La clé du succès de la réinsertion des mineurs délinquants ? La continuité de l’accompagnement, du milieu carcéral à la remise en liberté, selon Élodie Carin, déléguée régionale du Genepi. L’association pour le décloisonnement des prisons prône le renforcement du nombre d’éducateurs, ces fils rouges indispensables aux jeunes.
Les chiffres sont accablants. Cinq ans après leur incarcération, 66% des mineurs déjà placés en détention font l’objet d’une nouvelle condamnation à de la prison ferme, selon une étude du ministère de la Justice en 2011. « Il n’y a pas de statistiques récentes, c’est très difficile de connaître les taux de réinsertion et de récidive », explique Élodie Carin, déléguée régionale du Genepi, association pour le décloisonnement des prisons. En quoi consiste donc cette réinsertion ? Comment sont-ils accompagnés une fois leur peine terminée ? « Quand un jeune sort de prison ou d’un centre éducatif fermé, il continue d’être suivi par un éducateur en milieu ouvert. Cette personne est le véritable fil rouge tout au long du placement en détention et à la sortie », précise Élodie Carin.
Son rôle commence dès l’incarcération : c’est souvent lui qui permet au mineur de garder un lien avec sa famille et son environnement social, mais aussi de réfléchir à l’après. Une fois hors de la prison, le mineur peut compter sur son référent pour gérer les questions matérielles. Quand sa sortie est associée à une interdiction de territoire (de revenir dans la ville où il habitait), l’éducateur se charge de lui trouver un lieu adapté à sa personnalité pour l’accueillir : foyer de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) ou de jeunes travailleurs, internat… « S’il est retourné dans sa famille, l’éducateur lui rend des visites à son domicile », continue Élodie Carin. C’est aussi ce travailleur social qui l’accompagne dans sa recherche d’emploi, de stage ou pour son inscription dans un établissement scolaire. Un rôle primordial auprès de ces mineurs délinquants « souvent en manque de repères familiaux et sociaux ». La mission se poursuit pendant une durée déterminée par le juge des enfants, en général jusqu’à leur majorité.
« Le problème est que ces éducateurs manquent cruellement de moyens. Ils sont censés être très présents auprès des jeunes après leur sortie du milieu carcéral, mais ils ont beaucoup trop de dossiers à gérer. Il y a aussi beaucoup de contractuels, seulement engagés pour des durées inférieures à deux ans, ce qui rend difficile un suivi sur le long terme », dénonce Élodie Carin. Le Genepi demande ainsi au ministre de la Justice d’augmenter le nombre de recrutements pour assurer un meilleur accompagnement des délinquants de moins de 18 ans. Autre solution avancée pour améliorer la réinsertion: renforcer la scolarisation.
« Aujourd’hui, dans les quartiers pour mineurs des établissements pénitentiaires, les jeunes n’ont que deux à trois heures de cours par jour, prodiguées par un professeur de l’Éducation nationale. C’est trop peu et il manque des volontaires. » L’association souhaite « redonner toute sa place à la primauté de l’éducatif sur le répressif ». Enfin, Élodie Carin met en avant l’importance d’un accompagnement individualisé, prenant en compte la sphère familiale et sociale : « La justice est lente et expéditive. La solution serait d’adapter à chaque enfant ou adolescent une réponse pénale. »
Maylis Jean-Preau
Membre du Genepi, association qui milite pour le décloisonnement des prisons, Élodie Carin est responsable de la coordination des groupes locaux pour la Région Atlantique, chargée de la création de contenus de formation sur le milieu prison-justice.
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