Il y a un demi-siècle, les autoroutes urbaines étaient tellement à la mode qu’on prévoyait d’en poser une à Toulouse sur le Canal du Midi ! Et il s’en est vraiment fallu de peu…
DRÀ Toulouse, lorsqu’on longe le Canal du Midi, certains détails intriguent. On trouve des piles en béton susceptibles de séparer une 2×3 voies sous l’immense pont des Demoiselles, on peut emprunter des avenues aux allures d’échangeurs, larges de plus de 60 mètres (Collignon ou Bourgès-Maunoury), on aperçoit la rocade à quelques dizaines de mètres des Ponts-Jumeaux, comme pour l’y raccorder… Quelques preuves flagrantes de ce qui a bien failli arriver au Canal du Midi dans les années 1970 : devenir une autoroute urbaine. « L’idée avait germé dix ans plus tôt à la direction de l’équipement, afin de désengorger le trafic automobile dans une ville déjà en pleine explosion démographique », explique le géographe toulousain Robert Marconis.
Concrètement, on prévoit d’assécher le canal entre les Herbettes et les Ponts-Jumeaux, d’aménager dans son lit 30 hectares de parking, et de recouvrir le tout d’une voie rapide, les eaux étant déviées dans la vallée de l’Hers. Mis à part des écolos rabat-joie qui s’enchaînent aux platanes et des bateliers qui redoutent de payer la facture du détournement, il n’y a pas grand monde pour s’opposer au projet : « C’est l’époque du tout-voiture, où l’on encourage la percée de larges voies en centre-ville pour y rabattre un maximum de trafic, comme le tunnel de Fourvière à Lyon ou la pénétrante des Halles de Strasbourg », raconte Robert Marconis.
Au tournant de la décennie, les études préalables sont menées, un avant-projet définitif est rédigé et le ministère de l’Équipement donne son feu vert au recouvrement du Canal du Midi. L’affaire semble bouclée au moment où le nouveau maire Pierre Baudis s’interpose : « C’est lui qui fera capoter l’idée… On le présente aujourd’hui comme le sauveur du canal », ajoute Robert Marconis. L’édile revient en effet transformé d’un voyage en Asie où il dit avoir médité au bord de canaux : « J’ai tranché en faveur des piétons, contre l’automobile qui, s’y l’on n’y prend garde, finira par chasser les habitants des villes », avance-t-il dans une interview au ”Monde”, en octobre 1973, annonçant dans la foulée la remise en service de coches d’eau (embarcations de transport fluvial pour passagers), l’installation de bancs et la plantation de massifs de fleurs au bord du canal.
« La nouvelle a été si brutale que les employés de l’équipement en ont fait une déprime », raconte Jean-Michel Lattes, l’élu en charge des déplacements à la Métropole toulousaine. « L’abandon de ce projet a marqué le début du recul de la voiture en ville. S’il fallait faire ce genre de proposition aujourd’hui, ce serait une exécution politique immédiate », conclut l’élu.
Philippe Salvador
Philippe Salvador a été reporter radio pendant quinze ans, à Toulouse et à Paris, pour Sud Radio, Radio France, RTL, RMC et BFM Business. Après avoir été correspondant de BFMTV à Marseille, il est revenu à Toulouse pour cofonder le magazine Boudu.
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Commentaires
Theron le 22/02/2025 à 13:16
Jean Michel Lattes oublie quelques petites choses à son actif :
- Lui et ses complices de la mairie veulent rajouter des autoroutes dans l'agglo ;
- Lui et ses complices de la mairie veulent expulser la Vélorution, sans avoir fait la moindre proposition correcte de relogement ;
- Lui et ses complices de la mairie n'ont rien prévu pour l'étoile ferroviaire...
- lui et ses complices ne font pas de concertation avec les associations d'usagers...
- Lui et ses complices n'ont pas prévu de bus en site propre dans Toulouse...
- L'agglomération est l'une des pires en Europe pour l'usage immodéré de la bagnole : 63 % des trajets !
Les médias regardent-ils réellement ce qu'il se passe ?
barrere le 22/02/2025 à 01:00
merci BAUDIS d avoir laisser le fil de l'eau poursuivre son chemin et les piétons les rues de notre ville ......