« Immobiliste et sans ambitions » pour les uns. « Volontariste et active » pour les autres. La politique menée par Jean-Luc Moudenc à Toulouse a été passée au crible par les élus lors du conseil municipal qui avait lieu ce mercredi 9 novembre. Un bilan qui donne à l’opposition l’occasion de fustiger les différents projets mis en place par la majorité, et à cette dernière de les défendre.
Ce mercredi 9 novembre avait lieu le conseil municipal de Toulouse. L’occasion pour François Piquemal (LFI), élu du groupe Alternative municipaliste citoyenne (AMC), d’annoncer sa démission pour se consacrer à son mandat de député de la 4e circonscription de Haute-Garonne pour lequel il a été élu en juin dernier. Et pour sa dernière apparition en assemblée municipale, l’élu d’opposition n’a pas mâché ses mots : « J’aurais appris que l’on peut mentir en promettant une 3e ligne de métro pour 2024, puis 2026, puis 2028… Que l’on peut se cramponner à des projets écocides comme celui de la tour Occitanie… Que l’on peut gouverner en traînant de nombreuses casseroles, au point de pouvoir en ouvrir un magasin : les soupçons de favoritisme à l’encontre de Sophia Belkacem qui ont conduit à sa démission, celle d’Aviv Zonabend qui a affirmé qu’il “y avait trop d’Arabes à Toulouse”… Sans compter la mise en examen de Laurence Arribagé pour complot politique… »
Une intervention qui donne le ton des échanges houleux que les élus ont mené lors des propos liminaires de ce conseil municipal. Pour Jean-Luc Moudenc, elle « est représentative de ce qu’est devenue la gauche toulousaine, et française plus largement : intolérante, sectaire, extrémiste et manipulatrice ». Le maire de Toulouse, qui vient de quitter Les Républicains, accuse La France Insoumise d’étouffer les autres familles politiques de gauche et d’imposer une vision extrémiste aux dépens des valeurs socialistes, et son représentant local, François Piquemal, d’abandonner Toulouse. Mais avant de quitter les bancs du Capitole, François Piquemal tient à entamer un bilan sévère de la majorité municipale, suivi dans l’exercice par ses collègues de l’opposition. Des conclusions auxquelles l’équipe de Jean-Luc Moudenc répond par l’énumération des projets structurants mis en place.
C’est d’abord sur le terrain de l’écologie et de la nature en ville que les débats se tendent. En effet, pour l’opposition, la politique en la matière menée par la majorité municipale n’est pas à la hauteur des enjeux. Pour exemple, le plan “100 000 arbres” qui, pour Antoine Maurice, élu du groupe Toulouse écologiste, solidaire et citoyenne (Tesc), reste de la poudre aux yeux. Des arbres dont il rappelle qu’ils ne seront pas tous plantés par la Mairie : « 40% le seront par le secteur privé sur lequel vous comptez pour atteindre votre objectif ». Dans un même temps, l’élu regrette les abattages qui ont lieu au nom de la 3e ligne de métro avenue Jean Rieux, à François Verdier ou encore à Montplaisir… Il accuse Jean-Luc Moudenc de ne pas œuvrer à la végétalisation de la ville mais de la donner en pâture aux promoteurs et invite le maire de la Ville rose à la verdir sous peine d’étouffement.
Un paradoxe végétal que Jean-Luc Moudenc explique aisément en complétant les propos d’Antoine Maurice : « Certes, nous avons été obligés de couper certains arbres car ils se trouvent sur le tracé de la 3e ligne de métro, dont la longueur record de 27 kilomètres implique forcément de tomber sur quelques spécimens. Mais je rappelle que pour un arbre enlevé, trois sont replantés. »
« Nous sommes écolos ! Nous sommes tous écolos ! Mais nos visions de l’écologie ne sont pas les mêmes », observe Pierre Esplugas-Labatut, adjoint aux musées. « Vous pratiquez l’écologie radicale et nous l’écologie concrète et pragmatique », lance l’élu de la majorité à ceux de l’opposition, qui énumère les projets comme Téléo (30% moins polluant que les voitures), la 3e ligne de métro ( -80 000 voitures sur la rocade), l’ouverture de la Maison de l’énergie qui devient le guichet unique de la rénovation énergétique. Sans oublier le plan “rafraichissement de la ville” en cours de conception. « Pendant que nous agissons, les députés toulousains de la Nupes votent à l’Assemblée nationale un amendement contre le financement par l’État de la LGV. Comment peut-on se dire écologiste et ne pas soutenir un projet ferroviaire, transport écologique par excellence… », lance Pierre Esplugas-Labatut.
Le train. Voilà un autre point d’achoppement entre la majorité et l’opposition. Plus précisément le RER toulousain. Antoine Maurice, en tête de file, reproche à Jean-Luc Moudenc de ne pas être clair sur la question. « Après avoir affirmé en juillet que le RER n’était qu’un mythe, vous et votre groupe politique avez voté un vœu en conseil métropolitain permettant de lancer le dialogue avec les acteurs institutionnels », constate-t-il. Un revirement de position qu’Antoine Maurice attribue à l’isolement dans lequel se trouvent la Mairie et la Métropole sur le sujet : « Tout le monde est pour ce projet, de nombreux maires de l’agglomération, de droite comme de gauche, le soutiennent, de même que le Conseil départemental, la préfecture, les entreprises, le Medef, la Région… »
Mais ce qui est interprété comme un recul par l’opposition ne signifie pas que Jean-Luc Moudenc a changé d’avis quant au RER Toulousain. D’ailleurs, il garde une posture réfractaire : « Il me tarde de rentrer dans le fond du sujet », argue-t-il, regrettant « la pauvreté des débats ». Combien de voyageurs drainera-t-il ? Combien d’automobilistes laisseront leur voiture pour le RER ? Quelle sera sa performance énergétique ? Quelle réduction de gaz à effet de serre permettra-t-il de réaliser ? Quel devra être l’investissement pour sa mise en œuvre ? Comment sera-t-il financé ? « Et pas une seule proposition pour répondre à toutes ces questions », note le maire de Toulouse, qui laisse encore échapper son scepticisme malgré son accord de principe quant au lancement des discussions institutionnelles.
Très discuté également, le “plan sobriété énergétique” de la Mairie. Jean-Luc Moudenc a présenté 25 mesures pour réduire la consommation, et donc la facture, d’énergie l’hiver prochain. Parmi les actions mises en place figure l‘extinction de l’éclairage public à minuit et des bâtiments publics à 22h. « Cette mesure permettra d’économiser 450 MWh par mois, l’équivalent de la consommation annuelle de 100 foyers », se félicite la Mairie. Réjouissance rapidement nuancée par Antoine Maurice, qui rappelle que l’édile toulousain souhaitait « rallumer la ville dès son premier mandat ». Cela étant dit, l’élu d’opposition épluche ledit plan et remarque que « la mesure d’extinction de l’éclairage public ne concernera que 45 rues, soit 10% des lampadaires. C’est ridicule ! » Pourquoi ne pas généraliser l’action ?
Pour des questions de sécurité, répond la majorité. « Vous souhaitez plonger Toulouse dans le noir, et cela, nous nous y opposons pour assurer la sûreté de nos rues mais aussi pour un confort d’usage », précise Pierre Esplugas-Labatut. En effet, Jean-Luc Moudenc vient au renfort de son adjoint en rajoutant : « Je ne sacrifierai pas la tranquillité des Toulousains et c’est un choix social car je sais que les premières victimes de l’insécurité sont les plus modestes. »
Il justifie également le faible taux d’extinction des éclairages publics par le travail d’anticipation réalisé : « Depuis 2014, nous transformons petit à petit les technologies des lampadaires. Aujourd’hui les deux-tiers sont équipés de nouvelles installations ce qui permet de ne pas avoir recours à une extinction générale », explique le maire de Toulouse. Il attend d’ailleurs avec impatience le moment où l’on comparera sa ville avec les autres qui auront mené des actions plus fortes mais plus éphémères. Confiant, Jean-Luc Moudenc assure que Toulouse sera en avance.
En avance pour la majorité, en retard pour l’opposition. Pour cette dernière, la politique générale menée par Jean-Luc Moudenc est caractérisée par l’immobilisme. Tour à tour, les élus énumèrent des projets qui n’avancent pas, voire qui ont été abandonnés : la végétalisation de la ville, la lutte contre les îlots de chaleur, la rénovation énergétique des logements, la réduction des gaz à effet de serre, la fête foraine Saint-Michel, l’auditorium de la prison Saint-Michel, la fin du festival “Toulouse d’été”…
Des accusations dont Jean-Luc Moudenc dit avoir l’habitude : « La régularité de ces affirmations est une forme de paresse de la part de l’opposition car de nombreux projets démontent cette critique. » « Jamais Toulouse n’a disposé d’autant de moyens (financiers et humains) pour assurer la sécurité. Jamais la Ville n’a autant investi pour l’éducation. Jamais la Municipalité n’a autant développé l’énergie renouvelable. Jamais le végétal n’a été aussi présent avec le triplement du rythme de plantation d’arbres… Alors si l’on évoque l’immobilisme, c’est de celui de votre argumentation dont il convient de parler. Votre disque est rayé. Vous vivez sur une planète nommée “idéologie”. Nous, nous sommes dans la réalité », tance l’édile, avant de clôturer les débats.
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