L’on a coutume de dire que l’intérim est un bon indicateur de la dynamique du marché de l’emploi. Alors, en cette période de crise économique où ce dernier est particulièrement instable, quelle est la situation de l’emploi intérimaire en Occitanie ? Quels secteurs y ont-il encore recours ? Quelles sont les solutions pour relancer l’activité, et donc les missions intérimaires ? Réponse avec Sébastien Hampartzoumian, directeur des opérations Sud-Est chez Adecco, leader du recrutement intérim en France.
Sébastien Hampartzoumian, l’emploi intérimaire est en baisse en Occitanie, de 14,5%, par rapport à l’année dernière. La région fait-elle partie des plus sinistrées de France en la matière ?
Le contexte actuel reste très particulier et marque de manière inégale les différents secteurs d’activité. Ces derniers étant irrégulièrement répartis en France, il est difficile d’avancer qu’une région est plus touchée qu’une autre. Les difficultés peuvent ainsi être très localisées. Par exemple, en Occitanie, nous observons un regain de l’emploi intérimaire, par rapport à l’année dernière, dans certains départements comme le Tarn (+18,1%) et le Tarn-et-Garonne (+11,4%), ce qui traduit une croissance. A l’inverse, la Haute-Garonne, extrêmement impactée par la situation du secteur aéronautique et de son écosystème, voit le nombre des effectifs en intérim chuter de 34,8%.
Le deuxième confinement est moins contraignant pour l’activité économique que le premier. Avez-vous observé une différence en ce qui concerne l’emploi intérim ?
Tout à fait ! La baisse effective des activités de travail temporaire était de 70 à 75% lors du premier confinement. Et cela de manière très brutale. Durant ce second confinement, elle n’a été que de 5 à 15%. Mais c’est surtout la répétition des coups de frein que l’on donne à certains secteurs qui mettent les entreprises, notamment les ETI et les PME, en difficulté, en termes de trésorerie, de commandes, de charges… et qui se traduit immédiatement par l’arrêt des recours à l’intérim.
Comme vous l’indiquiez, tous les secteurs d’activité n’ont pas été impactés de la même manière en Occitanie. Quels sont ceux qui l’ont été le plus et donc ceux où le recrutement de travailleurs temporaires a le plus chuté ?
Bien évidemment, l’aéronautique, comme tout le monde le sait désormais, est très touché par la crise, et les recours à l’emploi intérim y reste encore très faible. La priorité étant donnée aux salariés permanents. De plus, la filière tire vers le bas une grande partie de l’industrie, pour laquelle la baisse des effectifs intérimaires a été de 28% en septembre, par rapport à 2019. Cette baisse est cependant moins importante qu’au premier confinement.
Quant au BTP, il a finalement pas mal résisté, même si de nombreux chantiers se sont arrêtés durant le confinement du printemps, puis durant le second.
En ce qui concerne les services, nous observons une chute de 21,2% du travail temporaire. Toutefois, la filière reste inégalement impactée : l’hôtellerie-restauration a bien sûr souffert, mais certaines activités ont plutôt bien résisté, à l’image du commerce agro-alimentaire (+5,2% d’embauches en intérim).
De même, avec le développement du e-commerce, les entreprises de logistique et de transport ont particulièrement tenu le marché de l’emploi intérimaire en affichant +23,9% par rapport à l’année dernière.
Au regard de ces statistiques, les premiers mois de 2021 s’annoncent-ils moins atones ?
Il faut rester optimistes car nous savons, au vu du premier déconfinement, que l’activité peut rebondir rapidement dans certains secteurs. D’autant que nombre d’activités vont être dynamisées en cette période de fêtes de fin d’année. Mais il est difficile de se prononcer, nous manquons de visibilité pour l’instant. Sauf à ce que tout redevienne comme avant, ce qui paraît improbable, nous pouvons prévoir une période d’inertie début 2021 : la croissance ne fera pas de bond exceptionnel, même si elle repart quelque peu à la hausse.
Pour soutenir ce marché de l’emploi en berne, Adecco a lancé le dispositif du CDI apprenant. De quoi s’agit-il ?
C’est un CDI de droit commun qui permet d’accompagner un certain nombre de personnes vers des métiers considérés en tension et dont une centaine de milliers d’offres restent non-pourvues en France. Nous avons identifié 17 professions* dans ce cas, pour lesquelles beaucoup de postes sont à pourvoir actuellement. L’objectif est donc de recruter des CDI chez Adecco, et de les former immédiatement à ces métiers, en partenariat avec des organismes certifiés. Ainsi, nous avons la double ambition de proposer un emploi sécurisé à des personnes en recherche et de fournir de la main d’œuvre qualifiée aux entreprises. Tout l’enjeu est donc de mettre en relation l’offre et la demande.
A qui s’adresse le CDI apprenant ?
Le premier des critères reste la motivation et la volonté du candidat à se réorienter professionnellement. Ensuite, si la formation est suivie convenablement, les enseignements du tronc commun acquis et les qualifications nécessaires obtenues, les participants seront tous capables de pratiquer le métier qu’ils convoitent. C’est une manière de miser sur les compétences et non plus, uniquement, sur un diplôme. À ce jour, l’objectif d’Adecco est la signature de 15 000 CDI apprenants d’ici la fin 2021 à l’échelle nationale, dont 3 000 avant janvier prochain. Nous avons déjà reçu plus de 7 000 candidatures.
*Les 17 métiers en tension :
aide-soignant
conducteur de ligne de fabrication
conducteur d’engins de chantier
conducteur poids-lourds, semi-poids-lourds et transports en commun
conseiller-chargé de clientèle banque et assurance
électricien BTP
électromécanicien
maçon coffreur
maçon voirie et réseaux divers
mécanicien poids lourds, véhicules industriels, utilitaires ou légers
monteur câbleur électricité
plombier chauffagiste
technicien de maintenance
technicien énergétique-thermique
technicien fibre optique
technicien support IT
tuyauteur-soudeur.
Commentaires