Seulement 16 % de jeunes considèrent être très bien informés sur le sida. Un pourcentage qui a chuté de 10 points entre 2012 et 2016, selon un sondage Ifop. Pour y remédier et intéresser les 15-25 ans, les opérations de prévention et les campagnes de sensibilisation se mettent au goût du jour.
« La pilule du lendemain empêche la transmission du virus du sida ». « Il peut se transmettre en embrassant une personne ou en s’asseyant sur le siège de toilettes publiques ». En 2016, 30 % des jeunes de 15 à 25 ans interrogés dans le cadre d’un sondage IFOP pour Sidaction, avaient des représentations faussées de la maladie et de ses modes de transmission. Une tendance qui se confirme sur le terrain. « Certains jeunes reviennent à de fausses croyances sur le sida. Il ne faut pas baisser sa vigilance », explique Lucille Hamonou, coordinatrice interassociatif du projet “Fêtons plus, risquons moins”.
Depuis cinq ans, les travailleurs sociaux des associations Act’up Sud-Ouest, Avant-Mardi, Aapade, Addict 31, Avenir Santé, Clémence Isaure, La ligue contre le cancer et la LMDE sillonnent donc les lieux de fête de Toulouse pour aller à la rencontre des jeunes. Ils informent, orientent et proposent du matériel pour une soirée à moindre risque.
« Nous essayons d’être au maximum présents dans le milieu festif toulousain afin de donner aux gens la capacité d’agir de manière positive pour leur santé. Nous voulons réduire les risques immédiats mais le but est également d’instaurer une culture de prévention. »
Pour cela, ces anges-gardiens de la nuit garent trois soirs par semaine leur camion place Saint-Pierre et rue Gabriel Péri, se déplacent dans les rues de la ville en vélo triporteur, et interviennent lors de festivals comme Rio Loco ou les Siestes électroniques. « Il s’agit de sortir du cadre défini des entretiens médicaux. Avoir à faire le premier pas et devoir se rendre dans une structure spécialisée peut être un frein. Là, c’est nous qui venons à eux. Le triporteur, par exemple, favorise le lien de pair à pair et permet de personnaliser au maximum l’échange, de s’adapter à notre interlocuteur », explique Lucille Hamonou.
Avec des slogans comme «Avec les capotes, la fête est plus hot’», l’équipe du dispositif fait aussi attention à ne pas être moralisatrice. « Quand nous nous adressons à des jeunes, nous nous adaptons à leurs codes », raconte Lucille Hamonou. Plutôt que de sermonner, ils préfèrent donc tendre l’oreille et écouter, prodiguer des conseils avisés et distribuer, entre autres, préservatifs masculins et féminins, éthylotests, kits d’injection. Pour bien aborder ce public, ils ont une ligne de conduite : ne pas juger, respecter la dignité des personnes et leur capacité d’agir, et accueillir de manière inconditionnelle. « Notre message n’est pas de dire : sans alcool, la fête est plus folle », lâche Lucille Hamonou.
Pour attirer l’attention de cet auditoire particulier, les pouvoirs publics rivalisent également d’imagination. Avec des webséries, des partenariats avec des youtubeurs, un site Internet d’information au ton décontracté, Santé publique France vient, par exemple, sur l’un des terrains favoris des jeunes : le numérique. «Parmi les 16-25 ans, il existe deux types de populations différentes. Les adolescents qui sont dans une période d’apprentissage de la sexualité et les jeunes adultes qui eux sont dans des situations diverses, très hétérogènes. On ne s’adresse pas à ces deux populations de la même manière », précise Lucile Bluzat, chargée d’expertise marketing social pour la structure.
Lorsqu’une campagne vise les adolescents, « nous contextualisons : avec eux, il est préférable d’aborder le sujet en parlant de sexe plutôt que de risque. » Ainsi, l’établissement public a mis en ligne la plateforme onsexprime.fr. Des informations sur le sida y sont données sur un ton décontracté et les visiteurs peuvent cliquer sur des liens comme «Les 12 pires excuses pour ne pas utiliser un préservatif ». Les internautes mordent à l’hameçon : plus de 160 000 vues ont été comptabilisées pour les quatre vidéos de la campagne 2016 avec les youtubeurs.
À âge différent, stratégie de communication différente. En ce qui concerne les jeunes adultes, il s’agit, pour Lucile Bluzat, d’évoquer le sujet du VIH avec une approche positive. La dernière campagne de Santé publique France parle, par exemple, des bénéfices des méthodes de dépistage. «Nous savons aujourd’hui que faire peur peut influencer le comportement de manière immédiate, mais ils auront des relations sexuelles toute leur vie et cette méthode n’a aucune incidence sur le long terme », ajoute celle qui préconise plutôt d’utiliser l’humour pour mieux sensibiliser.
À Toulouse, la stratégie consiste à poursuivre l’effort pour aller au-devant de la nouvelle génération. Le dispositif “Fêtons plus, risquons moins” lancé sous le mandat de Pierre Cohen et financé par la Mairie de Toulouse, la Préfecture et l’Agence de Santé régionale, a permis d’aller à la rencontre de 11 000 personnes en 2016. « Il sera encore développé en mettant en place des “consultations de jeunes consommateurs” », assure Florie Lacroix, conseillère municipale déléguée en charge de la prévention chez les jeunes. Des professionnels y offriront une première consultation individuelle directement à proximité des lieux de fêtes.
Dossier ” Sida : sus au virus ! ” :
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