Pression. Il est clair que la ville rose voit le dialogue social se durcir. Un conflit qui se cristallise notamment autour de Tisséo et qui s’exacerbe par des tensions internes aux syndicats. Enquête sur des fonctionnements parfois douteux au sein des organisations syndicales, particulièrement à FO.
Lors de ses vœux à la presse, le maire de Toulouse annonçait la couleur : « Je les renvoie à mon attitude lors de la grande grève de Tisséo fin 1996 début 1997 : ils n’avaient rien obtenu et j’avais veillé personnellement que tous les jours de grève soient imputés sur les feuilles de paye des grévistes ». Le genre de crânerie qui a eu le don d’irriter les syndicats. Aujourd’hui la guerre gronde. En coulisse FO, CGT, UNSA et autres SUD et CFDT sont sur les dents. Paré à toute éventualité pourvu qu’on ne touche pas aux droits des salariés, ils préparent la riposte. Du côté de la mairie, on nous annonce qu’une réunion devrait prochainement avoir lieu pour aborder la question des droits syndicaux et des moyens alloués aux organisations syndicales. La date n’est pas fixée, mais pour l’heure personne ne parle. Ni d’un côté, ni de l’autre. Pourtant ces tensions sont loin d’être bénéfiques à la cohésion des dits syndicats et pour preuve les récentes affaires qui ont secoué le syndicat majoritaire FO.
Tout commence en octobre dernier, lorsqu’on apprend dans la presse, que des soupçons de détournement de fonds pèsent sur le secrétaire général (FO mairie de Toulouse) André Falba. L’accusation est portée par l’ancien trésorier du syndical, Joël Arnaud, qui a déposé une plainte à ce sujet. Dans la foulée, André Falba, démissionne de sa fonction en octobre dernier, et Pascal Maynaud est élu à sa place. Pour autant, André Falba conserve une place importante à FO tandis que Joël Arnaud est radié du syndicat… L’ancien secrétaire général était présent sur les listes des dernières élections professionnelles, du 4 décembre dernier. « C’est normal, il est innocent jusqu’à preuve du contraire, il attend d’être convoqué par le Procureur qui va surement classer l’affaire sans suite », assure Pascal Maynaud. Il siège donc au Comité Technique Paritaire (CTP), instance où se discute les conditions de travail des employés municipaux (composée pour moitié d’élus et pour moitié de représentants syndicaux) et reste un ‘‘permanent’’ FO, soit un détaché à temps plein sur les activités syndicale. Visiblement, les accusations de fraude ne sont pas prises au sérieux… « Nous avons vérifié les comptes, et nous pouvons démontrer que tout est faux », argumente Pascal Maynaud. En outre, l’ancien trésorier a été alerté par la disparition de 14 000€ : « On a retrouvé deux chèques de 7000€, qui correspondent à des reversions à la fédération départementale ». Pour lui, il n’y a aucun doute : « Au-delà de l’accusation, c’est de la calomnie ! » Pourtant, selon nos informations, le syndicat au niveau national serait sur le point d’envoyer une lettre à André Falba pour le suspendre de toutes ses fonctions.
Drame à l’Office de la tranquillité
Autre affaire, qui a récemment bouleversé FO Toulouse : la tentative de suicide d’une ancienne salariée de l’office de la tranquillité, élue FO au CTP, le 16 octobre dernier. La version officielle du syndicat est rodée : « Lorsque Jean-Luc Moudenc a annoncé qu’il voulait restructurer l’office, elle l’a mal vécu », affirme Pascal Maynaud, « mais je n’en sais pas plus ». Or, cette version est entièrement démentie par l’intéressée qui met en cause son syndicat : « J’étais victime de harcèlement moral dans mon travail, mais je n’ai jamais eu aucun soutien de FO ». Recrutée en 2009 par Pierre Cohen lors de la création de l’Office de la tranquillité, elle était la déléguée du personnel FO des employés de l’office qui travaillaient en 3×8. Et son prédécesseur n’était autre que Pascal Maynaud. Pendant près d’un an, ils se sont côtoyés sur leur lieu de travail « mais nous nous sommes très peu croisés car elle travaillait de nuit, et moi de jour », se justifie-t-il. La fusion entre l’équipe existante d’ « Allo mairie » (des contractuels) et le nouveau service de l’office de la tranquillité (des fonctionnaires) a fait des étincelles. Les premiers ayant peur pour leur poste, les seconds cherchant leur place. Dès son arrivée à l’Office, cet agent est « pris en grippe » par un ‘‘superviseur’’ d’Allo mairie. « Le climat est déplorable », raconte-t-elle. Ce ‘‘superviseur’’ « n’a cessé de me déprécier, de me mettre des bâtons dans les roues, de tout faire pour me tenir à l’écart ». Il va jusqu’à remettre en cause sa légitimité en tant que représentante syndicale des salariés, dans un mail où tout le service est en copie. On lui confie des tâches « infantilisantes », l’empêche d’accéder au poste de médiateur « ce pour quoi j’ai été recrutée, mais on m’a systématiquement refusé toutes les formations qui permettaient d’y parvenir ». A plusieurs reprises, cette salariée demande des réunions à son syndicat pour clarifier les choses, interpelle son directeur et même le directeur général des services : « J’ai été sanctionnée pour non-respect de la ligne hiérarchique et mon directeur m’a répondu par mail de relire le manuel du parfait fonctionnaire ». Il faut préciser que ce directeur, tout comme l’agent ‘‘superviseur’’ d’Allo Mairie sont tous les deux syndiqués FO. Aujourd’hui Pascal Maynaud revient sur les faits : « A chaque fois que nous avons été alertés par cette salariée, nous avons contacté son directeur qui nous répondait qu’il n’y avait pas harcèlement. On tournait en rond. » Drôle de façon de gérer un cas de harcèlement.
« J’ai compris que mon syndicat préférait soutenir les directeurs plutôt que les salariés, les permanents FO venaient toujours lorsque je n’étais pas là pour dire que j’étais folle, que j’agissais dans mon intérêt personnel! » C’est finalement la médecine du travail qui impose son reclassement en « coordinatrice des médiateurs ». Une victoire. Et les choses se calment un peu, jusqu’aux dernières élections municipales. Le fameux ‘‘superviseur’’ est nommé directeur de l’Office de la tranquillité par Jean-Luc Moudenc. La tension monte à nouveau. Lors d’un CTP, elle décide de parler en son nom propre pour dénoncer (une fois de plus) tout ce qui se passe dans ce service. Ce qui lui vaut une radiation de son syndicat. Son dernier recours, interpeller le maire de ce qui lui arrive. Courrier qui reste à ce jour sans réponse. La salariée qui souffre aujourd’hui de risques cardiaques, de troubles alimentaires et du sommeil, tente de mettre fin à ses jours sur son lieu de travail. Comble de l’histoire, son nouveau directeur prévient la police municipale : « Alors que la police nationale aurait réalisé une enquête d’office », explique-t-elle. Aujourd’hui, elle attend encore des nouvelles de la plainte qu’elle a déposée le 6 octobre au commissariat.
Démission suspecte à l’UNSA :
FO ne semble pas être un cas si isolé. A l’UNSA la récente démission de l’ancienne secrétaire générale Christine Mullot pose question. Une démission que l’on explique en interne par « une demande de départ à l’unanimité car elle ne remplissait plus son mandat pour mener le syndicat ». Les 4 secrétaires généraux adjoints ayant pris la relève s’accordent à dire que des alertes avaient été données, « car cela faisait deux ans que cela se passait mal et créait un préjudice grave pour le syndicat ». Lorsqu’on leur pose la question, les secrétaires généraux adjoints nient une histoire « d’argent, à la FO » pourtant ils ne souhaitent pas s’étendre ni sur le sujet ni sur la personne.
Voir nos premiers articles sur le sujet :
Commentaires
BL le 02/04/2025 à 14:01
Il faut distinguer les problèmes internes à certains syndicats (qui peuvent être répréhensibles ou relever de leur cuisine interne) et la politique "sociale" très violente de la nouvelle équipe (chasse aux sorcières, réduction de plus de 20% des salaires des contractuels, non remplacements systématiques des départs, restructurations de services à l'emporte pièce, réduction des moyens syndicaux).