Zzzz. Narcolepsie, insomnie, apnées du sommeil, somnambulisme, syndrome des jambes sans repos… Des pathologies qui ont pour point commun un endormissement diurne anormal et surtout handicapant. Pour les diagnostiquer et y adapter un éventuel traitement, l’unité du sommeil du CHU de Toulouse prend en charge les patients et effectue des tests d’observation.
« Chut ! Ici, pas de bruit », intime une aide-soignante montrant du doigt un écriteau « Silence ! » sur le mur. Au 6e étage de l’hôpital Pierre-Paul Riquet à Purpan se trouve l’unité du sommeil. Là, des neurologues analysent les cycles d’endormissement et le comportement des patients. Ou au contraire, observent leur résistance au sommeil.
Christine Porte, l’une des infirmières du service, se dirige vers la chambre 601, celle de Zara, électrodes à la main. Cette jeune fille de 18 ans a été diagnostiquée narcoleptique il y a un mois. « Je pensais que j’étais juste fatiguée, mais mes proches m’ont alerté sur le fait que je dormais beaucoup en journée. Effectivement, je pouvais m’assoupir en cours. Même pendant un contrôle où j’étais concentrée ; alors que je me disais que j’allais fermer les yeux quelques secondes, je m’endormais rapidement », explique Zara. Comme elle, 15 000 à 20 000 Français souffrent de narcolepsie, pathologie encore peu connue : « Le diagnostic est difficile à poser. D’abord parce que cette pathologie se déclare souvent à l’adolescence, période où l’on est plus fatigué naturellement ou, au contraire, où l’on ne dort pas bien, ce qui brouille les pistes. Les symptômes sont donc ignorés et repoussent d’autant plus le diagnostic. Le délai moyen pour le poser étant de sept ans », explique le docteur Rachel Debs, neurologue.
Actuellement sous traitement, Zara a pris rendez-vous à l’unité du sommeil pour l’adapter. « Ça va mieux mais j’ai encore du mal à rester éveillée lorsque je suis inactive », constate-t-elle. Installée dans un fauteuil, elle est plongée dans la pénombre. Au préalable, l’infirmière lui a placé plusieurs capteurs sur le crâne, les tempes et le menton, le tout tenu par un filet. « Nous effectuons sur elle un test de maintien de l’éveil », commente Christine Porte, en retournant en salle de soins. Là, des écrans diffusent les images directement filmées dans la chambre de la patiente, quand sur d’autres défilent les tracés enregistrés par les électrodes. « Je traque les signes d’endormissement », précise Véronique Hebles, une seconde infirmière. Et ces derniers ne tardent pas à apparaître. « On la voit clairement lutter, la tête tombe, les premiers signes sont visibles. Ça y est, elle dort. On arrête le test », décide l’infirmière. Zara aura résisté neuf minutes.
Marie, également narcoleptique, attend dans la chambre voisine. « Moi, je ne suis pas malade, je suis simplement atteinte d’une pathologie », lance-t-elle aux premiers regards. Mais elle concède que la narcolepsie l’a tout de même contrainte à abandonner son métier : « J’étais employée de banque mais mon besoin de faire des siestes et d’aménager mon temps en fonction ne m’a pas permis de continuer. » Aujourd’hui, elle est gestionnaire de patrimoine et travaille à domicile, ce qui lui offre la possibilité d’adapter sa vie professionnelle à son rythme. Sous observation dans une troisième chambre, Florence, une infirmière-puéricultrice de 39 ans, a elle aussi dû quitter son emploi. « Suite à une opération du dos, je ne dors plus correctement. Je me réveille constamment fatiguée », commente-t-elle. Selon ses médecins, ses douleurs ne seraient peut-être pas la cause de ses troubles du sommeil. « J’attends de cette hospitalisation la pose d’un diagnostic.
J’espère que ces tests vont permettre d’identifier ce dont je souffre », appelle-t-elle de tous ses vœux. Pour cela, elle a subi un test de latences d’endormissement. Allongée dans un lit, lumières éteintes, elle doit fermer les yeux et tenter de s’endormir. « Sur commande, ce n’est pas facile », avoue-t-elle. Pourtant, toutes les deux heures, durant 20 à 34 minutes, elle devra répéter ce rituel.
Les observations se poursuivent la nuit évidemment. « Certaines personnes sont présentes de 17h à 9h le lendemain pour des tests de plus longue durée. On y recherche les apnées du sommeil notamment », précise Véronique Hebles. Tous les jours, de nouveaux patients intègrent l’unité pour des suivis. D’autres sont vus en consultation par les docteurs Tiberge et Debs, les neurologues référents du service. « Nous en effectuons 10 à 15 par semaines, qui durent une heure environ. Les troubles du sommeil étant transdisciplinaires, nous abordons plusieurs champs pour ajuster un diagnostic », explique cette dernière. Le contexte professionnel et privé, et d’autres pathologies peuvent impacter le sommeil. Et même si 10 à 20 % de la population souffre d’insomnies, la plupart du temps, les causes restent comportementales ou psychologiques. « Il n’y a alors pas forcément besoin de traitements chimiques, l’amélioration de l’hygiène de vie peut suffire », rassure la neurologue.
Dossier ” Troubles du sommeil : fin du cauchemar ” :
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