À ce jour, 45 % des habitants de l’Occitanie seraient immunisés contre la Covid-19, selon une étude menée par le professeur Jacques Izopet, chef du service de virologie du CHU de Toulouse, à qui nous avons demandé si la route était encore longue avant d’atteindre l’immunité collective.
JT : Une étude que vous venez de mener au sein du CHU de Toulouse évalue à 45 % la part de la population occitane qui est aujourd’hui immunisée contre la Covid-19. Comment êtes-vous parvenu à ce chiffre ?
Jacques Izopet. Nous avons eu la chance de pouvoir réaliser une étude auprès des 8758 personnels soignants du CHU que nous avons suivis sur un an. Nous avons pu estimer ce que l’on appelle la séroprévalence de la Covid-19 au sein de cet échantillon. C’est-à-dire la proportion des personnes qui ont développé des anticorps et qui sont donc immunisées. Ce sont celles qui ont été vaccinées ou qui ont déjà été infectées. En parallèle, nous avons réalisé plusieurs modélisations mathématiques tenant compte des contraintes sanitaires permettant d’anticiper le nombre de testés positifs par jour sur l’aire urbaine de Toulouse. La combinaison de ces deux études nous indique que la séroprévalence de la COVID-19 serait de 45% en Occitanie. Ce qui est un chiffre important. En comparaison, ce taux était de 4 % à la sortie du premier confinement.
Quelle séroprévalence nous permettra-t-elle d’atteindre l’immunité collective ?
Il n’y a pas de règle mathématique en la matière. Notre première étude de modélisation indiquait qu’elle serait atteinte entre 50% et 60% de la population immunisée. Au-delà de 60 % de la population immunisée, on estime qu’il y a un réel impact sur la circulation du virus et un recul de l’épidémie. Il nous faudra encore attendre plusieurs mois en France pour atteindre ce taux. Et l’on n’arrivera jamais à 100 %, car il y aura probablement une frange, de 15 à 20 % de la population, que l’on ne réussira pas à convaincre d’aller se faire vacciner.
Les vaccins nous protègeront-ils longtemps ?
Avec le temps, la concentration d’anticorps diminue dans l’organisme. C’est pour cela que nous nous intéressons aussi à l’immunité cellulaire, qui est différente de celle induite par les anticorps. C’est elle qui va protéger durablement d’une réinfection et atténuer la gravité des symptômes. Nous ne savons pas encore si cette forme d’immunité est importante au sein de la population. Toutefois, on peut le présumer. Dans les pays qui ont déjà largement vacciné, comme Israël ou le Royaume-Uni, on observe, en quelques mois, non seulement une baisse de la mortalité, mais aussi une diminution des cas de formes graves de la Covid-19 et des infections asymptomatiques.
Ne peut-il pas apparaître de nouveaux variants résistants aux vaccins ?
C’est le risque. Les virus évoluent en permanence, avec une propension à échapper aux anticorps. Or, avec le retour à la normale des pays industrialisés, les voyages vont reprendre et il y aura de nouveau un brassage de population propice à la propagation de l’infection. D’où l’importance de vacciner au plus vite l’ensemble de la population mondiale. C’est le plus grand défi de cette épidémie. L’immunité collective n’a de sens que si elle est globale.
Commentaires