Emmanuelle Garnier, la présidente de l’université Jean-Jaurès, s’associe à la fronde menée par certains de ses pairs qui contestent le projet d’augmentation des frais d’inscription pour les étudiants étrangers extraeuropéens. Leur facture pourrait ainsi être multipliée par 15 à la rentrée 2019. Université Toulouse – Jean-Jaurès © Gyrostat
Dans un communiqué, le 5 décembre dernier, Emmanuelle Garnier, la présidente de l’université Jean-Jaurès, a exprimé son opposition de principe au projet du gouvernement d’augmenter les droits d’inscription pour les étudiants étrangers extraeuropéens.
Ces frais, qui concernent environ 100 000 étudiants, passeraient de 170 euros à 2 770 euros par an en licence et de 243 puis 380 euros à 3 770 euros par an en master et doctorat. De quoi couvrir un tiers du coût de la formation prise en charge par l’État. Paradoxalement, cette mesure, portée par la ministre de l’Enseignement supérieur Frédérique Vidal, s’intègre dans un plan d’attractivité en direction des étudiants étrangers intitulé ‘’Bienvenue en France’’ et présenté par le Premier ministre en novembre 2018.
Dans un second communiqué daté du 19 décembre, Emmanuelle Garnier a réaffirmé sa position au nom des « principes d’universalité » qui fondent l’université. Suivant l’exemple de ses homologues de Clermont-Ferrand ou de Rennes II, elle s’est engagée à avoir « recours à toutes les dispositions réglementaires permettant aux étudiants internationaux de ne pas avoir à s’acquitter de frais d’inscription différenciés », si le projet de réforme était effectivement mis en œuvre à la rentrée 2019. En effet, ce dernier prévoit que chaque université garde une certaine latitude en termes d’exonérations.
Emmanuelle Garnier s’inquiète donc que ce texte introduise un « nouvel élément de fracture et d’inégalité entre les universités au niveau national ». Certaines d’entre elles pourraient en effet décider de fermer leurs portes aux étudiants les moins riches, notamment ceux issus du Maghreb et de l’Afrique francophone.
La Conférence des présidents d’université (CPU) juge, par ailleurs, que cette mesure n’est pas adaptée aux objectifs d’attractivité annoncés par le gouvernement. Elle demande donc une suspension de cette dernière, le temps qu’un groupe de travail, réunissant les établissements d’enseignement supérieur et les ministères concernés, « en mesure les impacts et en précise les modalités d’application ».
Face à cette fronde, la ministre a rappelé que les présidents d’université, « en tant que fonctionnaires d’État », avaient un « devoir d’obéissance et de loyauté » et qu’ils se devaient de porter « les politiques publiques décidées ». La ministre a également expliqué que « le cœur du sujet » est la manière dont « nous accueillons ces étudiants ». Un accueil qu’elle juge globalement « indigne de notre pays ».
Le plan “Bienvenue en France” prévoit aussi une simplification des processus de délivrance de visas et de titres de séjour, la garantie d’un titre de séjour pour les titulaires d’un doctorat qui souhaitent travailler en France, la création d’un label des conditions d’accueil et le triplement du nombre de bourses destinées aux étudiants internationaux. L’objectif étant d’atteindre les 500 000 étudiants étrangers d’ici 2027.
Mais comme le rappelle Emmanuelle Garnier, des prix élevés ne sont pas nécessairement synonymes de qualité et « aucune stratégie de rayonnement international ne justifie une discrimination et une sélection sociale ».
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