Nouvelle loi Travail, baisses de charges et relance de l’investissement pour Emmanuel Macron. Abrogation de la loi Travail, priorité nationale et retour au franc chez Marine Le Pen. Sans surprise, nos acteurs de terrain penchent pour le premier de ces deux programmes pour l’emploi. Mais sans grande conviction.
Experte depuis deux décennies du marché du travail, Corinne Cabanes dirige un cabinet de ressources humaines. Elle partage l’idée d’Emmanuel Macron de supprimer les charges sur les emplois rémunérés au SMIC, « mais il faut que cela profite aussi au salarié. En ajoutant par exemple la moitié de l’allègement sur leur bulletin de paye ». La professionnelle en recrutement s’oppose en revanche au renforcement du contrôle des chômeurs proposé par le candidat d’En Marche ! : « Mieux vaut rendre l’emploi attractif et leur verser une vraie prime lorsqu’ils acceptent des bas salaires ou lorsqu’ils vont travailler dans des zones prioritaires. » Quant à Marine Le Pen, « elle n’a pas suffisamment creusé le sujet. Les mesures qu’elle annonce ne sont pas liées entre elles et seraient difficiles à mettre en place », poursuit la spécialiste. Corinne Cabanes de pointer la difficulté qu’auraient les organismes de formation à trouver des stages pour leurs élèves, comme le propose la candidate frontiste. Ou la taxe sur l’embauche de salariés étrangers, « qui, si elle se généralise en Europe, serait évidemment contre-productive. »
Fiscalité des entreprises
De même, la nationalité importe peu à Jérémie Loevenbruck, conseiller en développement durable et fondateur de la conciergerie de quartier Allo Bernard : « L’important ce sont les conditions de travail, et l’impact social et environnemental de l’emploi. Quel que soit le pays d’origine du salarié. » Lui fait deux propositions : taxer les entreprises en fonction des dégâts qu’elles occasionnent sur la nature ou sur les hommes, et surtaxer les hauts salaires. Jeune entrepreneur, il ne voit pas grand-chose à redire à certaines mesures proposées par Marine Le Pen : l’obligation pour l’État de respecter les délais de paiement, les taux d’emprunt préférentiels pour les petites et moyennes entreprises ou le taux réduit de l’impôt sur les sociétés : « Il est difficile de critiquer de telles mesures. C’est la façon qu’elle a de tout ramener à la préférence nationale qui est insupportable. »
Représentation des salariés
Comme Emmanuel Macron, Jérémie Loevenbruck préfère que les accords se négocient dans l’entreprise, mais il exige de solides garde-fous, « car c’est toujours le plus fort qui gagne, donc rarement l’employé. Il faut maintenir les rapports de force. » Dans sa Scop, il réunit régulièrement ses collaborateurs autour d’un bâton de parole, pour que tous soient logés à la même enseigne. Une mesure promise par l’ancien ministre de l’Économie l’a séduit : la possibilité, pour un salarié démissionnaire d’être couvert par l’assurance chômage. De quoi changer de carrière, développer un projet professionnel. Il veut même aller au-delà : « Il faudrait pouvoir décider de réduire son temps de travail pendant certaines périodes de sa vie et l’augmenter à d’autres ». Corinne Cabanes propose, elle, « de mettre en place des entretiens annuels de carrière, pour avoir une vision claire de son évolution. Parvenir à faire un virage à 180°, c’est très rare », ajoute-t’elle, avant de suggérer, « mettre le paquet sur l’orientation pour faire des travailleurs heureux, de rendre universel l’accès au numérique, comme l’eau ou l’électricité, et… de trouver le vaccin contre le chômage ! On peut toujours rêver, surtout en période électorale ! », conclut-elle.
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