ÉPANOUISSEMENT. Depuis les années 1980, les reconversions professionnelles se multiplient selon le Conseil d’orientation pour l’emploi. Comme l’explique Jean-Luc Mègemont, maître de conférences en psychosociologie, il s’agit d’un phénomène qui répond à plusieurs besoins sociétaux des salariés.
Le changement, c’est maintenant ! «Ce slogan en dit long sur les attentes de toute une société… Et nous ne parlons pas là que de politique», estime Jean-Luc Mègemont, maître de conférences en psychosociologie du travail et des organisations à l’université Jean-Jaurès. D’abord parce que «les parcours professionnels sont devenus moins linéaires, même plus chaotiques.» Pour le chercheur, la précarité grandissante (intérim, CDD…) engendre une incertitude qui peut mener jusqu’à la remise en cause de sa carrière. Cette dernière, d’ailleurs, «ne se fait plus que rarement dans une même entreprise, sur une même profession.» Il y a quelques années, une progression de carrière était possible et les salariés parvenaient à se projeter. Désormais, ils sont interchangeables et ont donc des difficultés à situer leurs actions. C’est pour modifier cet état de fait que beaucoup décident de changer de profession.
Ensuite, parce qu’il faut s’adapter aux évolutions technologiques : «La disparition induite de certaines professions et l’apparition de nouvelles, favorisent le changement de métier.» Enfin, le rapport au travail a clairement muté : «Aujourd’hui, les gens ont besoin de se réaliser par leur travail, d’affirmer leur identité avec une prédominance de valeurs post-matérialistes. Autrement dit, la réalisation de soi compte plus que le salaire.»
Selon Jean-Luc Mègemont, c’est donc l’évolution des attentes vis-à-vis du travail qui conduisent à ce phénomène toujours plus important des reconversions professionnelles : «Auparavant, on travaillait pour s’assurer une vie matérielle confortable et l’on s’investissait ailleurs dans la vie associative, le sport, mais aujourd’hui, les gens souhaitent pouvoir s’affirmer à travers leur emploi.»
Beaucoup de salariés en reconversionoptent pour un nouveau travail indépendant et s’installent à leur compte, «ils visent alors l’utilisation de leur potentiel inexploité et leur épanouissement personnel.» Quitte à opérer ce que l’on appelle une mobilité descendante, préférant un salaire moindre pour une réalisation de soi supérieure. «Des dentistes qui deviennent charpentiers, des experts-comptables qui lâchent tout pour une exploitation agricole… Ceux-là préfèrent la réalisation de soi à une paye conséquente», constate le chercheur. Si la progression professionnelle était donc de mise il y a quelques années, le “gagner mieux” a pris le pas sur le “gagner plus”.
Ainsi, Jean-Luc Mègemont identifie trois réflexions à mener absolument avant d’amorcer un tel virage. « Il faut d’abord s’interroger objectivement sur ses propres capacités et qualifications. Ensuite, il convient de prendre du recul sur sa situation à l’instant T pour savoir si c’est le bon moment pour une reconversion. Pour finir, un bilan sur le soutien social environnant est nécessaire », explique-t-il, parce qu’un changement si radical a forcément des répercussions sur l’entourage et parce que l’individu qui se lance aura besoin de ses proches. Selon Jean-Luc Mègemont, il est primordial que toutes ces conditions soient réunies pour une reconversion réussie.
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