraux ou les quartiers défavorisés, afin de faciliter l’accès aux jeux et de briser la barrière géographique », explique la fondatrice de l’entreprise.
Ce sont ces mêmes structures qui financent l’intervention de l’entreprise. Les escape games sont donc gratuits pour les joueurs, alors que dans une salle classique, les tarifs oscillent entre 21 et 33 euros par personne. « Pour une famille de cinq personnes, la facture augmente rapidement. Là aussi, notre objectif est de rendre ce type de jeux accessibles au plus grand nombre », commente Anaïs Dessain.
Les décors des jeux d’évasion, imaginés par Anaïs Dessain, peuvent être installés n’importe où, « il suffit que la pièce soit suffisamment grande et qu’elle soit équipée d’une prise électrique pour pouvoir brancher les caméras, comme dans les salles d’escape game classiques », détaille la directrice de Nomadic Players. L’objectif est de dépayser les joueurs, de les immerger dans l’univers du scénario choisi.
Pendant environ une heure, les participants (4 à 6 joueurs) cherchent des indices et résolvent des énigmes afin de mener à bien leur mission et sortir de la salle. Pour l’escape game “la malédiction de Toutânkhamon” par exemple, qui est « l’un des jeux qui rencontre le plus de succès », selon sa créatrice, les joueurs doivent parvenir à déchiffrer un message laissé par un chercheur qui étudiait la malédiction du pharaon. Pendant l’enquête, les participants sont confrontés à des fake news et en apprennent davantage sur la manipulation de l’information.
Au total, Anaïs Dessain a imaginé une dizaine de scénarios. Par exemple, le jeu “Hypnose” est destiné aux enfants de 8 à 12 ans. Une grande magicienne contrôle les adultes via un signal d’hypnose diffusé sur les écrans. Seuls les enfants sont épargnés. C’est à eux de sauver le monde. Ce scénario a pour objectif de sensibiliser les plus petits à l’utilisation massive des objets connectés.
Il en est de même pour le “projet Monarque”, qui prend la forme d’une expérience scientifique durant laquelle les joueurs ont pour mission de rendre accro aux écrans un cobaye. « À la fin du jeu, ils se rendent compte que c’est un protocole identique à ce qui est pratiqué dans la réalité, pour que nous restions addicts à notre téléphone », explique Anaïs Dessain. Aussi, le jeu “Règle zéro” aborde le cyberharcèlement, en glissant les joueurs dans la peau de harceleurs, en dépit de leur volonté. « Ce scénario rend compte de l’impact que peut avoir le virtuel sur le réel », poursuit l’entrepreneuse.
À la fin de chaque session, l’organisatrice anime un “débrief” d’environ 15 minutes afin de débattre avec les joueurs des thématiques abordées pendant le jeu. « L’objectif n’est pas de choquer, d’être moralisateur ou de donner mon point de vue. Mais simplement de pousser les participants à se questionner sur ces sujets sociétaux. Je leur conseille d’ailleurs des films, des vidéos ou d’autres supports qui peuvent leur permettre de les approfondir », complète Anaïs Dessain.
En plus des scénarios aujourd’hui répertoriés dans le catalogue, la fondatrice de Nomadic Players propose de créer des escape games “sur mesure”. La chambre des métiers et de l’artisanat du Tarn lui a par exemple commandé un jeu de prévention au sujet de l’égalité entre les femmes et les hommes. « La mission des joueurs est d’élaborer un programme de conquête spatiale. Une question est posée : si nous avions la possibilité de redistribuer les rôles dans la société, comment nous nous organiserions ? », expose-t-elle. La plupart de ces nouveaux jeux intègrent ensuite le catalogue.
La jeune entrepreneuse a par ailleurs déjà refusé des demandes. « Une préfecture m’avait proposé d’aborder la sécurité routière auprès de personnes récidivistes ayant des problèmes d’addictions. Mais j’interviens pour faire de la prévention, pas pour soigner des problèmes médicaux », tranche Anaïs Dessain.
La fondatrice de Nomadic Players se définit comme une « amoureuse des escape games ». Avant de se lancer dans la création de sa propre entreprise, elle travaillait dans la coordination socio-culturelle. Elle intervenait auprès de différents publics par le biais d’associations pour monter des projets culturels et artistiques.
La jeune femme, âgée d’une trentaine d’années, est initialement “matiériste”. Autrement dit, spécialisée dans le travail de la chaux, du plâtre et de la terre, pour la décoration. « La création de Nomadic Players est un mélange de tout ce que j’ai pu faire dans mon parcours, que ce soit dans le social, l’animation, le jeu et l’art », résume-t-elle. Pour choisir les thèmes évoqués dans ses escape games, elle s’inspire principalement des problèmes sociétaux qui font la Une de l’actualité. Un prochain scénario pourrait d’ailleurs aborder les violences faites aux femmes.
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