Les projets de Marine Le Pen et d’Emmanuel Macron pour l’environnement sont diamétralement opposés. Et si, pour Paul Neau, responsable du bureau d’études environnementales Abies, le premier nie les enjeux écologiques, l’autre manque cruellement d’ambition.
« Aujourd’hui, avec 75% de son énergie provenant du nucléaire, la France est un cas à part ». Pour Paul Neau, responsable d’un bureau d’études environnementales Abies, il est temps de diversifier nos sources d’approvisionnement. Une vision que ne partage pas Marine Le Pen. Pour elle, pas question d’arrêter le nucléaire et d’appliquer la loi de transition énergétique. Cette législation, adoptée en 2015, vise à porter la part du nucléaire dans la production d’électricité à 50 % à l’horizon 2025. La candidate FN souhaite plutôt rénover le parc existant, la centrale de Fessenheim comprise. « Elle fait du clientélisme et parle de la défense de l’emploi des salariés de la centrale mais n’a pas de réelle vision énergétique », explique Paul Neau. Le programme d’Emmanuel Macron sur la question serait, lui, peu ambitieux comparé à ce qui a été proposé par Benoit Hamon, Yannick Jadot ou Jean-Luc Mélenchon, mais aurait le mérite d’être « dans la continuité de la loi énergétique». Le représentant d’En Marche ! veut ainsi fermer la centrale alsacienne mais n’est pas pour une sortie totale du système actuel. Pourtant, Paul Neau, qui s’appuie sur le scénario de l’association Négawatt, dont il est membre, estime qu’il faut voir plus loin : le 100 % renouvelable est possible dès 2050.
©LucLegay« Marine Le Pen veut un moratoire sur l’éolien alors que c’est la première source d’électricité alternative. C’est incohérent avec l’idée d’une transition énergétique » explique le physicien de formation. Emmanuel Macron propose quant à lui le passage à 32% de renouvelable d’ici à 2030 et veut simplifier les procédures de déploiement. Une proposition bienvenue pour Paul Neau : « On n’a jamais vu quelqu’un se faire refuser le permis de construire d’une centrale nucléaire, alors que faire installer un parc d’éoliennes, par exemple, c’est très compliqué ». Cette mesure serait même une priorité pour lui. « Il faut aussi expliquer au grand public que se fournir en électricité renouvelable est aujourd’hui moins cher », ajoute-t-il. Mais se procurer de l’énergie autrement ne suffit pas, il s’agirait également d’apprendre à l’économiser.
1 million. C’est le nombre de logements qu’Emmanuel Macron veut aider à rénover d’ici à 2022 s’il accède à l’Élysée. « Cela peut paraître beaucoup mais sur les 30 millions de logements que comptent la France, cette proposition est peu ambitieuse », décrypte-t-il. Et Marine Le Pen ne ferait pas mieux « pas de proposition concrète sur le sujet de son côté ». Or pour Paul Neau, en plus des avantages écologiques, rénover les bâtiments permettrait de créer des emplois locaux et de faire travailler des artisans. « Là aussi, il faut inciter financièrement et simplifier les démarches pour motiver les gens à sauter le pas », ajoute-t-il.
« Alors que le transport des personnes et des biens est le premier secteur émetteur de gaz à effet de serre en France, les programmes des deux candidats sont peu ambitieux en la matière, voire très pauvres » explique Paul Neau. Emmanuel Macron assure vouloir confirmer les bonus-malus pour les achats de véhicules neufs, et donc « le principe du pollueur-payeur, ce qui est une bonne chose ». Il prône également le développement des véhicules électriques, quand Marine Le Pen avantage la filière hydrogène, « mais ils ne disent pas comment l’électricité dans un cas, l’hydrogène dans l’autre seraient produits. » Pour améliorer le secteur des transports, le membre de l’association Négawatt, préconise plutôt le développement du rail et la taxation du kérosène.
Au final, « Marine Le Pen ne parle pas de ‘’climat’’ ni de ‘’changement climatique’’ dans son programme, ce qui est inquiétant : quand on ignore les maux et les raisons des maux, on ne peut proposer un projet à la hauteur des enjeux. Emmanuel Macron est lui dans la continuité de ce qui se fait depuis cinq ans, ce qui n’est pas non plus à la hauteur des enjeux climatiques », conclut Paul Neau.
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