À Toulouse, Camille Routélous développe la fabrication de vêtements et de bonnets tricotés à base de coton et de cheveux. Une matière recyclée, résistante, et surtout, qui offre une alternative à une industrie de la mode très polluante.
Au cours de ses études à l’Institut supérieur des arts de Toulouse, Camille Routélous, originaire de Castres, a eu une idée originale : créer un fil textile à base de cheveux, associés à de la laine, pour en faire des vêtements.
« Lorsqu’ils sont coupés, les cheveux sont jetés, puis incinérés, ce qui génère de la pollution », explique la jeune femme, qui a trouvé différents moyens de les valoriser. Elle a d’abord créé des pinceaux, des tissus pour le mobilier, et même des produits d’isolation phonique et thermique.
À la fin de son cursus, elle connaissait cette matière originale sur le bout des doigts. Aujourd’hui, elle la tricote, pour créer des vêtements. Par ce biais, son objectif est de proposer une alternative responsable à une industrie de la mode ultra-polluante.
Les vêtements imaginés par Camille Routélous sont donc confectionnés avec un fil composé de laine et de cheveux. Pour créer ce fil, les deux matières sont d’abord assemblées, puis “filées”, pour confectionner, classiquement, une bobine. Il est ensuite tissé ou tricoté pour concevoir les habits.
La gamme “Versus”, imaginée par la designeuse, se compose de trois sortes de vêtements en maille jersey, nommés Martine (poncho), Sandrine (cape) et Yannick (mi-poncho, mi-cape). Et de trois modèles de bonnets en maille anglaise, nommés Damien, Louis et Chantal. « Ces prénoms ont été choisis en l’honneur des coiffeurs qui participent au projet », ajoute la jeune Castraise, initiatrice de cette aventure, avant tout humaine.
Les habits sont mixtes et proposés en taille unique. Ils s’adaptent à toutes les morphologies, du 32 au 50. Tous sont doublés avec un textile coton, composé à 60% de matière recyclée, pour faire en sorte que la matière ne gratte pas. Le résultat est tout doux, comme de la polaire.
L’année dernière, Camille Routélous a lancé une campagne de financement, à la recherche de soutiens pour le développement de son projet. Elle a récolté suffisamment de dons pour créer son entreprise. Par ce biais, elle compte développer la gamme, produire les vêtements en plus grande quantité, puis les proposer dans différents points de vente.
« Il était important pour moi de valoriser les savoir-faire locaux. Ce serait un non-sens de gâcher tous ces efforts écologiques en délocalisant la fabrication », insiste la Castraise. Tout est fait dans un rayon de 80 kilomètres autour de Toulouse.
Superyarn, une filature ariégeoise s’occupe de créer le fil à base de laine et de cheveux. Le Passe-Trame, un atelier de tissage, et la Bonneterie de la Montagne, un atelier de tricotage, tous deux situés à proximité de Mazamet, confectionnent les vêtements. André Calvet, une manufacture de tissus à Castres, réalise la doublure en coton.
Et les cheveux ? Ils sont récupérés auprès de 70 coiffeurs, installés principalement à Toulouse, mais aussi à Ramonville, Albi et Castres.
Le packaging, que ce soit le carton, le papier ou l’emballage sont fabriqués en France et recyclables. Même les tampons de la marque sont conçus dans un atelier de Tarbes, dans les Hautes-Pyrénées. « Je suis un peu jusqu’au-boutiste », plaisante la jeune femme.
Camille Routélous est consciente que porter des vêtements tricotés à base de cheveux peut entraîner quelques réticences : « Chacun a son histoire, ses aprioris. Certains associent la coupe des cheveux aux camps de concentration, d’autres pensent juste que c’est quelque chose de sale ». Mais elle se veut rassurante : « Ils sont triés et lavés plusieurs fois avant d’être transformés en fils ».
De plus, cette matière possède une multitude de caractéristiques. Elle est résistante, isolante, chauffante, « et surtout elle respire toute seule, comme la laine, donc elle ne nécessite pas de lavage », poursuit la jeune diplômée. Si vous souhaitez toutefois les laver, c’est possible, à la main ou en cycle froid à la machine.
Pour ce qui est du prix, plutôt élevé, des vêtements, Camille Routélous répond simplement. « Le prix des vêtements est un prix “réel”. C’est-à-dire que tous les acteurs sont justement rémunérés. Pas d’exploitation, ni de délocalisation, ni de matières pétrochimiques. C’est un investissement, mais un investissement responsable, qui permet de consommer moins, et mieux ».
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