ECONOME – Il est souvent plus facile de regarder dans l’assiette de son voisin. Pour beaucoup d’entre nous, le gaspillage a beau être un problème prioritaire, on estime souvent ne pas y contribuer nous-même. Le principal fautif, c’est la grande distribution croit-on savoir. Ou les quantités trop importantes distribuées à la cantine. Pourtant, les responsabilités sont plus partagées qu’on ne pourrait le penser. Face à ce constat, des initiatives se multiplient à chaque étape de la chaîne alimentaire. Don des invendus des supermarchés et des restaurants, meilleure gestion de son frigo ou de son menu, inventivité pour accommoder les restes…. Cette semaine le JT trouve de bonnes raisons de jouer avec la nourriture.
© Franck Alix
10 millions de tonnes ! C’est le chiffre massue annoncé par l’Ademe en 2016 correspondant à l’ensemble de la nourriture destinée à l’alimentation humaine gaspillée en France tous les ans selon l’agence nationale de l’environnement. « Un volume certes effrayant mais à ne pas confondre avec les déchets alimentaires car une partie de ce gaspillage peut être recyclé en énergie via la méthanisation, en compost ou pour alimenter les animaux », précise Franck Chatelain, coordinateur du réseau Info Énergie à l’Ademe d’Occitanie. Reste que sur ces 10 millions de tonnes, 1,2 concerne de la nourriture consommable, soit près de 20 kg par an et par personne. Et sur ces 20 kg, 7 kg d’aliments sont encore emballés.
Rapporté à la population française, le gaspillage total s’élève à plus d’une centaine de kilos par personne mais la réalité est évidemment plus complexe que ces chiffres destinés à rendre concrète l’ampleur du problème. Dans le détail et malgré les idées reçues, les responsabilités sont réparties de manière assez équilibrée sur l’ensemble de la chaîne alimentaire. 32 % du gaspillage total émane ainsi de la production agricole et 14 % de la transformation. Souvent pointée du doigt, la distribution n’est responsable qu’à hauteur de 15 % contre 33 % pour la partie consommation qui comprend celle effectuée au domicile (19%) et la restauration commerciale et collective (14%). « Il ne sert à rien d’accuser tel secteur en particulier car ils sont tous interdépendants. Le producteur s’autocensure en jetant des denrées parce qu’il pense qu’elles ne seront pas acceptées par la grande distribution qui elle-même estime que les consommateurs n’en voudront pas », explique Franck Chatelain.
Surproduction, critères de calibrage, rupture de la chaîne du froid, inadéquation entre l’offre et la demande ou tout simplement mauvaise gestion de son frigo, les causes du gaspillage sont nombreuses et chacun des acteurs dispose d’une marge de manœuvre pour les réduire. Mais cet étalement le long de la chaîne est aussi un frein à la prise de conscience. Quand on isole chaque cas individuellement, les pertes peuvent en effet paraître faibles : seulement 4 % chez les producteurs, 3,3 % chez les distributeurs et 7,3 % chez les consommateurs.
Pourtant, les enjeux sont de taille. Selon l’Ademe, le gaspillage coûte 16 milliards d’euros par an et représente un bilan carbone de 15,5 millions de tonnes d’équivalents CO². Toutefois, Franck Chatelain observe un mouvement positif : « Les premières lois sur le sujet sont assez récentes et commencent à porter leurs fruits. Des filières de recyclage se mettent en place et beaucoup d’initiatives voient également le jour en amont du gaspillage, les choses évoluent. »
© Ademe
Commentaires