Bouteilles, verres, pailles, sacs… Les produits à base de plastique se trouvent partout autour de nous. Mais qu’advient-il de ces objets du quotidien lorsqu’ils sont jetés n’importe où ? Des chercheurs toulousains du CNRS, du CNES, de l’Institut pour la Recherche et le Développement (IRD) et de l’université Toulouse 3 Paul-Sabatier, ont voulu comprendre comment ces déchets plastiques peuvent se mouvoir aux quatre coins du globe, du Pérou jusqu’à l’Occitanie.
Jeroen Sonke est directeur de recherche du CNRS au laboratoire Géosciences environnement de Toulouse. C’est avec ses collègues toulousains qu’il travaille depuis 2019 à l’élaboration d’un modèle mathématique capable de définir la trajectoire de certains déchets plastiques pour en déduire leur présence à des endroits insoupçonnés, et la manière dont ils y sont arrivés. Il nous explique : « Avec mes équipes, nous avons commencé par observer la présence ou non des micro-plastiques dans l’air et dans la neige en haute altitude, loin des zones d’habitation. Et nous avons découvert une concentration importante de ces substances au-dessus des Pyrénées et au Pic du Midi. Nous estimons ainsi qu’environ 300 micro-plastiques par mètre carré y tombent tous les jours. »
Les échantillons récupérés par les chercheurs sont ensuite analysés au microscope puis, par des atmosphériciens, qui modélisent leurs trajectoires dans l’atmosphère. « Cela nous a appris que ces micro-plastiques en haute altitude sont souvent portés par des masses d’air qui viennent d’Amérique du Nord, d’Afrique ou de l’océan Atlantique. Nous avons donc réalisé qu’il existait un déplacement intercontinental des micro-plastiques à travers la planète. »
Dans l’eau, dans les sols comme dans l’air, le plastique s’insinue partout, polluant notre environnement, mettant notre écosystème et notre santé en péril. Jeroen Sonke affirme d’ailleurs : « Aujourd’hui, l’Homme est exposé aux micro-plastiques dès lors qu’il boit de l’eau en bouteille ou du robinet. On en retrouve également dans le sel, dans le miel, dans toutes sortes d’aliments, comme les légumes… On estime par ailleurs que chaque individu respire 100 000 particules de micro-plastiques par an. »
Or, le Bisphénol A contenu dans le plastique est un perturbateur endocrinien hautement toxique. Celui-ci peut notamment engendrer un risque d’infertilité ou de malformation chez les fœtus. Pour ce qui est des animaux marins (ce sont les plus exposés à cette pollution), Jeroen Sonke, alerte : « Nous estimons qu’entre 10 à 20% d’entre eux sont fortement impactés par les macro-plastiques, les plus grands déchets. »
Afin de limiter cette pollution, les chercheurs préconisent une meilleure gestion des décharges à ciel ouvert ou encore un nettoyage ciblé des lacs et des zones côtières les plus impactés. « Il existe de nouveaux projets en cours qui permettent le captage des macro-plastiques dans les rivières. Nous espérons que ce sera une façon efficace de les retenir, et ainsi d’éviter qu’ils ne se retrouvent dans les océans », conclut Jeroen Sonke.
Estelle Ben-Mghira
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