Odile Maurin, élue d’opposition et présidente de l’association Handi-Social attaque la mairie de Toulouse en justice pour dénoncer la mise en place du système de contrôle par Lecture automatisée des plaques d’immatriculation (Lapi), qu’elle juge discriminatoire pour les personnes handicapées.
L’élue d’opposition du groupe Alternative Municipaliste Citoyenne (AMC) et présidente de l’association Handi-Social Odile Maurin attaque la mairie de Toulouse en justice et vient de déposer un recours devant le tribunal administratif de la Ville rose pour “excès de pouvoir” afin d’obtenir la suppression du système de Lecture automatisée des plaques d’immatriculation (Lapi) mis en place depuis le mois d’août à Toulouse. Odile Maurin estime que ce dernier « bafoue le droit des personnes handicapées ». En parallèle, l’élue formule une question prioritaire de constitutionnalité (QPC). C’est-à-dire qu’elle saisit le conseil constitutionnel, pour solliciter une réserve d’interprétation.
« Lorsque le gouvernement a évoqué la mise en place du système Lapi, il a bien mentionné qu’il devait servir à effectuer des pré-contrôles, et non des contrôles automatiques. Or, nous estimons que la Mairie de Toulouse l’utilise à cet effet », détaille David Nabet-Martin, avocat d’Odile Maurin. C’est sur cet argument que l’élue municipale va se baser devant la justice. Explications.
Le système de Lecture automatisé des plaques d’immatriculation a été imaginé pour faciliter le travail des agents de surveillance de la voie publique (ASVP). Montpellier, Paris, Marseille, Bordeaux et Lille en sont déjà dotées. Concrètement, une voiture circule à faible allure dans les rues de la ville. À l’intérieur, une caméra embarquée permet de lire, de manière automatique, toutes les plaques d’immatriculation des véhicules stationnés sur les places payantes prévues à cet effet.
Le logiciel vérifie, en direct, si la plaque du véhicule stationné apparaît dans les fichiers de l’horodateur, si son propriétaire a un abonnement de résident ou de professionnel, ou s’il est inscrit dans la base de données de la mairie (en tant que PMR, par exemple) et dispose d’une exemption. Ce système permet d’indiquer rapidement aux agents, présents à bord du véhicule de contrôle, quelle voiture n’est pas en règle. Et ainsi, de verbaliser son propriétaire.
La Mairie réfléchit à la mise en place du système Lapi à Toulouse depuis 2018. En quatre ans, elle a organisé deux réunions avec les associations de défense des personnes handicapées – dont Handi-Social présidée par Odile Maurin – afin de trouver des solutions pour développer le système de contrôle sans risquer de discriminer les titulaires d’une Carte Mobilité Inclusion mention stationnement (CMIS) ou d’une Carte européenne de stationnement (CES).
Sur la table : deux propositions. La première étant que les personnes handicapées puissent facilement s’inscrire dans la base de données de la Mairie. Et ainsi, être signalées auprès des agents de contrôle qui utilisent Lapi. « Donc si elles n’ont pas envie d’être inscrites dans cette base de données, l’amende tombe », regrette Odile Maurin : « Puis, cela signifie qu’elles doivent s’inscrire dans les Mairies de toutes les villes dans lesquelles elles souhaitent se rendre ? Et enfin, la plupart des personnes handicapées ne conduisent pas, et se font conduire par quatre, cinq, six proches ou accompagnants différents. Comment ça se passe dans ce cas-là ? Étant donné que nous ne pouvons inscrire qu’une ou deux voitures dans la base de données de la Mairie… », questionne l’élue d’opposition.
La seconde proposition de la mairie est que les personnes handicapées se rendent à l’horodateur pour prendre un ticket spécifique offrant un stationnement gratuit de 24 heures. « Sauf que les écrans d’horodateurs sont trop hauts pour la plupart des personnes en fauteuil. Puis, à certains endroits, comme sur le boulevard de Strasbourg, il n’y a aucun abaissement de trottoir qui leur permet d’accéder au parcmètre », détaille Odile Maurin, qui a d’ailleurs publié une vidéo à ce sujet.
Malgré les oppositions, le système de contrôle est mis en place à Toulouse depuis le 16 août dernier. Odile Maurin demande alors que, lorsque les agents remarquent un véhicule en fraude, ils sortent vérifier que celui-ci ne dispose pas de Carte mobilité inclusion mention stationnement (CMIS) ou d’une Carte européenne de stationnement (CES) . « On m’a répondu que dans ce cas-là, le système automatique serait moins efficace. Mais l’objectif de la Mairie est-il de verbaliser un maximum de personnes ? Ou est-il possible de mettre en place un système, certes moins performant, mais qui a au moins le mérite de respecter les droits fondamentaux des personnes handicapées ? » renchérit l’élue.
De son côté, Emilion Esnault, adjoint au maire en charge de la coordination de l’espace public, campe sur ses positions. « Entre septembre et octobre, 90 000 véhicules ont été contrôlés. Il y a eu 35 000 forfaits post-stationnement (FPS) distribués. Cela signifie que les ASVP auraient dû procéder à 35 000 vérifications ? C’est infaisable ».
Pour ce qui est de la notion de “pré-contrôle”, pour laquelle la présidente d’Handi-Social attaque la Mairie de Toulouse en justice, Emilion Esnault soutient qu’elle est respectée par les agents. « Ce “pré-contrôle” est réalisé au moment de la vérification, par le système automatisé, du paiement du stationnement. Ou, si ce n’est pas le cas, de l’inscription du propriétaire du véhicule dans la base de données de la Mairie ou de sa souscription à un abonnement. Ce qui veut dire que les contraventions ne sont pas systématiques ».
Concernant l’impossibilité d’enregistrer plusieurs véhicules dans les fichiers de la Mairie, Emilion Esnault évoque une troisième solution : les applications. En effet, les usagers ont la possibilité d’utiliser trois plateformes à Toulouse pour régler leur stationnement. La première, EasyPark (ex-ParkNow), est accessible depuis plusieurs années. Les deux nouvelles, Flowbird et PayByPhone, sont disponibles depuis début janvier.
« Les e-tickets de stationnement gratuit pour 24 heures en faveur des personnes handicapées et leurs accompagnants sont bien évidemment accessibles sur les plateformes, comme sur les horodateurs. Si les personnes concernées prennent un ticket sur l’application, et qu’elles placent la carte PMR sur le véhicule stationné, il n’y a aucun risque de recevoir une contravention », assure Emilion Esnault.
Pour ce qui est du recours déposé devant la justice par Odile Maurin concernant le système Lapi, l’adjoint au maire de Toulouse assure n’avoir toujours pas reçu de document officiel. Pourtant, de son côté, l’élue d’opposition évoque déjà le dépôt d’un référé, dès la semaine prochaine.
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