EN SELLE ! – Et si on réservait à nos excréments l’accueil qu’ils méritent ? Plutôt que de gaspiller des litres d’eau pour les évacuer au plus vite et beaucoup trop d’énergie pour les traiter. Ils sont pourtant une source inépuisable d’énergie et permette de soigner des maladies comme l’obésité. Sans tabou, le JT braque ses projecteurs dans nos cuvettes. Et sur les scientifiques, les médecins, et les associations qui travaillent quotidiennement sur la plus mal-aimée des matières premières.
JTAujourd’hui, un Toulousain envoie quotidiennement 150 litres d’eau et 1 litre d’urine dans les canalisations d’eaux usées de la ville. Toilettes, machine à laver, douche, toutes les eaux dites domestiques sont mélangées dans les tuyaux. Direction ensuite le Nord de Toulouse et plus particulièrement la station d’épuration (STEP) de Ginestous qui traite 90% des eaux usées de la première couronne. Sa mission : les débarrasser des pollutions dont elles sont chargées avant de les rejeter épurées dans le milieu naturel.
Ce liquide comprenant à la fois urines et excréments passent ainsi par différentes étapes. Entre autres : filtre, séparation du sable et de la graisse, et traitement biologique qui dégradent la matière organique. Une fois traitées, les eaux toulousaines sont donc envoyées dans la Garonne. « Ce procédé a plusieurs impacts négatifs sur l’environnement », explique Mathieu Sperandio, professeur en génie des procédés et environnement à l’INSA de Toulouse. «Quand le système d’évacuation des eaux usées a été imaginé, il y a une cinquantaine d’années, l’une des priorités était d’éloigner les stations d’épuration de la population afin d’éviter les problèmes sanitaires et les maladies infectieuses. Tout a donc été rassemblé en un seul point et cela est très énergivore » explique-t-il. Mais le coût écologique ne provient pas que de l’infrastructure des STEPS et des canalisations usées, il est aussi affaire de méthode.
Le procédé servant à éliminer l’azote présente dans les selles utilisé dans ce type de station produit effectivement du protoxyde d’azote, un gaz à effet de serre. « Au total, pour le traitement des eaux usées d’une ville d’un million de personnes, cela équivaut à la pollution émise par les transports de 500 000 habitants », constate l’ingénieur. De plus, l’eau traitée rejetée dans les rivières peut causer des dommages sur les cours d’eau. Il faut savoir que naturellement les bactéries qui y vivent, le nettoient en se nourrissant des pollutions organiques. Pour cela, ces organismes utilisent l’oxygène présent dans l’eau. Or plus l’eau est polluée, plus ils sont nombreux, plus ils consomment. Si bien qu’à un moment donné, la zone peut être asphyxiée. «Il risque de ne plus y avoir assez d’oxygène pour permettre aux poissons et aux autres organismes vivants de respirer normalement», ajoute Mathieu Sperandio. Face à ce constat, l’ingénieur estime donc qu’il faut renouveler nos systèmes d’assainissement. Selon lui, il est l’heure de valoriser la ressource inexploitée que sont nos excréments et de revoir nos méthodes de traitement.
La rédaction
Le Journal toulousain est un média de solutions hebdomadaire régional, édité par la Scop News Medias 3.1 qui, à travers un dossier, développe les actualités et initiatives dans la région toulousaine. Il est le premier hebdomadaire à s'être lancé dans le journalisme de solutions en mars 2017.
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