Entre tromperie et manque de véritable vision, Mathieu Fonton, responsable du Collectif courts circuits culturels (C4), décortique les programmes de Marine Le Pen et d’Emmanuel Macron portant sur la culture.
« Ce n’est pas une nouveauté mais la culture n’a pas été un sujet central de cette campagne. Comme d’habitude, elle a été en grande majorité survolée par les candidats. Les deux encore en lice n’échappent pas à la règle, avec des programmes très génériques », déplore Mathieu Fonton, responsable du réseau culturel C4. Parmi les propositions d’Emmanuel Macron, quelques-unes retiennent tout de même son attention comme la volonté de développer l’éducation artistique, le pass culture de 500 euros alloué aux jeunes de 18 ans, utilisable via une plateforme numérique, ou encore l’ouverture des bibliothèques le soir et les week-ends. « Ce sont des annonces très courtes, pleines de bonnes intentions, mais dont on ne sait rien de leur faisabilité. Avoir des bibliothèques ouvertes plus longtemps c’est très bien, mais faut-il pour cela faire travailler les gens plus longtemps, les augmenter ou bien embaucher de nouvelles personnes ? C’est flou ».
Autre point central lorsque l’on évoque la culture : la question du régime de l’intermittence. Quand Emmanuel Macron entend « pérenniser et adapter le statut », Marine Le Pen annonce, elle, vouloir le « remettre en ordre avec la création d’une carte professionnelle » afin de le préserver tout en contrôlant mieux les structures qui en abusent. « Le fait de parler de l’intermittence est déjà une bonne chose, car c’est évidemment la clé de voûte de la création artistique. Mais encore une fois, je ne saisis pas bien le point de vue d’Emmanuel Macron sur le sujet. Quant à Marine Le Pen, parler d’abus alors que cela ne concerne que peu de cas me paraît un peu trompeur. C’est le système dans son ensemble qui doit fonctionner de manière plus confortable », avance Mathieu Fonton.
De manière générale, ce dernier ne voit dans les propositions culturelles de Marine Le Pen que des excuses prolongeant la ligne de conduite globale de sa politique : « il est question par exemple de langue française, de patrimoine ou de ‘’métiers d’art’’ qui est une façon de distinguer art et artisanat. Derrière, il y a la vision que l’art et la culture ne sont pas de vrais métiers ».
Si la question du budget global consacré à la culture n’est évoquée par aucun des candidats du deuxième tour, certains comme Benoît Hamon et Jean-Luc Mélenchon ont par exemple suggéré de sanctuariser ce budget à hauteur de 1% du PIB. Pas de quoi satisfaire le responsable du réseau culturel : « cela reflète le manque de vision culturelle des hommes et femmes politiques actuels. Ce n’est pas tant le budget qui importe. Il faut se demander quel projet on souhaite porter et surtout quel doit être le rôle de l’État. Le désengagement ne nous gêne pas forcément mais il faut clarifier cette question, montrer une vraie direction car les choses sont en suspens depuis trop longtemps ». Ainsi, Mathieu Fonton, favorable à la multiplicité des financements de la culture, se félicite tout de même que le mécénat soit abordé dans les deux programmes et ne soit plus un sujet tabou.
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