MUTUALITÉ. C’est bien connu, l’union fait la force. En se réunissant sous la forme de groupements d’achat, les citoyens peuvent donner du sens à leur consommation tout en soutenant les producteurs bio de leur région. Un système, qui comme le montre l’exemple de Bioloco à Poucharramet, repose sur un équilibre à la fois fragile et précieux.
À Poucharramet, la notion de collectif semble être une fièvre hautement contagieuse. Ici, on applique en effet la recette à tous les domaines de la vie. Éducation populaire, culture, environnement, agriculture, ce village à plus de 30 kilomètres au Sud-Ouest de Toulouse regorge d’associations lui donnant l’air d’un îlot alternatif. Pas étonnant donc qu’en 2013, deux de ses habitantes aient décidé de se lancer dans une initiative destinée à reprendre en main leur consommation. Toutes deux jeunes mamans à l’époque, Julie Brenier et Magali Laporte ont ainsi créé Bioloco, un groupement d’achat de produits bios.
Se mettre à plusieurs pour passer des commandes directement auprès de producteurs locaux, l’idée n’a rien de révolutionnaire sur le papier. Elle n’en répond pas moins à de nombreuses problématiques actuelles liées à l’alimentation. « C’est d’abord un système pratique car il n’est pas toujours facile de s’approvisionner quand on veut manger des produits de qualité, à proximité de chez nous. Mais la démarche est surtout éthique, c’est une manière de recréer du lien avec les producteurs et de connaître leur réalité », témoigne Magali Laporte.
Au sein de l’association Bioloco, le fonctionnement est bien rodé. Un mois avant la distribution, des référents s’assurent auprès des producteurs des articles disponibles et de leurs tarifs. Ils en informent ensuite les foyers adhérents et regroupent les commandes effectuées via un tableur en ligne avant de les répartir par exploitants. Une semaine avant le jour J, il s’agit de vérifier une dernière fois que les commandes et factures ont bien été reçues et d’informer sur le jour et le lieu de la distribution. Ce rituel aboutit environ tous les deux mois au moment attendu de pied ferme par les adhérents. « Les jours de livraison, on mange ensemble, c’est très convivial, les producteurs restent souvent discuter.
C’est autre chose que de pousser son caddie et de payer via une caisse automatique », souligne Magali Laporte.
De plus, les participants aux groupements d’achat s’approvisionnent aussi en denrées non périssables, voire en produits non alimentaires comme des cosmétiques, des savons ou du textile. Chez Bioloco, l’idée est en effet d’avoir accès à un maximum d’articles du quotidien et de permettre aux foyers d’être autonomes sur certaines denrées, notamment les produits secs telles les pâtes ou la farine. Et cela, sans se ruiner. Car l’avantage des achats groupés est aussi de bénéficier de bons prix. « Le but n’est bien évidemment pas de négocier les tarifs mais la suppression d’intermédiaires offre forcément des coûts moindres tout en assurant au producteur le juste revenu lié à son travail », explique Magali Laporte .
Un modèle économique visant à enrayer l’influence des grandes et moyennes surfaces. « Pour moi, c’est le système parfait », confirme Patricia Lariguet, créatrice de la ferme-laboratoire cosmétique Caméline, qui applique 5 % de réduction sur les produits qu’elle livre à Bioloco. « Par rapport aux marchés où les gens passent devant mon stand en disant que le bio est cher, là les consommateurs sont présélectionnés. Ils s’organisent et je n’ai plus qu’à livrer.
Cela me permet aussi de connaître mes clients, c’est essentiel. » Comme Patricia Lariguet, Stéphanie et Fabrice, producteurs de légumes et d’épices dans le Volvestre, privilégient au maximum ce mode de fonctionnement et travaillent avec différents groupements d’achats qui essaiment un peu partout sur le territoire. « Cela nous plaît éthiquement, mais c’est aussi un modèle économique viable pour des petites productions comme la nôtre. Toutes nos épices sont vendues par ce biais », assure Stéphanie, en pleine récolte de safran.
Toutefois pour ces derniers, le déplacement ne vaut le coup qu’à partir d’un certain seuil de commandes. Or, Bioloco qui regroupait une trentaine de foyers à ses débuts a depuis réduit la voilure. « Chaque livraison correspondait à un chiffre d’affaire de 10 000 euros, c’était devenu une grosse machine mais qui s’est essoufflée faute d’engagement dans le fonctionnement au quotidien », raconte Magali Laporte.
Aujourd’hui, Bioloco est ainsi une toute petite structure comparée à d’autres comme Biolib, groupement d’achat situé dans le quartier Saouzelong à Toulouse qui compte des centaines d’adhérents. « Travailler avec Bioloco n’est pas forcément rentable mais je continue à les livrer car nous avons tissé des liens forts », révèle Patricia Lariguet. Un vrai partenariat donc, qui dépasse la simple relation commerciale.
Dossier ” Occitanie : le bio creuse son sillon ” :
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