Président du CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France) de Toulouse Midi-Pyrénées, Franck Touboul réagit à l’utilisation de l’étoile jaune dans les manifestations de samedi dernier, contre le pass sanitaire. Interview.
Le Journal Toulousain : Comment avez-vous réagi à la vue des étoiles jaunes, des tatouages d’identification de déportés de la deuxième guerre mondiale ou des pancartes de personnalités politique grimées en Hitler que portaient certains manifestants contre le pass sanitaire, ce samedi 17 juillet ?
Franck Touboul : Qu’il y ait des inquiétudes par manque de recul ou des craintes sur le vaccin anti Covid-19, je peux le comprendre. Et il est normal d’exprimer sa volonté de ne pas se soumettre aux décisions qui ont été prises à propos du pass santaire. Mais, pour justifier cela, reprendre les symboles d’une des plus grandes horreurs du vingtième siècle, c’est juste ignoble, dégueulasse. Pas seulement pour la communauté juive mais pour toutes les familles de ceux qui ont combattu, les résistants, les déportés. Ceux qui font cela sont des salopards qui ne sont pas dignes d’être des citoyens de ce pays.
Qu’auriez-vous envie de leur dire ?
Manifestez, mais évitez de telles saloperies. Ne renouvelez pas ce type de comparaisons, car cela insulte des gens qui ne vous ont rien demandé. Il y a mille autres moyens pour sensibiliser les gens que de systématiquement détourner la pire barbarie de l’ère moderne. Que vous restera t-il comme argument lorsqu’il s’agira, par exemple d’endiguer une vague fasciste ? Et je ne crois pas que cela serve votre cause. Souvenez-vous du mouvement des gilets jaunes, dont le sens initial a été détourné à cause de quelques fachos. Il pourrait se produire la même chose pour les anti vaccins. Enfin, souvenez-vous que la liberté que vous défendez a été acquise au prix de l’effort que nos anciens ont consenti. Ce sont eux qui nous ont émancipé de la tutelle nazie.
Demain, mercredi 21 juillet, une nouvelle manifestation est prévue à Toulouse, entre autres revendications contre le pass sanitaire. Si de tels comportements venaient à se répéter, envisageriez-vous de porter plainte ?
On ne peut sans cesse être dans la coercition et agir sur le plan judiciaire. Pour le Crif, comme pour les associations de déportés ou de résistants, porter plainte est une décision ultime. Et cela donnerait de l’écho à ce qui reste un épiphénomène. N’oublions pas que, samedi dernier, s’il y avait 100 000 manifestants dans les rues, le même jour, des centaines de milliers de gens se faisaient vacciner. Les journalistes ont aussi la responsabilité de ne pas faire un effet de loupe sur ces sujets-là. Plus ils sont relayés, plus ils s’amplifient.
Quelle est votre position sur l’obligation de présenter un pass sanitaire dans certains lieux ou sur celle de se faire vacciner pour certaines professions ?
Je comprends que cela dérange, au niveau des symboles. Il faut bien sûr que le secret médical soit respecté et que l’usage de nos données soit strictement encadré. Mais nous avons la responsabilité collective d’assurer la santé des plus fragiles. Ces obligations sont d’abord des actes humains.
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